Si son œuvre l’a fait passer à la postérité et que le neuvième art le considère comme l’un de ses maîtres, rare sont ceux qui connaissent la vie d’Edgar P. Jacobs. François Rivière, romancier, scénariste et journaliste qui a signé une passionnante interview du père de Blake et Mortimer dans sa demeure du Bois des Pauvres en 1975, se propose de nous propose une passionnante biographie qui nous entraîne dans l’intimité d’un créateur de génie.
Dès les premières pages, on comprend que le scénariste a fait montre d’un formidable travail documentaire pour tisser ce récit passionnant narrant la vie de cet artiste venu à la BD presque par hasard. Son récit est truffé d’anecdotes drôles ou édifiants qui, mises bout à bout, esquisse le portrait d’un homme jovial et chaleureux, et d’un artiste particulièrement méticuleux qui poussait très loin le soucis du détail. Et le fait que ses planches, subtile dosage de beauté, de réalisme et d’efficacité, impressionnent et hantent durablement le lecteur, de même que sa façon d’ancrer chacun de ses récits dans son temps, rendant chaque aventure de Blake et Mortimer crédibles et envoûtantes. Avec malice, Jacobs donnait à ses personnages l’apparence de ses proches et puisait dans l’actualité l’amorce de ses récits avant de tisser une histoire entraînante basée sur une solide documentation.
Passionné d’art antique, Jacobs se laissera enfermer avec son ami d’enfance, Jacques Van Melkebeke, dans le Musée du Centenaire pour y admirer à loisir les nombreux moulages qui y étaient exposées. C’est d’abord dans l’art lyrique qu’il songera faire carrière avant de travailler sur des décors d’opéra puis pour la publicité. Il dessinera ensuite dans les pages de Bravo, achevant un récit de
Flash Gordon avant de signer le
Rayon U, son premier album. Mais c’est sa rencontre avec certain Georges Remi, plus connu sous le nom de Hergé, qui allait bouleverser le cours de sa vie… Partageant une même vision du métier, Jacobs assistera Hergé sur plusieurs albums avant de donner naissance à Blake & Mortimer dont les aventures seront suivies par des milliers de lecteurs du Journal de Tintin… Le reste appartient à l’histoire du neuvième art…
Mais la force de ce récit précis et détaillé, c’est d’être mis en image par le talentueux, Philippe Wurm, l’un des derniers grands de la ligne claire si chère à Jacobs ou à Hergé. Avec un talent saisissant, le dessinateur épouse avec une telle efficacité le style si caractéristique de Jacobs qu’il semble que le
Cercle des Sentinelles,
les Rochester ou
Lady Elza n’étaient que des jalons posés pour le conduire à cet album dans lequel il rend un hommage appuyé à ce maître du neuvième art…
Francois Rivière et Philippe Wurm rendent un vibrant hommage à l’un des grands maîtres de la BD franco-belge : Edwar P. Jacobs.
Solidement documenté et découpé en chapitres bien calibrés, l’album nous raconte la vie d’un artiste hors norme, de sa passion pour le chant lyrique ou pour les mondes antiques en passant par sa méticulosité et son souci du détail que l’on retrouve dans chacun de ses récits. Au fil des pages de l’album qui se lit comme un roman, les auteurs composent le portrait saisissant d’un homme drôle, généreux et passionné et d’un artiste désireux de satisfaire son public. Sans doute Jacobs aurait-il été amusé de devenir lui-même le héros d’un album.
Edgard P Jacobs - Le Rêveur d'Apocalypses est un album indispensable à tout amateur de Bd en général et des aventures de Blake et Mortimer en partiulier…
- Enchanté monsieur Jacobs. Notre ami Van Melk me dit que vous avez également un joli talent pour l’illustration publicitaire… C’est pourquoi je serais ravi si vous acceptiez de venir à mon atelier afin que nous ayons une conversation sur la technique de la couleur à l’eau. J’ai hâte de profiter de l’expérience d’un maître en la matière.
- Maître ? Oh, il ,ne faut rien exagérer… Mais… C’est très volontiers que je me rendrais chez vous !… Et je serai enchanté d’admirer vos propres travaux, car… euh… à vrai dire, je ne…
- Sacré Edgard !! Je te donnerai l’adresse de l’ami Georges !- dialogue entre Hergé, Jacobs et Van Melkebeke