Si on connaît son œuvre colossale, ses amitiés avec de nombreux artistes ou son engagement politique dans l’affaire Dreyfus, on connaît peu les deux femmes qui ont le plus compté dans sa vie : Gabrielle Meley, qui devint sa femme, et Jeanne Rozerot qui fut la mère de ses enfants…

Paris, 1864. Emile Zola vit modestement avec sa mère. Il travaille comme pigiste chez Hachette, côtoie des peintres qu’il admire et caresse le rêve de devenir un écrivain reconnu. C’est par l’intermédiaire de Manet qu’il rencontre Gabrielle qui fut l’un des modèles de son Déjeuner sur l’herbe.

Cette jeune femme de basse extraction allait devenir sa muse et des années plus tard, son épouse, contre l’avis de sa mère qui voyait ce mariage comme une mésalliance. Gabrielle fut celle qui lui ouvrit les portes du Paris miséreux qu’il ne connaissait pas et qui lui donnera matière à l’écriture de sa fresque sociale et romanesque des Rougon-Macquart qui fit d’Emile Zola un écrivain reconnu…

Mais c’est une autre, Jeanne Rozerot, qui sera la mère de Denise et de Jacques. Et, si la trahison fut douloureuse et cruelle pour, elle reconnaîtra néanmoins les enfants de son défunt mari qui portèrent le nom de Zola.

Si Emile Zola fut l’un des grands romanciers de son siècle et a marqué de son empreinte l’histoire de la littérature, on découvre avec cet album qu’il aurait pu être un héros de roman… Et si l’album s’avère être une biographie captivante, c’est que les auteurs abordent le grand homme comme s’il était un personnage de fiction. Décrite avec pudeur et retenue, sa rencontre avec Gabrielle s’avère par exemple particulièrement touchante et leur histoire d’amour naissante est retranscrite avec tant de justesse qu’on ressent la force des sentiments qui les poussent l’un vers l’autre.

S’appuyant sur une solide documentation, Méliane Marcaggi signe un récit particulièrement captivant qui nous entraîne dans l’intimité d’un auteur majeur tout en resituant sa vie dans son siècle. Avant d’être un écrivain reconnu, il frayait déjà avec le monde des lettres et des arts et comptait parmi ses amis des peintres qui allaient révolutionner le monde de la peinture et bousculer les hommes de leur temps comme Zola s’apprêtait à le faire avec la littérature. A la fin de sa vie, il s’engagea avec force pour défendre l’honneur du Capitaine Dreyfus, pleinement conscience des funestes conséquences qui allaient en découler. L’épisode est là aussi particulièrement bien retranscrit, montrant comment Gabrielle, bien que se sachant trahie par son mari, allait le soutenir corps et âme pour ce combat politique qui allait être le dernier.

Côté dessin, difficile de ne pas tomber sous le charme du formidable travail réalisé par Alice Chemama. Alors même que la jeune dessinatrice signe son premier album, elle fait montre d’un savoir-faire saisissant, tant dans son découpage particulièrement fluide que dans son dessin élégant sublimé par ses aquarelles qui évoquent les toiles impressionnistes et distillent avec art l’émotion et le ressenti de chacun des protagonistes, leur permettant de s’incarner pleinement.

L’actrice, scénariste et réalisatrice Méliane Marcaggi ajoute une nouvelle corde à son arc en signant un premier album de bande-dessinée d’autant plus réussi qu’il est mis en images par la talentueuse Alice Chemama, jeune dessinatrice dont les aquarelles s’avèrent particulièrement belles et élégantes.

En s’appuyant sur une solide documentation, les autrices nous entraînent avec pudeur et retenue dans l’intimité d’Emile Zola qui n’est pas encore le grand auteur que l’on sait… Et si on connait l’auteur engagé qu’il fut, on connaît moins celles qui furent les femmes de sa vie et contribuèrent à faire de lui l’auteur un écrivain reconnu…

Avec cet étrange trio amoureux, les lecteurs découvriront avec un réel un vif intérêt ces Zola dont chacun pourrait être un héros de roman naturaliste…

- Il y a un problème ?
- Tes baisers et tes caresses tu les as déjà offerts. Je veux autre chose.
- Très bien, qu’est-ce que tu veux de plus ?
- Toi… Je veux tout connaître de toi. Raconte-moi. Dialogue entre Gabrielle et Emile Zola