Reno, Nevada, 1969… La jeune Vicky demande son chemin pour gagner Hunter Lake Drive, un quartier interlope que tous lui recommandent d’éviter… Quelqu’un frappe à sa vitre. C’est Tom, l’un des hommes de mains de sa grand-mère. Il lui offre un flingue pour son anniversaire et l’informe que Granny souhaite la rencontrer.
Devant le pénitencier fédéral, Joe Wolfen attends son frangin, Clyde, libéré pour vice de forme. Le malfrat est animé par deux désirs : manger un steak bien saignant et se venger de sa boss qui l’a fait envoyer à l’ombre… Un petit détail, sa boss, c’est Granny…
Les destins de Vicky & Clyde vont se télescoper… Pas certain que ce soit pour le meilleur…
Après avoir exploré avec le talent qu’on lui connaît de nombreux genres, Dobbs revient au polar et ses ambiances sombres qui marquaient déjà Welcome to Paradise, son tout premier album.
Mais avant même de se lancer dans la lecture de l’album, c’est la couverture, superbe et percutante qui attire l’œil sur les étals de la librairie… Cette silhouette tenant un gun qui se détache d’un fond blanc, des dollars qui s’échappent d’un sac grassement garni, et Reno by night qui apparaît, rappelant que dans les polars, la ville est un personnage à part entière… Afif Khaled fait une nouvelle fois montre de son talent, comme il l’avait fait avec son tout premier album, formidable adaptation du Travail du Furet, chef d’œuvre cyberpunk de Jean-Pierre Andrevon où il faisait déjà montre d’un saisissant sens de la mise en scène et de la narration graphique… Et les premières planches, somptueuses, montre que s’il avait déjà placé la barre haute avec cette première série, il n’a depuis cessé de progresser…
Superbement composées, chacune des planches de l’album est une petite merveille. Son découpage précis et ses cadrages incisifs lorgnent clairement du côté du septième art, alors que le saisissant travail de Josie de Rosa sur les ombres et les lumières est tout juste bluffant, retranscrivant avec une diabolique efficacité l’atmosphère qui baigne chaque scène… Les séquences nocturnes sont de toute beauté et le dessinateur est aussi doué pour retranscrire les ambiances urbaines de Reno que celles de la campagne environnante… Afif Khaled fait montre d’un sens du mouvement peu commun quand il s’agit de mettre en images une scène d’action et de chorégraphier des combats où se déchaînent une violence brute, plaçant sa caméra de façon saisissante pour dynamiser la scène et n’hésitant pas à avoir recours au surréalisme pour accentuer le ressenti, tel qu’il le fait dans l’impressionnante vingt-troisième planche de l’album…
Mais, aussi somptueux soit-il, un excellent dessin ne fait pas forcément un excellent album… Encore faut-il un excellent scénario… Et le fait que Dobbs, fort de l’expérience acquise avec ses près de 30 albums (en 11 ans !), fait montre d’une parfaite maîtrise du genre… Solidement charpenté, il orchestre un récit choral saisissant, mettant en scène deux personnages très différents de par leur implication et leur (fichu) caractère, avec une rencontre qu’on devine d’autant plus explosive que Clyde ne semble pas être du genre à faire dans la dentelle. Il va mettre les pieds dans un sacré ni de crotales et il le sait… Percutants et finement travaillés, dialogues et récitatifs donnent le rythme de ce polar ciselé riche en rebondissements…
Avec Hit the Road, Dobbs signe un polar sombre et nerveux porté par deux personnages qui n’ont à priori rien en commun.
Vicky zone dans les quartiers interlopes de Reno à la recherche d’une clinique d’avortement clandestine. Clyde sort de prison avec la ferme intention de se venger. Leurs destins vont se télescoper de façon fracassante…
Solidement charpenté et porté par des dialogues percutants, le scénario nerveux de l’auteur est d’autant plus efficace qu’il est mis en musique par le trait de l’impressionnant Afif Khaled dont les cadrages ciselés et la mise en couleur somptueuse de Josie de Rosa évoque les films noirs des années 60…
Amateurs de polars bien ficelés, ne passez pas à côté de cette petite pépite !
- C’est quoi le plan ?
- On fait comme on a dit… On ne modifie rien pour le moment. On remonte jusqu’à la vioque pour lui faire cracher le pognon. Le truc, c’est de profiter de l’effet de surprise. Personne ne s’attend à ce que je sois sorti. Le vice de procédure n’a pas encore été annoncé. Cette pute doit payer pour ce qu’elle a fait. Et s’il faut faire le grand nettoyage, on ne va pas se priver.dialogue entre Clyde et son frère