Le prolifique Rodolphe associe sa plume au talentueux Griffo pour nous livrer une biographie fictive mais solidement documentée du célèbre écrivain Charles Dickens.

Londres, 1852… Dans les bas-fonds crasseux de la capitale victorienne, Charles Dickens fait la connaissance de son double… L’un est un écrivain respectable débattant dans les salons cossus des beaux quartiers. L’autre une brute épaisse qui fraye avec les pires canailles et fréquente les quartiers sordides… Si leur apparence est semblable, ils n’ont rien en commun…

La face sombre de Dickens ne va -t-elle pas tenter de se débarrasser de l’autre Dickens pour prendre sa place dans la bonne société? Mais ne sont-ils pas en définitive les deux facettes d’une même pièce?

A la suite de Dickens, Rodolphe esquisse un portrait saisissant du Londres victorien qu’il teinte de fantastique, créant pour l’occasion un double malfaisant et inquiétant de l’auteur d’Oliver Twist et de David Copperfield. Prenant le contre-pied de Stenvenson et de son Mister Hyde, ce double est la part obscure du célèbre écrivain britannique, l’homme qu’il aurait pu devenir s’il n’avait rencontré le succès avec ses écrits.

La fin du premier opus pouvait laisser entendre une fin convenue mais c’était sous-estimer le talent de conteur de Rodolphe qui parvient à tenir le lecteur en haleine, jouant avec malice les équilibristes, esquissant les prémisses d’une fin tragique pour mieux prendre le lecteur à contre-pied. Il fait de Wilkie Collins, que beaucoup considèrent à juste titre comme l’un des pères du roman policier, l’un des témoins de cette étrange histoire… Elément d’autant plus savoureux que Collins qui devint dépendant au laudanum souffrit de crise de paranoïa aigüe durant lesquelles il était persuadé d’être poursuivit par un Doppelgänger, son double fantomatique… Comme le Dickens de l’histoire!

C’est avec un réel plaisir que l’on retrouve le trait de Griffo, auteur protéiforme qui renoue avec le style à la fois sombre et lumineux qu’il avait adopté pour mettre en image Monsieur Noir scénarisé par le prolifique Jean Dufaux avec qui il a signé des monuments du neuvième art, tel Giacomo C. Ses planches sont d’une rare élégance et sa mise en couleur tout juste somptueuse…

Avec Dickens & Dickens, Rodolphe rend hommage aux auteurs qui ont marqué la littérature du XIXe siècle, de Charles Dickens à Robert Louis Stevenson en passant par Wilkie Collins.

A travers ce diptyque sombre et lumineux teinté de fantastique pour lequel il s’associe au talentueux Griffo, le scénariste se livre à un exercice de style savoureux et envoûtant qui nous brosse un portrait saisissant de l’homme complexe que fut Dickens et de son époque…