Japon médiévale, hivers 1590. Une jeune vagabonde prénommée Hitomi parcours sans repos et sans répit les routes et les sentiers de l’archipel pour retrouver le samouraï à la peau couleur betterave qui a massacré sa famille avec la ferme intention de lui arracher l’âme du corps…

Tombé dans une rivière gelée au cours d’un combat contre un samouraï qu’elle avait humilié en lui volant son saké, la jeune femme est sauvée par un homme d’âge mûr qui se produit dans des combats de foire itinérants… Ce dernier n’est autre que Yasuke, l’esclave devenu le seul samouraï noir de l’histoire du Japon et qui servit le daimyo Oda Nobunaga jusqu’à la mort de ce dernier… et qui n’est autre que le guerrier qui a massacré la famille d’Hitomi… Mais Yakuse n’est plus que l’ombre de lui-même… Taisant son passé, elle le convainc de la prendre comme élève et de lui enseigner l’art du combat.

Bientôt, maître et disciple sont engagés pour traquer un loup qui décime les troupeaux d’un berger. Au fil de leur périple, un lien étrange va se nouer entre l’ancien samouraï et la jeune fille assoiffée de vengeance…

Si peu de sources historiques évoquent Yasuke, il est un personnage populaire au Japon depuis qu’un ouvrage destiné aux enfants, le Kuro-suke de Kurusu Yoshio, s’est attaché à raconter sa singulière histoire… Mais cert ancien esclave doué pour les langues et le combat, devenu le seul samouraï noir de l’histoire, est depuis quelques temps sous les feux de la rampe, que ce soit en bande dessinée, avec notamment la remarquable série Kurusan, le samuraï noir de Thierry Gloris (dessin de Emiliano Zarcone) ou la série en six épisode de LeSean Thomas produite et diffusée par Netflix et qui est (très) librement inspirée de la vie de Yakuse…

Et si la vie de Yakuse est peu documentée, ce qu’il est devenu après la chute de son daimyo l’est plus encore : on l’ignore purement et simplement. A travers cette fiction fascinante, H.S. Tak se propose de combler ce vide en imaginant la vie de ce personnage au destin pour le moins singulier après qu’il eut été épargné par Akechi Mitsuhide qui le jugeait indigne de finir comme un samouraï… Son récit nous entraîne dans l’odyssée vengeresse d’une jeune fille qui a vu sa famille périr de la main même de Yakuse… La relation étrange qui se tisse entre ces deux personnages que tout semble opposer est indéniablement l’une des grandes forces de cet album. Le scénariste dépeint avec malice le portrait d’un Yakuse déchu et désabusé qui refuse de porter le sabre et semble avoir renoncé tant à son honneur qu’à sa dignité, bin qu’il semble avoir, à sa façon, atteint une certaine forme d’abnégation et de sagesse… Par contraste, Hitomi, qui a grandi comme une herbe folle, s’est construite seule et forgé une force de caractère peu commune, apparait comme implacable et dénuée de sentiments et d’émotions…

L’autre force de ce récit est indéniablement le dessin envoûtant d’Isabella Mazzanti. L’illustratrice du somptueux Carmilla de Sheridan Le Fanu nous livres des compositions de toute beauté. Changeant radicalement de style, son travail, rehaussé des subtiles et somptueuses couleurs de Valentina Napolitano, évoque ceux d’Hokusai, de Sharaku et plus encore de Kunisada. L’artiste italienne compose pour cet album des décors saisissants et retranscrit avec une rare efficacité les caractères de chacun des deux principaux protagonistes qui vont chacun subtilement évoluer au fil de leurs péripéties alors qu’ils apprennent à se connaître… Oscillant entre passé et présent, avec de magnifiques incursions oniriques très dans l’esprit japonais, les planches de Isabella Mazzanti s’appuient sur le remarquable découpage de Nicoletta Bea qui, fort de son travail dans l’animation, nous livre des compositions aussi fluides qu’efficaces…

H.S. Tak et Isabella Mazzanti se proposent de nous raconter la vie de Yakuse, le Samouraï noir, après la mort de son daimyo, Oda Nobunaga… Peu documentée, le singulier destin de cet esclave devenu samouraï nous est conté à travers les yeux d’une gamine sauvage et indomptable désirant le tuer…

Hitomo arpente l’archipel du Japon à la recherche du samouraï à la peau couleur betterave qui a fait d’elle une orpheline… Lorsqu’elle croise enfin sa route, ce dernier n’est plus que l’ombre de lui-même et semble avoir renoncé à son honneur et à sa dignité en se produisant dans de pathétiques combats de foire pour gagner sa vie… Elle le convainc de faire d’elle son élève et de lui enseigner l’art du combat, sans avoir renoncé pour autant à sa vengeance…

S’appuyant sur le découpage de Nicoletta Bea et les subtiles couleurs de Valentina Napolitano, le dessin Isabella Mazzanti s’inspire des maîtres des estampes japonaise pour donner vie à ces personnages que tout semble opposer et qui vont néanmoins nouer des liens singuliers et bouleversants… Oscillant entre passé et avenir, à la fois poétique et violent, le scénario de H.S Tak s’avère particulièrement entraînant alors que la fin, aussi belle qu’inattendue, clôture un album parfaitement maîtrisé…

- Je veux devenir samouraï. Et je pense que tu peux m’apprendre. Depuis quand n’as-tu pas manié le sabre ?
- Je ne suis pas plus professeur que tu n’es disciple. Je n’ai rien à t’enseigner.
- Ce n’est pas dans cette arène que tu t’enrichiras. Avec moi, tu peux au moins gagner cette épée. Tout ce que tu as à faire, c’est m’aider à tuer le loup.dialogue entre Hitomi et Yakuse