En cette veillée de Noël, la paix semble revenue dans le petit village irlandais de Killkenny. Avec l’aide des éleveurs, le curé installe une crèche vivante… Jeune agneau, Padraig en est, après le petit Jésus, la pièce maîtresse. Après cette étrange expérience, il va être sujet à d’étranges visions qui vont relancer les crises mystiques dont les ovins semblent coutumiers, sous le regard inquiet et désabusé de Sir Doyle, un sage et vieil hibou insomniaque.
Le curé profite de la messe de Noël pour présenter à la communauté Miss Kelly Penny, venue de Dublin pour remplacer Mister O’Grady, l’ancien instituteur enfin parti à la retraite. Si les hommes regardent médusés cette belle et jeune femme vêtue à la mode de la capitale, les femmes, par réaction, semblent jalouser sa beauté… Mais cette nouvelle venue va surtout faire ressurgir une vieille histoire… Celle d’une jeune femme pleine de charmes et de douceur venue d’un lointain conté et qui avait su gagner le cœur des habitants…
La paix qui règne à Killkenny n’est peut-être que le calme annonciateur de tempête…
Il s’en passe des choses dans ce paisible petit village irlandais de plus de trois-cent âmes ! Et c’est avec plaisir que l’on retrouve ses habitants humains ou animaux dont les petites communautés vont, chacune à leur manière, être quelque peu ébranlées par d’étranges évènements…
Si on ne l’attendait pas dans le registre de la comédie champêtre, force est de reconnaître que Didier Crisse signe avec le Pré derrière l’Eglise une série tendrement rafraîchissante. Il donne vie à un poignée de villageois croquignolesques et attachants et à une petite communauté d’animaux délicieusement crédules, sorte de miroir à peine déformé de notre humanité, interrogant avec humour les croyances et le fait religieux. Les personnages hauts en couleur aux réparties irrésistibles qui peuplent Killkenny ne sont pas sans évoquer ceux né sous la plume de Marcel Pagnol qui portait un regard lucide mais empli de tendresse sur ses personnages… Quant aux nombreux animaux auxquels l’auteur prête des aspirations et des questionnements bien humains, ils rappellent ceux de la Ferme des Animaux d’Orwell. L’audacieuse rencontre de ces univers orwelliens et pagnolesques s’avèrent particulièrement irrésistible…
L’arrivée de Miss Kelly Penny allait bouleverser la quiétude du village. Son comportement iconoclaste et ses allures élégantes vont lui attirer l’inimitée de la gente féminine, d’autant que, faisant fi des convenances, elle a l’outrecuidance d’aller boire des pintes et jouer au fléchettes dans le pub adossé à l’église, lieu de perdition déjà source de bien des conflits… Mais c’est surtout cette vieille histoire dont sa présence va raviver le souvenir qui va bouleverser Killkenny et faire planer sur la bourgade un voile de mystère et une ombre délicieusement menaçante… Une histoire tragique, vieille de plusieurs décennies, dont les villageois ne gardent qu’un souvenir diffus… Et les apparitions du fantôme de la jeune femme décédée ont recommencé avec l’arrivée de Miss Kelly Penny… De là à y voire un lien de cause à effet… Un pas que vont allégrement franchir les commères du cru…
Si l’album s’avère aussi envoûtant et réussi, c’est certes grâce aux formidables talents de conteur du scénariste, à son sens du dialogue et à son goût pour les jeux de mots bon enfant, mais aussi à ceux de Christian Paty qui compose des paysages irlandais saisissants, met en scène une galerie de personnages truculents et expressifs et insuffle une part de notre humanité à une poigné d’animaux irrésistibles. Si ses personnages humains s’avèrent particulièrement bien campés, avec des trognes inimitables et des regards emplis de subtiles nuances, il est difficile de ne pas être impressionnés par la formidable capacité qu’a l’artiste pour animer toutes ces bestioles de façon réaliste, trouvant le point d’équilibre parfait entre le documentaire animalier et la fable burlesque… Le dessinateur semble prendre autant plaisir à croquer ces animaux que nous en avons à les regarder gambader et s’émouvoir… Mais si son trait retranscrit les émotions des différents protagonistes avec une redoutable efficacité, ses couleurs somptueuses subliment sont travail et illuminent chacune de ses planches, toutes composées avec le plus grand soin…
Après un premier tome jubilatoire et bucolique aux accents de Clochemerle irlandais, Didier Crisse et Christian Paty sont de retour pour un nouveau récit joyeusement décalé plein de tendresse et d’émotions…
Alors qu’en cette veillée de Noël la paix semblait revenu dans le petit village de Killkenny, l’arrivée de la jeune et belle Miss Kelly Penny, la nouvelle institutrice, allait mettre en lumière un drame anciens dont les habitants ne gardent qu’un souvenir diffus… De leur côté, les moutons vont à nouveau se laisser gagner par une crise mystique dont ils ont le secret, tandis que l’agneau, ravi de la crèche vivante orchestrée par le curé, prétend entendre des voix…
Si le scénariste s’avère être un talentueux conteur, tissant un récit rafraîchissant mais un brin inquiétant, le dessinateur est loin d’être en reste, signant des planches somptueuses et lumineuses mettant en scène des personnages, humains ou animaux, particulièrement attachants.
Aussi, allez de ce pas flâner dans ce petit pré, derrière l’église, pour observer cette formidable galerie de personnages pétris de défauts mais sur lesquels les auteurs posent un regard plein de tendresse… De quoi échapper, l’espace d’un album, à la morosité ambiante…
- C’est une maudite enchanteresse. Elle se rend au pub et tente de séduire nos maris sans vergogne
- C’est sans doute innocent et peut-être que c’est comme ça que ça se passe dans les grandes villes.
- Et réveiller les fantômes du passé, c’est une coutume citadine aussi ?dialogue entre le curé et les villageoises
|