Ca y est… Après une campagne qu’on imagine aussi disputée qu’harassante, Charles Charles accède, enfin, aux responsabilités en tant que Président des Etats-Unis de la République (sic)… Mais Président est un métier qui exige des compétences et de l’investissement… Difficile de juger de ses compétences puisqu’il s’applique à ne rien faire avec une assiduité confondante… Car s’il est probable qu’il fut un bon candidat, il n’a guère le sens des responsabilités…
Ses ministres et ses plus proches conseillers sont consternés par son attitude désinvolte alors que ses sorties à l’emporte-pièce provoquent bien (trop) souvent un emballement médiatique bien compréhensible… Mais maintenant qu’il est là, il va bien falloir s’occuper…
Ce présent album est la réédition d’un ouvrage publié en 2013, soit trois année avant l’élection de Donald à la magistrature suprême des Etats-Unis… Et on peine à y croire tant l’incompétence criante de Charles Charles et sa moumoute bien trop jaune pour être honnête évoque celles de Trump, son incompétence, ses sorties tonitruantes, sa mauvaise foi proverbiale et son attitude désinvolte avec ses pairs ne faisant que renforcer l’analogie… Soit Marc Dubuisson est un visionnaire, soit il a inventé la machine à remonter le temps, soit il a juste eu un hallucinant coup de bol… Quoi qu’il en soit, l’album s’avère toujours aussi percutant que lors de sa sortie. Plus même peut-être en fait, en l’an III après Trump.
Le format même de l’album change puisqu’il est désormais carré, le découpage en strip permettant ce changement… Car l’album s’organise en strip qui mit bout à bout forment un chapitre délicieusement cohérent et indéniablement jubilatoire… L’occasion d’aborder de nombreux sujets, du sacre en passant par les réceptions en grandes pompes (ou plutôt en espadrilles) de chefs d’état plus ou moins encombrants qu’il faut caresser dans les sens du poil (ou qu’il faudrait, parce que dans les faits, comment dire…), la gestion de crise, l’augmentations des impôts, les coups médiatiques plus ou moins réussis, les valises de billets, le sexisme latent, les grèves, sans oublier la vie de famille… Le tout fait avec une bonne dose de lucidité, un humour aussi mordant qu’irrésistible à grand renfort de dialogues souvent surréalistes et de citation à l’emporte-pièce…
Dessinateur au trait (très) minimaliste (cf ses autres albums), le scénariste a fait appel à l’inénarrable James pour mettre en image ces tranches de vie présidentielles aussi hallucinantes qu’hallucinées… L’auteur d’ Open Space ou de la Vérité nue met en scène ces personnages anthropomorphiques qui sont un peu sa marque de fabrique… Rehaussé par la colorisation de Patrice Larcenet, son trait tire aussi l’épure mais n’en reste pas moins follement expressif, soulignant l’incompétence du président avec une savoureuse et jubilatoire efficacité…
Dix ans après sa publication, le Charles Charles, Profession Président de Marc Dubuisson et James n’a pas pris une ride… Mieux, après l’élection de Trump, auquel le personnage principal emprunte sa chevelure, sa désinvolture, son incompétence et sa mauvaise foi, il n’en est que plus percutant encore !
A travers de courts chapitres, les auteurs explorent différents pans de la vie politique en mettant en scène un président doué pour la conquête du pouvoir mais ne prenant aucunement la mesure des responsabilités qui sont désormais siennes… L’œuvre est tout à la fois lucide, visionnaire, déjantée et aussi et surtout follement irrésistible grâce à un dessin anthropomorphique expressif, des dialogues savoureux et un sens du rythme confondant…
Cette réédition au format carré est l’une des perles drolatiques de cette rentrée littéraire… L’occasion de la découvrir ou de la redécouvrir !
- Il faudrait faire un résumé en tenant compte du fait du…
- Euh, vous pourriez arrêter de me faire du pied, svp ?
- Voyons, Charlotte, détendez-vous…
- Vous pourriez être MON PERE !
- Quoi ? Qui t’a dit ça ? Ta mère ?. Qui est-ce ? C’est de l’argent que tu veux ?
- C’était une métaphore…
- Haha : Oui ! Bien sûr ! Je l’savais !dialogue entre le Président et sa stagiaire
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