Fiche descriptive Science-Fiction Talion Tome 3 Sylvain Ferret Sylvain Ferret Sylvain Ferret Glénat 24X32 31 Mai 2023 15€50
9782344054772 Chronique Talion, opus III : Coeur Espoir défunt ? |
Après avoir survécu aux mines d’Orfèvre et s’être échappé des geôles d’Olympe l’Insurgée, Billie et Tadeus ont été traqués par l’Armada du Talion… A bout de force, ils vont pénétrer dans un havre de paix, étrangement préservé de la décrépitude du monde, chose qu’aucun étranger n’avait fait depuis des décennies… Au cœur de cet oasis, ils reprennent espoir en découvrant cette société démocratique qui vit en autarcie depuis des lustres… Mais la violence et l’envie peuvent venir corrompre l’âme humaine et faire vaciller sa fragile lumière pour laisser place aux ténèbres… Dessinateur des étranges et envoûtantes Métamorphoses 1858 (sur un scénario d’Alexie Durand), Sylvain Ferret signe avec Talion un récit en solo exigeant, dense et délicieusement alambiqué… Alambiqué car il nous entraîne dans un univers riche et foisonnant, inquiétante projection de ce que pourrait être le nôtre, quand l’homme aura achevé de corrompre et de détruire son environnement, laissant la Vermine le dévorer peu à peu jusqu’à le détruire… A travers cet univers néo-gothique sombre et désespéré aux accents cyberpunk, l’auteur aborde de façon radicale le grand effondrement annoncé par les collapsologues et étayé par le dérèglement climatique et les catastrophes naturelles qui bouleversent le quotidien de millions d’individus… sans que les gouvernements ne semblent prendre la mesure de ce qui s’annonce… un récit néo-gothique de sciences-fictions poétique et exigeant Car le problème d’approvisionnement et de production énergétique dans lequel s’englue l’homme masque un souci plus grand encore : l’eau, indispensable à la vie et dont les manques se font déjà cruellement sentir, annonciatrice de bien des drames et des guerres à venir. Mais l’écologie, qui devrait être au centre des politiques publiques, n’est pas le seul aspect de notre société dont s’empare le scénariste : dans ce monde revenu aux temps médiévaux où la force était le maître étalon des relations sociales, Sylvain Ferret aborde le problème de la masculinité toxique qui a un impact délétère sur nos sociétés et dont tout un chacun doit prendre conscience pour que les choses puissent changer…Porté par deux personnages écrits et composés avec soin, le récit nous raconte le monde de demain. L’auteur a pris le temps de les installer, de les décrire, de montrer comment leur relation va se construire, au fil des péripéties auxquelles ils vont se confronter et des épreuves qu’ils vont devoir affronter… Mais, s’ils servent de fil rouge à ce récit postapocalyptique, l’auteur met en scène une formidable galerie de personnage à la psychologie complexe et nuancée qui viennent enrichir l’univers et densifier le propos. Point de numérotation de page, un récit aussi implacable que radical et des dialogues et des textes distillant une sombre poésie traduisant les tourments des différents protagonistes d’où germera un fragile espoir… Tels sont les ingrédients de ce récit fascinant et si exigeant que la relecture des deux premiers tomes s’avère indispensable pour comprendre la façon dont les différents fils narratifs se mêlent et s’entremêlent pour former un tout aussi singulier que cohérent. un dessin expressionniste parfaitement maîtrisé La couverture de l’album est une fois encore sublime et puissamment évocatrice de l’ambiance distillé par l’histoire… S’opposant à la première couverture, froide et glaçante, comme à la seconde, particulièrement inquiétante, la couverture du troisième tome vient distiller une note d’espoir presque revigorant dans cet univers sombrement désespéré… On retrouve le saisissant sens du découpage du dessinateur qui utilise avec force un vocabulaire très cinématographique dans ses cadrages qui viennent appuyer l’action et souligner l’ambiance oppressante de façon particulièrement bluffante… Le travail sur les décors et sur le character design, de l’apparence des personnages à leurs vêtements ou à leur équipement, rien ne semble avoir été laissé au hasard, donnant l’impression que l’auteur a créé un univers à part entière, dense et cohérent comme peut l’être celui d’un jeu vidéo ou d’un jeu de rôle… Et il y a cette mise en couleur radicale qui vient sublimer ses planches, souligner avec art les émotions et le ressenti des différents protagonistes de l’histoire tout en participant à l’immersion dans cet univers ravagé, terne et tragiquement morbide… On sent dans ce troisième tome, plus encore que dans les précédents, l’influence japonaise sur le travail de Sylvain Ferret que l’on entrevoie dans la culture de cette miro-société qui va accueillir en son sein les deux fugitifs ou dans certaines scènes plus contemplatives…Avec ce troisième opus, Sylvain Ferret referme sa trilogie de science-fiction aux accents néo-gothique sombrement poétique qui pointe avec pertinence et lucidité les travers de nos sociétés contemporaines, de la pollution à l’exploitation déraisonnées des ressources naturelles qui gangrènent notre terre et conduisent l’humanité à sa perte… Récit dense, riche, complexe et terriblement exigeant, Talion est porté par un dessin fascinant de plus en plus inspiré de la culture japonaise, une mise en couleur à l’expressionnisme radical, une narration graphique très cinématographique et des personnages tout sauf manichéens à la psychologie travaillée avec soin qui rende son récit particulièrement poignant. Pour la première série dont il assure dessin et scénario, Sylvain Ferret fait montre d’une grande maîtrise… On le savait dessinateur virtuose depuis qu’il avait mis en image Les Métamorphoses 1858 d’Alexie Durand, on le découvre scénariste lucide et engagé concerné par les problématiques de son époque… Au vu des qualités de cette trilogie menée de main de maître, nous attendons avec impatience sa prochaine création… Il ne me restait rien de l’espoir Fornhaye. Rien de la douleur du deuil. Rien de ma colère. Rien de ma haine. Les profondeurs d’Orfèvre ne nous offraient que l’obscurité et une eau noire et imbuvable. Mon corps me lâchait et, passé deux jours sans boire, je m’éffondrai. Je voulais que tout s’arrête.
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