Né le 11 mai 1952 dans le 15e arrondissement, Renaud Pierre Manuel Séchan a eu une enfance heureuse… Fils d’un écrivain professeur qui lui a donné le goût de l’écriture et d’une mère ouvrière puis secrétaire qui lui transmirent des valeurs humanistes de gauche, Renaud a développé très tôt une conscience politique…
Après les évènements de 68 auquel il participa activement, il voulut devenir acteur mais, presque par hasard, devint chanteur avant d’entamer la carrière que l’on sait et de devenir cet artiste dont les chansons ont rythmé la vie de plusieurs générations…
Je ne sais pas pour vous mais de mon côté, Renaud a accompagné ma jeunesse et qui, s’inscrivant dans la lignée d’un Brassens que j’adorais déjà, a composé des chansons joyeusement barrées ou profondément touchantes… Son
Mistral Gagnant m’a fait comprendre mino qu’on pouvait avoir la nostalgie de l’enfance, ses
en Cloque et son
Morgane de Toi et me sont revenues lorsque je fus en âge d’être papa et je ne peux toujours pas écouter
Mort les Enfant ou
P'tite conne sans avoir le cœur en chrysanthème...
Après avoir demandé au chanteur qu’ils admirent l’autorisation d’écrire sa biographie dessinée, Bertrand Dicate et Alain Gaston Rémy, Renaud leur a répondu qu’il ne voulait rien relire et ne censurerait rien… mais qu’il leur donnait bien sûr son autorisation… Pouvait-il en être autrement pour un chanteur qui avait été du mouvement de mai 68 où il était interdit d’interdire ?
Avec tendresse, les auteurs nous parlent de l’enfance de ce gamin qui a eu très tôt une conscience politique ancrée très à gauche, de ses premiers pas sur la scène du côté de la gare, aux côtés notamment de Patrick Dewaere, Miou-Miou ou Coluche, ses premiers disques, ses premiers succès, ses fréquentations plus ou moins douteuses, le succès qu’il se prend de plein fouet, ses histoires d’amours, ses enfants, ce public fidèle qui était toujours au rendez-vous…
Sans oublier ses faces sombres, celle de Mister Renard, qui sont abordées sans fard, ses déprimes et ses crises d’angoisses et de paranoïa aiguës, alors qu’il pensait que le KGB et Cuba cherchaient à le descendre et son alcoolisme l’abrutissait et le détruisait peu à peu, mais qui était le seul à pouvoir apaiser ses insupportables tourments… Et si je connaissais les grandes lignes de la vie de ce chanteur qui a accompagné ma jeunesse et contribué à aiguiser ma consciences politique, j’ignorais tout ce ces crises de paranoïa qui l’ont poussé à s’abandonner à l’alcool…
Découpés en chapitre très pertinent, la biographie de Renaud est entrecoupée de détours par la fan zone où les auteurs reviennent sur les raisons qui les ont entraînés à devenir fan du chanteur, pour ses textes drôles, généreux et impertinents, de la façon dont ses chansons ont balisé leur vie, de leurs rencontres avec leur idole à la peine qui fut la leur de le savoir si mal… Tout cela, conjugué à un dessin imparfait mais chargé en émotions, rend l’album particulièrement touchant, tout en nous donnant furieusement envie de réécouter la discographie d’un artiste sensible qui n’a cessé, avec mordant et sensibilité, de pointer les dérives de nos sociétés…
Avec cet album, Bertrand Dicate et Alain Gaston Rémy nous invitent à balayer la vie tumultueuse d’un gamin du XVe arrondissement devenu un chanteur populaire dont les chansons déjantées, lucides ou intimistes ont balisé la vie de génération de fans…
Avec un trait imparfait mais d’une grande sensibilité et au fil des chapitres qui se referment sur des pages de « fan zone » où les auteurs nous raconte leur rapport avec ce monument de la chanson française, de leur enfance à nos jours, l’album esquisse un portrait saisissant de cet artiste généreux, sans faire l’impasse sur ses zones d’ombres, ses déprimes et ses crises d’angoisse et de paranoïa que seul l’alcool semblait pouvoir endigué…
Renaud, né sous le signe de l'Hexagone est un album particulièrement touchant, qui nous raconte l’histoire d’un type qui a composé sans forcément le savoir la bande son de notre petite vie… Une fois l’album refermé, difficile de ne pas être pris d’une furieuse envie de se replonger dans sa discographie… Personnellement, je vais commencer par Mistral Gagnant, son septième album studio ?