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La septième fonction du langage
La septième fonction du langage



Fiche descriptive

Policier

Xavier Bétaucourt (d'après le roman de Laurent Binet)

Olivier Perret

Paul Bona

Steinkis

17 Novembre 2022


23€

9782368464144

Chronique
La septième fonction du langage
L’arme de séduction massive

25 février 1980. Roland Barthes est renversé par une camionnette. Et s'il s'agissait d'un assassinat ? Jacques Bayard, commissaire de son état, et Simon Herzog, jeune sémiologue, mènent l'enquête. Une enquête de routine qui se transforme rapidement en polar saisissant.

Roland Barthes possédait en effet la septième fonction du langage, capable de convaincre n'importe qui de faire n'importe quoi dans n'importe quelle situation.

Attisant la convoitise des plus grands intellectuels et hommes politiques, la septième fonction sème les cadavres sur son chemin. Tout le monde est suspect...
un excellent album!


L’arme de séduction massive
La septième fonction du langage, planche de l'album © Steinkis / Perret / Bétaucourt / Bona25 février 1980. Alors qu’il sortait d’un dîner avec François Mitterrand et traversait la Rue des Ecoles, Roland Barthes est fauché par la camionnette d'une entreprise de blanchissage… Le commissaire Jacques Bayard, réactionnaire et fervent giscardien, pense qu’il a été victime d’une tentative d’assassinat et enquête sur l’affaire, espérant pouvoir mouiller François Mitterrand…

Mais le milieu des intellectuels auquel appartenait Barthes est un monde inconnu pour le policier… C’est pourquoi il réquisitionne Simon Herzog, jeune et brillant sémiologue et professeur à l’université de Vincennes, pour mener l’enquête avec lui…

Peu à peu, il apparait que Roland Barthes, initiateur du mouvement post-structuralisme, aurait percé les secrets de la septième fonction du langage, qui lui permettait de convaincre n’importe qui de faire n’importe quoi à la seule force du langage… Ce qui ne manque pas d’attiser les convoitises des plus grands intellectuels et des hommes politiques, alors que se profile la présidentielle…

Leur chemin pour faire éclater la vérité sera long et semé d’embûches et de cadavre et les conduira à côtoyer d’éminents personnages…


La septième fonction du langage, planche de l'album © Steinkis / Perret / Bétaucourt / Bona
Un pastiche irrésistible, romanesque et rocambolesque
Ce polar structuraliste est un OLNI (Objet littéraire non identifié) qui ne ressemble absolument à rien de connu… mais qui n’est pas sans évoquer l’ambiance surréaliste et totalement déjantée qui régnait dans la fascinante fuite du cerveau de l’inénarrable Pierrre-Henri Gomont.

Cette improbable enquête qui nous entraîne fans les milieux intellectuels français du début des années 80e est déjà en soit un concentré d’humour féroce et grinçant avec un auteur qui prend un malin plaisir à mettre en scène des intellectuels en vue, tel l’horripilant BHL, Jean-Edern Hallier, Kristeva, Deleuze, Michel Foucault et autre Sollers, sans oublier Umberto Eco qui semble être le seul à peu près équilibré du lot… et encore… ou les politiques, du très aristocrate président à l’entourage de Mitterrand qui tente d’échafauder un plan de bataille pour la présidentielle à venir… Autant de (libres) penseurs qui se détestent plus ou moins cordialement et de d’éminents politiques que Xavier Bétaucourt carricature (à peine) et égratigne avec une férocité jubilatoire… Les joutes oratoires qui se transforment en véritable duels où le perdant ne perd pas que la face sont absolument fascinantes, de même que les discussions interminables durant lesquelles le jeune Simon Herzog tente d’expliquer les rudiments du langage et de la rhétorique à un commissaire un peu bas de plafond qui va, contre toute attente, assimiler peu à peu les bases de ces concepts qui sont pourtant à mille lieux de ses préoccupations quotidiennes d’ancien d’Algérie.

La septième fonction du langage, planche de l'album © Steinkis / Perret / Bétaucourt / BonaOutre le scénario joyeusement déjanté, l’originalité du récit est de défoncer à coup de masse le cinquième mur et ce de multiples manière… La première : scénariste et dessinateur de la BD, Xavier Bétaucourt et Olivier Perret se mettent eux même en scène et apparaisse dans de nombreuses séquences, s’interrogeant sur la façon de retranscrire graphiquement l’action ou explicitant le propos de tel ou tel protagoniste de l’histoire lorsque le dessinateur ne cherche pas tout simplement à modérer les ardeurs narratives de son scénariste en proposant des coupes franches dans les discours des débateurs… La seconde : au fil des pages, l’un des héros s’interroge sur les étranges évènements dont il est l’acteur et le témoin et leurs enchaînements parfois totalement incohérents le faisant douter de la réalité même et envisager sérieusement de n’être qu’un simple personnage de BD…

J’avoue ne pas connaître le roman de Laurent Binet dont cet album est l’adaptation… Mais le fait est qu’une fois le livre refermé, il est bien difficile de ne pas avoir furieusement envie de s’y plonger pour retrouver ces savoureuses joutes verbales et ces situations hautement improbables et limite surréalistes…

Pour mettre en image ce récit totalement azimuté, Xavier Bétaucourt retrouve Olivier Perret avec qui il avait notamment signé les bouleversants Ils ont tué Léo Franck ou Quelques jours à vivre. Changement de style avec un trait qui se fait plus épuré mais qui n’en déborde pas moins d’une énergie rafraîchissante. Son découpage inventif et dynamique accentue avec force le comique de situation de chaque séquence, contribuant à brouiller les perceptions du lecteur et estomper les frontières entre réalité et fiction avec un plaisir jubilatoire et communicatif…

La septième fonction du langage, planche de l'album © Steinkis / Perret / Bétaucourt / BonaVéritable OLNI, cette Septième fonction du langage est un polar fascinant et déjanté qui nous entraîne dans le microcosme de intellectuel de la France giscardienne alors que se profile l’élection présidentielle de 81…

En ce funeste jour de du 25 février 1980, Roland Barthes se fait renverser par une camionnette… Pour le commissaire Jacques Bayard, ancien d’Algérie, réac invétéré et fervent giscardien, cela ne fait pas un pli : bien qu’il ne soit pas encore mort, il a été assassiné et si l’affaire pouvait éclabousser Mitterrand, ce serait parfait… Pour les besoins de l’enquête, il réquisitionne un sémiologue pour l’éclairer sur les milieux intellectuels dont faisait parti Barthes… L’affaire va prendre des tournants éminemment politiques car le penseur aurait trouvé les secrets de la septième fonction du langage à même de convaincre n’importe quel auditoire de faire n’importe quoi…

Après Ils ont tué Léo Franck et Quelques jours à vivre Xavier Bétaucourt retrouve Olivier Perret pour signer l’adaptation du roman jubilatoire et déjanté mais indéniablement érudit de Laurent Binet qui interroge le lecteur sur les limites entre fiction et réalité en pulvérisant plus d’une fois le cinquième mur… avec en filigrane une question d’importance : qui gagnera la présidentielle de 81 ?


- Le Logos Club ? Et maintenant, je fais quoi ? Si j’étais un personnage de BD, je sonnerais. A l’intérieur, ce serait un cercle de jeu clandestin, je m’assoirais et je défierais le policier ripoux au poker… Mais la vie n’est pas une BD.dialogue entre

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