Une pluie de météorite s’est écrasée sur le permafrost, libérant dans l’atmosphère des bactéries qui ont rendu l’air irrespirable. Depuis, l’Etat gère la distribution de l’air, ce qui lui assure un contrôle de la population.

Mais un mystérieux groupe de terroriste sabote systématiquement les vaisseaux chargés de décontaminer l’air. Membre du Comité Central, Troy Denen est chargé d’infiltrer le réseau pour éliminer Shanice, la chef du groupe et qui plus est responsable de la mort de sa femme et de son fils lors d’une prise d’otage.

Mais, alors que les médias officiels annoncent l’assassinat du Régent par les terroristes, les certitudes de Troy Denen vont être ébranlées avec d’autant plus de forces qu’ils trouvent dans l’épave d’un sous-marin échoué les preuves de la forfaiture du gouvernement… Lorsqu’il apprend l’existence d’un fils, il n’hésite pas à rejoindre Urban Yeigier, fraîchement nommé Régent, pour lui proposer la localisation de la base rebelle en échange de la vie de son fils…

Septembre est décidemment le mois Philippe Pelaez avec pas moins de quatre sorties : les seconds tomes de Ceux qui n’existent plus et des Noirs Horizons, le premier tome de De bruit et de fureur et… la conclusion d’Air, superbement mis en scène par Francis Porcel… Comment trouve-t-il le temps de signer des scénarios si captivants explorant des genres et des registres si différents ? Le mystère Philippe Pelaez reste entier…

Le premier opus a planté avec force le décor de ce récit d’anticipation rétrofuturiste : un univers post-apocalyptique où l’air est si vicié qu’il est impossible de vivre à l’extérieur sans oxygène et qu’un état totalitaire est en charge de distribuer les rations d’air à la population tout en feignant de tenter de trouver une solution à la contamination de l’air… A l’instar de son Noir Horizon, le scénariste interroge un régime totalitaire et les mensonges qui lui sont nécessaire pour se maintenir au pouvoir en manipulant le peuple… Mais ce récit s’avère bien moins pessimiste que le space-opera somptueusement mis en image par Benjamin Blasco-Martinez : dans Air, la rébellion est à l’œuvre pour dénoncer les mensonges de l’Etat et le mettre à bas…

Mené comme un récit d’aventure porté par des personnages élégants et attachants, tels les frangins qui passent leur temps à se vanner, l’intrépide Shanice qui semble être tombé amoureux du traitre, Troy Denen qui va prendre conscience de la manipulation de masse orchestrée par le gouvernement ou ce major qui semble tomber des nues lorsqu’il en prend conscience à son tour… Sans oublier leur Némésis, Urban Yeigier, dont l’attitude et l’apparence s’avère des plus glaçantes… Si le scénario s’avère aussi captivant que nerveux et entraînant, on pourra néanmoins s’étonner de la facilité avec laquelle Troy Denen va se laisser convaincre par les propos de Shanice… Doutait-il déjà de la nature du pouvoir qu’il servait ? Qu’importe, la mécanique scénaristique fonctionne impeccablement d’autant que ce subit revirement était sans doute nécessaire pour emmener le twist qui confère tout son seul au final…

Difficile de ne pas être impressionné par le talent de Francis Porcel dont le dessin sobre mais d’une rare élégance esquisse avec force les contours de ce monde rétro-futuriste et totalitaire… Les architectures massives évoquent le glaçant Metropolis de Fritz Lang tandis que les costumes et l’apparence de Yeigier évoque le régime nazi qui a si bien su utiliser les mensonges et la propagande pour assoir son pouvoir. On appréciera son travail sur les véhicules et leur aspects délicieusement uchroniques qui renforcent sa cohérence à l’univers… La narration graphique de l’artiste espagnol est d’une rare fluidité alors que ses couleurs et son formidable travail sur la lumière contribuent à poser l’ambiance de chaque scène avec une impressionnante virtuosité….

Dans les gouffres amers, titre pour aussi énigmatique que poétique, referme ce dytique qui, sous des aspects retro-futuriste, interroge sur les régimes totalitaires utilisant la peur pour manipuler les masses et conserver le pouvoir…

La disparition du permafrost suite à une pluie de météorite a libéré dans l’atmosphère des microorganismes qui ont rendu l’air irrespirable. L’Etat rationne les réserves d’oxygène et fait tout pour que perdure le statuquo. Envoyé infiltrer un dangereux groupe terroriste responsable de la destruction de vaisseau destinés à purifier l’air, Troy Denen va tomber de haut lorsqu’il prendra conscience d’avoir été manipulé depuis des années… S’alliant aux rebelles, il va s’efforcer de trouver les preuves de la forfaiture d’Urban Yeigier pour mettre à bas son gouvernement despotique…

Le dessin élégant de Francis Porcel impressionne par son élégance, sa fluidité, le dynamisme de ses compositions et la mise en scène de personnages aussi joliment écrits que savamment retranscrits. L’artiste espagnol joue avec art avec la lumière pour nimber chaque séquence d’une atmosphère propre qui vient soutenir l’action comme le ferait la musique d’un film… Ne connaissant pas de temps mort, le scénario entraînant de Philippe Pelaez s’avère aventureux à souhait et le final est à la hauteur du récit, même si on aurait aimé séjourner quelques temps encore dans ce monde dystopique pour voir ce qu’il en deviendra après les évènements qui nous ont été contés…

- C’est Urban Yeigier qui m’a proposé de prendre le visage du terroriste qu tout l monde recherchait, de fuir et d’infiltrer votre réseau. J’y ai vu là une formidable opportunité.
- Une simple vengeance…
- C’est le plus puissant des moteurs, celui qui nous apprend à être patient pour mieux savourer. Mon seul regret est de causer autant de peine au Régent. C’est un homme bon, et il doit être dans tous ses états en ce moment…
- C’est pour cela que je venais vous voir, Troy… Le Régent est mort, assassiné. Urban Yeigier a pris sa place.- dialogue entre Troy Denen et Shanice