    Jeune peintre talentueuse et prometteuse, Ro Meadows connaît les affres de la toile blanche… Sur les conseils de son galeriste, elle va se mettre au vert et loue un manoir qui a la réputation d’être hanté, espérant retrouver l’inspiration…
Dans cette vaste demeure, un vinyle sur la platine et un verre de rouge capiteux à la main, elle attend l’inspiration, s’amusant à parler à l’hypothétique fantôme qui logerait en ces murs, ou à elle-même, pour rompre sa solitude… Mais rien ne vient et son galeriste devient pressant et même menaçant… Un jour, n’y tenant plus, elle envoie valdinguer chevalet, toile et peinture demandant au fantôme si elle ne ferait pas mieux de redevenir barista…
Contre toute attente, le fantôme lui répond que non…
Faisant référence au titre d’une nouvelle de HP Lovecraft, le Maître de Providence, Celui que tu aimes dans les Ténèbres est un récit fantastique et envoûtant qui nous entraîne dans un inquiétant manoir pour une délicieuse variation amoureuse…
 Ce roman graphique nous raconte la rencontre d’une artiste en mal d’inspiration et d’un fantôme polymorphe qui évolue, tapi dans les ombres dansantes du manoir… D’abord ébranlée par la révélation de l’existence d’un esprit rôdant dans les murs de la maison qu’elle a choisit pour résidence, elle va peu à peu apprendre à le connaître… Au fil des soirées, des confidences, des gestes attentionnés et des danses lancinantes, tous deux vont peu à peu vont s’apprivoiser, faisant résonner cette nouvelle voix que la jeune artiste était venu trouver en ces lieux isolés… Et, après un réveillon de Noël inoubliable, il leur fallut se rendre à l’évidence… ils étaient tombés amoureux l’un de l’autre… Ah, l’amour, fut-il entre une jeune femme et un fantôme, n’est-ce pas la plus belle des choses qui puisse nous arriver et être source d’inspiration ? Oui… mais il arrive parfois que, derrière le masque Prince Charmant, se cache un pervers narcissique jaloux, possessif et manipulateur qui aura tôt fait de changer l’idylle en enfer…
Le scénario implacable de Skottie Young, bien connu des lecteurs de comics, s’avère d’autant plus efficace qu’il est mis en images par les pinceaux virtuoses de Jorge Corona, talentueux sculpteur d’ombres et de lumière qui suggère plus qu’il ne montre le fantôme.  Faisant la part belle à la contemplation, ses planches s’avèrent tout autant fascinantes qu’immersives et la première partie de l’album s’avère touchante, malgré cette histoire d’amour iconoclaste que sent naître le lecteur… Et puis la venue d’un autre homme dans le domaine du fantôme allait faire tout basculer, précipitant la belle aux Enfers… Le découpage se fait alors plus nerveux et plus incisif et les cadrages, resserrés, plus oppressant, distillant ce sentiment de malaise d’abord diffus et qui ira crescendo jusqu’à l’acmé du récit… La couverture de l’album est quant à elle aussi somptueuse que son titre est énigmatique et intrigant…
Artiste en manque d’inspiration, Ro Meadows s’est exilé loin de son galeriste pour la retrouver. Pour sa villégiature, son choix s’est porté sur un vieux manoir sombre et délabré qui a la fâcheuse réputation d‘être hanté. Et le fait est qu’il l’est, par un étrange et ténébreux fantôme qui va nouer avec l’artiste une étrange et sensuelle relation… Avant que ne tombe les masques…
Le dessin virtuose de Jorge Corona s’avère tout juste parfait pour mettre en scène cette histoire d’amour iconoclaste signée par Skottie Young.
- Haaa ha ha. T’as vu ça le fantôme ? Leçon de vie numéro un : dans l’adversité, toujours piquer une crise de nerfs, comme une gamine. Ça résout tout. Si ça se trouve, il suffirait que je retourne bosser dans un café. A l’époque, j’avais BESOIN de l’exprimer. Je suis devenue une âârtiste pourrie gâtée qui se cherche dans des baraques ridicules au milieu de nulle part. Mais ça ne marche pas. Tu crois que je devrais plier bagage et redevenir barista, le fantôme ?
- Non, je ne crois pas.
- Oh, merdedialogue entre Ro et celui qui l’aimera dans les Ténèbres
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