     Après son édifiant Femnists in Progress revient avec Mecs in Progress, un album indispensable pour comprendre ce qui se joue dans la déconstruction du patriarcat et le rôle que peuvent y jouer les hommes.
Car si vous n’avez pas vécu en ermite ces dix dernières années et qu’il vous arrive de surfer quelques fois sur les réseaux sociaux, sans doute vous êtes-vous rendu compte que les femmes défendant des positions résolument féministes se prennent bien souvent une volée de bois vert ou les commentaires d’hommes expliquant que tous les hommes ne sont pas des violeurs, des agresseurs sexuels, des violents, des assassins (rayez les mentions inutiles et rajoutez ce qui fait défaut dans cette liste bien évidemment non exhaustive)… Or le #NotAllMen qui accompagne souvent ces propos qui ont pour unique but réfuter la généralisation n’a au mieux aucun intérêt et, au pire, s’empare de la parole au détriment des principales intéressées..
Clamer cette évidence, c’est passer sur le fait que tous les hommes sont potentiellement cela, au vu de la société patriarcale, de l’éducation reçue et qui exigeait d’eux de se comporter en homme viril et sûr de lui et du fait que, qu’on le veuille ou non, la majorité des actes de violences, sexuelles ou non, sont commis par des hommes. C’est un fait indéniable et solidement documenté… Mais si une partie des mecs le fait en connaissance de cause, d’autres le font sans se rendre compte de l’énormité de leur propos…
Porté par un humour appréciable et un délicieux décalage, cet album de Lauraine Meyer aide le lecteur à enfiler les lunettes féministes pour l’aider à conscientiser ce qu’est être un homme dans nos sociétés, de comprendre les biais cognitifs empruntés par ces derniers pour se dédouaner du comportement de ses coreligionnaire ou de rigoler aux blagues salaces et éminemment sexistes sans comprendre que ce faisant ils continuent à colporter un comportement inadmissible. Si vous faites partie de ces hommes qui perçoivent confusément le problème mais peinent à le comprendre en profondeur, faute de pouvoir seul prendre du recul, ce Mecs in Progress est clairement fait pour vous… Il pose les bases du problème et donne indéniablement matière à réflexion, expliquant notamment qu’un homme partageant les idées féministes de ses consœurs n’a pas à parler en leur nom et substituer sa parole à la leur, mais être un allié dans LEUR combat… Mais il montre aussi comment qu’un (salutaire) travail sur soi permettra de changer la société dans son ensemble vers une meilleure acceptation de l’autre et de ses différences… Car les luttes féministes rejoignent les luttes contre toutes formes de discriminations et tentent de donner corps tant au concept de liberté et de fraternité que d’égalité… Un vaste et beau programme !
 Le dessin minimaliste de l’autrice met en scène trois amis qui vont échanger autour du féminisme pour emmener, par un questionnement judicieux, les deux hommes à prendre conscience du fait que le rôle que leur assigne la société est sources de souffrances, d’injustices et d’inégalités…
Au cours de trois chapitres tout aussi drôles que didactiques, Lauraine Meyer aborde la construction des masculinités, la mise en place de la société masculine et la nécessaire reconstruction des masculinités. Elle pose ainsi le problème de la masculinité de façon bougrement efficace, esquissant des questionnements judicieux et donnant au lecteur des pistes de réflexions pour comprendre que si l’homme est à la source des problèmes de violence, de sexisme ou de harcèlement, il peut, en travaillant sur lui et en comprenant conscience qu’il est le pur produit d’une société profondément patriarcale, évoluer et devenir un allié de poids des luttes féministes…
Mecs in progress est indubitablement un album à lire, à réfléchir et à faire lire au plus grand nombre…
Il n’y a pas de conditions à remplir pour être un homme. Ça ne dépend, ni de la circonférence de vos biceps, ni de votre capacité à dominer les autres. Ni même de ce que vous avez entre les jambes.le Pigon
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