Le fantôme de l’Opéra est sans nul doute l’un des plus célèbres romans de Gaston Leroux. Pourtant, ce récit policier feuilletonesque oscillant entre polar et fantastique publié dans le Gaulois entre 1909 et 1910 ne met nullement en scène le célèbre journaliste Joseph Rouletabille… Tel est néanmoins le cas dans cette audacieuse adaptation…
Devenu vieux, le Persan a confié au journal l’Epoque ses notes et des documents relatifs aux étranges événements s’étant déroulé au sein de l’Opéra Garnier quelques années auparavant… Après avoir mené une minutieuse enquête et rencontré les protagonistes de l’histoire, Joseph Rouletabille vient el trouver pour que l’homme lui raconte l’histoire de vive voix…
Il revient sur les mystérieux évènements s’étant déroulé au Palais Garnier : le machiniste retrouvé pendu ; César, le cheval blanc du défilé du Prophète qui avait mystérieusement disparu ; le lustre qui s’était écrasé dans le public pendant une représentation de Faust de Gounod… Sans oublier ce mystérieux fantôme qui exigeait du nouveau directeur de l’Opéra une rente mirobolante et l’usage exclusif de la loge n°5 de l’Opéra…
En coulisse, après avoir brillamment remplacé la Carlotta dans le rôle principal, Christine Daaé avait confié son histoire et la sources de ses tourments au vicomte Raoul de Chagny, l’homme dont elle était éperdument éprise : elle vit sous l’emprise d’un ténébreux mentor qui n’était autre que le mystérieux fantôme qui hantait l’Opéra…
L’histoire du roman est censément conté par un journaliste et historien qui s’est appuyé sur de nombreux documents et témoignages des différents protagonistes pour écrire son récit qui, plus d’un siècle après sa première publication, n’a rien perdu de sa force évocatrice…
Donner à ce journaliste le nom de Rouletabille est un artifice narratif audacieux mais néanmoins délicieusement efficace permettant à Jean-Charles Gaudin de l’intégrer dans cette série rendant hommage à ce personnage emblématique du polar français et qui servit de matrice au Tintin d’Hergé…
Si ce n’est certes pas la première fois que Rouletabille s’invitait dans l’Opéra Garnier (Bernard Swysen et André-Paul Duchâteau l’y avait déjà convié, lui confiant le rôle du vicomte), ce présent opus s’avère d’autant plus convaincant qu’il respecte la structure du récit originel et met en scène un Fantôme de l’Opéra apparaissant plus que jamais comme un personnage tourmenté, sorte de psychopathe romantique aussi dérangeant que fascinant et envoûtant… Les scènes clefs du roman qui voient le fantastique s’immiscer dans le récit, telle les voix émanant de la loge de Christine, l’inquiétante scène du cimetière où le bal masqué, retranscrivent fidèlement l’ambiance si particulière qui baigne le roman.
Signée Stéphane Perger, la couverture de l’album, montrant un fantôme faisant peser une inquiétante menace sur Rouletabille, est une fois encore particulièrement envoûtante. Christophe Picaud, qui avait succédé à Sibin Slavkovic sur le tome précédent, signe un album convaincant.
Proposant de superbes visuels de l’Opéra Garnier, son trait de facture classique sert joliment le récit et redonne vie au Paris de la Belle époque, sans atteindre toutefois la puissance graphique de l’adaptation qu’avait faite Christophe Gaultier du roman de Gaston Leroux.
Jean-Charles Gaudin donne avec audace le rôle du narrateur à Rouletabille, venu trouver le Persan pour qu’il complète le récit du manuscrit qu’il a adressé au journal l’Epoque.
Les pièces de son puzzle narratif s’agencent de façon convaincante alors que le trait classique et réaliste de Christophe Picaud redonne vie au Paris de la Belle époque et aux étonnants personnages du roman feuilleton de Gaston Leroux… A commencer par le fameux fantôme dont l’ombre plane encore et toujours sur le vénérable édifice…
Par le truchement d’un audacieux artifice, ce Fantôme de l’Opéra s’intègre de façon convaincante dans les Aventures de Rouletabille, personnage emblématique de la littérature policière né sous la plume de Gaston Leroux il y a plus d’un siècle déjà…
Depuis la légende n’a jamais cessé de grandir, offrant au « fantôme de l’Opéra » la paix et l’immortalité.Roultabille