Né de l’union d’une mère barbare qui rêve de le voir reprendre le flambeau et piller et raser des villages et d’un père érudit qui l’a initié aux idées des lumières, Constantin de Chamberly dénote quelques peu de ses petits camarades…

Un beau jour, il se sent prêt à parcourir le vaste monde pour mettre ses idées philosophiques en pratique. Après bien des rencontres, il croise la route d’Alia, une aventurière qui aspire à des quêtes et de glorieux combats et qui espère pouvoir s’accomplir en accompagnant Constantin dans son périple… Las ! Les discours rhétoriques du barbare rendent caduques tout combats et Alia désespère de combattre un jour ! Surtout que notre barbare se pique de se présenter à l’élection présidentielle contre Mort-Lune qui règne par la peur et la violence gratuite sur Karskyal.

C’est, bien malgré elle qu’Alia va assister Constantin dans son inexorable marche vers le pouvoir, éclairée par les grands penseurs et philosophes qui ont forgé sa conscience politique…

Comme on pouvait s’en douter avec ce titre et cette couverture (référence clairement revendiquée au Barbarian de Frank Frazetta), pour le moins décalée où l’on voit un barbare évoquant comme il se doit Conan (mais qui aurait troqué son imposante et tranchantes épée à deux mains contre un essai philosophique), Karibou, le scénariste, et Arnaud de Viviers, le dessinateur, nous invitent à suivre les aventures d’un improbable barbare philosophe…

Au fil des pages, on découvre un homme instruit et lettré pour qui les idées et le verbe sont bien plus forts que le glaive ou l’épée… Les premières pages nous le montrent tout d’abord en rupture avec l’éducation maternelle qui le rêvait barbare violent et impulsif pillant, trucidant et brûlant sans vergogne… Mais il semble avoir été plus influencé par l’enseignement de son père, un savant lettré, que par celui de cette dernière ! La façon dont il retourne les brigands, monstres et autres créatures tout d’abord désireuses de le trucider, à grand renforts de raisonnements philosophique, s’avère particulièrement jubilatoire… d’autant qu’un brin candide, il ne se rend pas forcément compte des conséquences parfois funestes de son refus de la violence… L’arrivée dans l’histoire d’Alia et de sa quête de combats sanglants, est le prétexte à de savoureuses discussions totalement barrée et follement décalée dans un monde d’heroic-fantasy… La suite est à l’avenant : totalement déjantée… et pourtant, aux détours de cette improbable campagne électorale qui verrait une sorte de Conan se présenter contre Sauron dans une élection démocratique, le scénariste porte un regard lucide et distancié sur la politique en général et sur le peuple en particulier, pointant avec jubilation son manque de constance et de lucidité… Voltaire a eu son Candide, Karibou aura son Constantin de Chamberly .

Organisé en courts séquences d’une page ou deux construites comme des sketchs, l’album se lit avec un plaisir jubilatoire, porté par le duo comique formé par le barbare philosophe et la guerrière vindicative qui souhaite en découdre… On voit d’ailleurs parfois que tout philosophe qu’il est, Constantin peut se montrer intransigeant t impitoyable pour peu qu’il ait affaire à des sociaux-traitres…

Le dessin acéré d’Arnaud De Viviers est juste formidablement efficace pour mettre en images les improbables aventures de cet iconoclaste barbare philosophe aux muscles saillants mais à l’esprit affûté… Il impose dès les premières pages un style très particulier mais néanmoins élégant et joue avec les cadrages faussement fixes pour mettre en scène les savoureux dialogues de l’histoire et animer les personnages fascinants, à la fois fantastiquement archétypaux et délicieusement azimutés.

Avec Constantin de Chamberly - Barbare, esthète et philanthrope, Karibou et Arnaud De Viviers joue avec un plaisir jubilatoire avec les codes de la fantasy pour mettre en scène un improbable barbare érudit, esthète et philosophe désireux de découvrir le vaste monde…

Né d’une mère barbare et d’un père philosophe, Constantin était appelé à un grand destin ! Après avoir arpenté le monde pour confronter ses idées à la réalité du terrain, ce dernier décide de se présenter contre le sinistre Mort-Lune, tyran sanguinaire et cruel qui règne sans partage depuis quelques décennies pour gouverner pour le bien commun en Président sage et éclairé…

Drôle, décalé, érudit et iconoclaste, le scénario de Karibou est porté par le dessin acéré et fascinant d’Arnaud De Viviers dont la seule couverture, faisant référence au Barbarian de Frank Frazetta, est une petite merveille de composition… Bref, un album aussi inattendu qu’enthousiasmant…

- Et maintenant ?
- Maintenant, nous marchons jusqu’à la capitale et sur la route nous prêchons notre programme.
- Raaah ! Je veux juste me battre !
- Oh, ça va arriver, Alia. Je ne pense pas que Mort-Lune voudra valider l’élection si je gagne. Je ne pense même pas qu’il me laissera m’enregistrer comme candidat.
- Ce qu’il veut dire… qu’il va envoyer des assassins ?
- Ou pire, des transfuges de partis politique qu’il a anéantis.
- Les élections ne sont qu’une parodie car personne n’ose se présenter, maintenant. Il est temps de redonner de l’espoir à nos concitoyens.
- Et pour ça, on va se battre !
- Contre le système, oui. De manière cordiale et argumentée.
- Et si ça ne marche pas… on se bat !
- Oui ! Je vous laisse même le choix des armes !
- Vraiment ?
- Bien sûr, soit un sit-in, soit une grève générale.
- Pourquoi je me fais avoir à chaque fois ?
dialogue entre Alia et Constantin