★★★★☆ En immersion
En Flash, planche du tome 2 © Delcourt / Sanchez / OzPour les habitants des Fours, la vétusté et le délabrement de leur immeuble, les halls squattés par des trafiquants, l’insécurité grandissante sont devenus insupportable… Cela fait longtemps qu’ils ont perdu toute illusion sur élus pour changer leur quotidien. Sous l’impulsion de Madame Diarra les habitant du bloc décident de tenir réunion dans le hall de leur immeuble, pour parasiter les trafics qui s’y tiennent…

Cette courageuse initiative attire l’attention de l’ambitieuse première adjointe qui brigue le fauteuil de maire mais attire sur Madame Diarra les foudres de Modi, étudiant en sciences politique dont les trafics sont perturbés par son action citoyenne…


découvrir l’envers du décor
Avec En Flash, Oz, alias Patrick Wong (co-scénariste de l’excellentissime série de medieval-fantasy anthropomorphe les 5 Terres)) nous entraîne dans une plongée en immersion dans un quartier oublié de la République, comme il en existe des dizaines dans l’hexagone…

En Flash, planche du tome 2 © Delcourt / Sanchez / OzA travers un récit choral parfaitement orchestré, le scénariste montre toute la richesse et la complexité de ces cités trop longtemps délaissées par les pouvoirs publics. Animant une galerie foisonnante de personnages, Oz dépeint le quotidien d’une poignée d’habitants dont chacun représente l’une des facettes de ce microcosme régit par ses propres règles… Pages après pages, il en compose un portrait subtil, lucide et acéré, bien plus nuancés qu’il n’y parait de prime abord… Entre les habitants désirant juste vivre normalement, ceux qui se contentent de subir, ceux qui prennent des risques pour faire changer les choses, ceux qui rêve de percer dans la musique, ceux qui trafiquent et veulent faire régner leurs propres lois, ceux qui vivotent avec des petits boulots mal payés et mal considérés à qui on rappelle sans cesse d’où ils viennent en passant par les gamins dont l’horizon semble limité aux frontières de leur cité… Le cocktail semble explosif, sans compter sur le jeu trouble des politiques qui semblent ne s’intéresser aux banlieues qu’en période électorale…

Les dialogues acérés et percutants écorcheront un temps les oreilles des lecteurs peu au fait des codes des cités. Mais ils retranscrivent avec justesse la tension qui y règne… ou semble y régner… et contribue à poser chacun des personnages, leur apportant cette touche de crédibilité et d’authenticité qui rend le récit si immersif.

Après avoir fait ses premières armes dans le jeu vidéo, Bastien Sanchez, fait montre d’une impressionnante maîtrise pour sa première série. Variant les angles et les cadrages, la composition de ses planches s’avère dynamique et sa narration graphique particulièrement fluide. Taillés à la serpe, les visages des différents protagonistes sont particulièrement expressifs, accentuant la dramaturgie de chaque scène de façon saisissante.

En Flash, planche du tome 2 © Delcourt / Sanchez / OzAprès un premier tome parfaitement maîtrisé, Oz, scénariste aux mille et un nom de plume, et Bastien Sanchez, jeune dessinateur impressionnant de maîtrise, nous entraînent dans le quotidien d’une banlieue délaissée par les pouvoirs public, comme il en existe des dizaines, disséminées sur tout le territoire. Loin des clichés pernicieusement distillés par CNews ou BFM, les auteurs portent un regard lucide et acéré sur le quotidien d’un quartier dit sensible, donnant au lecteur les clefs et les codes qui lui manquent pour déchirer le voile des apparences et de la violence…

Porté par des personnages crédibles, authentiques et nuancés et des dialogues cinglants, les auteurs esquissent le portrait des habitants d’une cité alors que s’engage la bataille des municipales entre le maire sortant et son ambitieuse adjointe…

En Flash s’enrichit d’un nouvel album aussi percutant et édifiant que l’était le premier…


- Ok, viens, je te montre un truc. Regarde ça… S’il y a bien un moment où les flics sont chauds, c’est pendant les élections. On va se faire défoncer. Mec, fais pas comme tes frères, y’a un moment pour tout. Prends du recul. T’es le patron des fours, on a un bon système de blanchiment.
- On ne peut pas compenser avec les autres points de ventes… on est trop petits.
- Et toi trop pressé. Tu peux rien faire de mieux alors arrête de stresser.
dialogue page 74

Chronique by Le Korrigan