L’Incal, l’entité-artefact la plus puissante de l’univers a disparu… Les cruelles et fanatiques Psycho-nonnes se lancent à sa recherche, n’hésitant pas à pulvériser au passage des mondes pour le retrouver. Mais elles ne sont bien évidemment pas les seuls à convoiter l’objet, sacré à leurs yeux : la Reine Tanatah et l’Empire Berg sont eux aussi partis sur les traces du mythique Incal…

Bien malgré lui, John Difool, Détective de classe R, va se retrouver au cœur du maelström, bientôt rejoint par le puissant Méta-Baron, le plus grand chasseur de prime de l’univers, et Kill-Tête-de-Chien, le célèbre mercenaire…

A l’aube des années 80 paraissait dans les pages du mythique Metal Hurlant les premières pages d’une Aventure de John Difool… Rebaptisé depuis l’Incal, elle amorçait une série mythique et tentaculaire scénarisée par le mystique et inventif Alexandro Jodorowsky et dessiné par le génialissime et regretté Moebius… Pourquoi tentaculaire ? parce qu’après après l’Incal est paru Avant l’Incal, puis Après l’Incal et enfin Final Incal, avant que ne sorte de multiples séries parallèles : La Caste des méta-barons, Méta-Baron, Les Technopères et Megalex… Avant que Kill Tête-de-Chien ne fasse l’objet d’un one-shot jubilatoire… et que ne sorte ce Mental Incal… en attendant Capitain Kaïmann ! Dingue non ? Un récit à la mesure de la créativité débridée d’Alexandro Jodorowsky…

C’est donc l’auteur américain Brandon Thomas qui signe l’entraînant scénario de ce Mental Incal qui s’insère dans la trame alambiquée des canons incaliens entre Suicide allée, dernier tome d’Avant l’Incal et l’Incal Noir, premier tome de l’Incal… Se déroulant entre le vivo-monde et le psycho-monde, le scénario s’avère drôle et inventif, jouant avec les codes de la série pour tisser un récit accrocheur bougrement efficace et totalement déjanté truffé de références aux albums de la série-mère… Le duo formé par Difool, bête à mâcher du foin, et un Deepo, sarcastique à souhait, s’avère absolument jubilatoire alors que les psycho-nones dominant le psycho-monde sont quant à elle vraiment ravagées, n’hésitant pas à détruire de multiples mondes pour retrouver l’Incal… Pour contrecarrer leurs plans, il faudra le retour tonitruant de certains personnages de la série, du plus célèbres des Méta-Barons en passant par Kill Tête-de-Chien que le scénariste met en scène avec un indicible et communicatif plaisir… L’alternance des différents récits impulse un rythme soutenu à l’ensemble et l’humour distillé dans les dialogues ou l’absurdité de certaines situations s’inscrivent dans l’esprit de la série originelle…

Graphiquement, l’auteur canadien Yanick Paquette fait clairement le job. Il s’empare des personnages emblématiques du monde de l’Incal pour les mettre en scène avec une redoutable efficacité, mention particulière à Deepo, bien plus intelligente que ne l’est Difool et dont l’expression désabusé est un régal… Porté par des cadrages incisifs et un découpage très créatif, sa narration s’avère particulièrement fluide alors que ses décors immergent avec force le lecteur au cœur de l’univers foisonnant de l’Incal.

Après Brandon Thomas et son Kill Tête-de-Chien, c’est au tour de Mark Russell de nous entraîner dans l’univers mystique, psychédélique et tentaculaire d’Alexandro Jodorowsky en tissant un récit déjanté et fascinant prenant place entre Avant l’Incal et l’Incal…

Puissante entité-artefact, l’Incal va à nouveau être convoitée par plusieurs factions dont la Reine Tanatah et les fanatiques Psycho-nonnes qui vont quitter le psycho-monde, semant la mort sur leur passage pour retrouver l’objet sacré et vénéré… Bien malgré lui, John Difool va se retrouver au cœur du maëlstrom en compagnie de Deepo, la mouette à béton bien plus lucide et astucieuse que le détective de classe R, ce qui n’est guère difficile il est vrai… Et, pour ne pas rester en reste, le Méta-Baron et Kill-Tête-de-Chien vont s’inviter dans la danse…

Le dessin efficace de Yanick Paquette nous immerge d’emblée dans un jodoverse convaincant où il fait évoluer les personnages emblématiques de la série-mère avec un plaisir communicatif… Ses décors foisonnants esquissent un vivo-monde et un psycho-monde crédibles et envoûtant alors que son découpage parfois hallucinant et halluciné est entièrement au service l’efficacité narrative…

Mental Incal s’avère être un excellent one-shot qui ravira les amateurs de ce chef d’œuvre du neuvième art n prolongeant le plaisir au-delà des multiples séries dérivées de la série-mère…

- J’ai tué pour toi, j’ai désobéi à ma reine. Il n’y a plus de retour possible. J serai ton porteur Incal Lumière. Je serai ton porteur jusqu’à la fin.
- Non, c’est une trop grande responsabilité. Maos tu me orteras à celui qui en est digne.
- Qui peut être digne de mêler un aussi grand pouvoir à son destin ? Qui pourrait être digne de confiance, si je ne le suis pas ?
- Mon cher Berg, la seule personne digne de posséder un tel pouvoir… est quelqu’un de trop stupide pour s’en rendre compte.-
dialogue entre Breg et l’Incal