



Ambroise est un jeune homme distant et réservé qui semble fuir les autres avec application. Musicien, il souhaite acquérir sa légitimité et intégrer définitivement l’orchestre dans lequel il effectue un CDD en tant que harpiste.
Bien malgré lui, le jeune homme va attirer l’attention d’une métamorphe qui va user de ses charmes et de sa capacité à changer d’apparence et de visage pour le séduire et en faire son jouet… Inconscient d’être devenu l’objet d’une véritable obsession, Ambroise va croiser la route de Francesca Forabosco, célèbre cantatrice connue pour ses excentricités…
Elle lui propose un étrange marché : lui faire don d’une harpe pour remplacer son instrument d’étude s’il parvient à relever quarante-sept défis, un pour chacune de ses cordes. Au moindre échec, la harpe lu échappera…

Révélé par son superbe et poignant
Ces jours qui disparaissent, Timothé Le Boucher impressionne et fait montre d’une saisissante maturité, tant dans l’écriture ciselée de ses personnages et de ses scénarios qu’avec son somptueux dessin. Ce n’est pas pour rien que le septième art s’est intéressé à son envoûtant
Patient. Pour la première partie de sa nouvelle histoire, l’auteur nous propose un album de près de 400 pages qui se dévore avec fascination…
Avec cet album, l’auteur continue d’explorer des thématiques abordées dans ses précédents albums, du désir à l’obsession en passant par ce qui fait que l’on est ce que l’on est. Mais l’album interroge surtout sur les différents mécanismes entrant en œuvre dans la séduction, à commencer par l’apparence qui conditionne nos rapports sociaux, et sur le fait que nous sommes multiples, changeant subtilement de comportement ou de gestuelle en fonction de nos interlocuteurs ou de notre inclination à aimer ce qui nous semble inaccessible. Et quoi de mieux qu’une métamorphe amoureuse capable de sculpter son apparence à loisir pour venir bouleverser nos repères, nous extraire de notre zone de confort et induire une passionnante réflexion ?
La construction du personnage d’Ambroise s’avère en tous points remarquables. Se dévoilant au fil des pages, son portrait se compose et se recompose alors que des pans de son histoire nous sont révélées, de son éducation exigeante à la rivalité l’opposant à sa sœur en passant par le harcèlement qui a marqué son enfance et explique pour beaucoup son rapport aux autres.

Faite de multiples histoires enchevêtrées, [I)47 cordes s’avèrent en tous point captivant, envoûtant même. Timothé Le Boucher compose une fois encore des dialogues délicieusement authentiques tout à la fois fluides et naturels qui nous fait glisser dans son univers avec une aisance confondante. Au fil des pages et après une étrange fête, on découvre qu’à l’instar des vampires, les métamorphes ont développé une société parallèle, en marge des humains ordinaires, qui suit des codes et des règles qui nous sont étrangères mais qui, dévoilées avec parcimonie, se révèle aussi fascinante qu’inquiétante, révélant une société occulte qui exerce sur nous la même fascination et répulsion que celle des créatures de la nuit.
Si scénarios et personnages ont fait l’objet d’un soin tout particulier, le somptueux dessin de l’auteur rend son récit plus poignant encore. Ses planches s’avèrent magnifiques et l’artiste parvient à saisir et retranscrire la beauté dans chacun de ses personnages dont les postures et la gestuelle ont été soigneusement étudiées. Son trait n’est pas seulement d’une élégance rare mais d’une sensualité confondante. Son découpage est une petite merveille de précision alors qu’il joue avec art de la temporalité, suggérant le temps qui passe de façon intelligente et poétique, tel cette scène où Ambroise et Elisa font l’amour, avec ces cadrages évoquant un plan séquence alors que le temps passe et que les jours s’égrainent.

Timothé Le Boucher est un auteur qui ne cesse de nous impressionner au fil de ses publications tant il fait montre d’une grande maturité et d’un talent graphique saisissant.
Teinté de fantastique, son scénario s’avère tout à la fois audacieux, brillant et passionnant. Dès les premières pages, l’auteur parvient à captiver l’attention du lecteur alors que l’on découvre une étrange prédatrice prête à tout pour qu’un jeune homme solitaire et réservé lui cède corps et âme. Le portrait du jeune homme va se compléter au fil des pages alors que la jeune femme se révèlera rapidement être une métamorphe à même de changer d’apparence à sa guise et jouant avec Ambroise comme un chat le ferait avec une souris pour connaître chacun de ses secrets et parvenir à le faire tomber dans sa toile.
A travers cet album sombrement poétique porté par un dessin élégant et sensuel et un découpage d’une grande précision, l’auteur interroge sur notre rapport aux autres et sur l’apparence qui conditionne nos comportements.
47 Cordes est indéniablement un petit bijou dont il nous tarde de découvrir la fin… D’autant que le cliffhanger laisse augurer de passionnants développement…
Tu finiras bien par m'appartenir, ma jolie proie.la métamorphe