Port-Aube. Imbibé d’alcool, Orvann est l’objet de moquerie de la part des autres clients de la taverne. Mais même dans cet état, il a la répartie cinglante et les poings durs comme le roc. Mais à un contre trois, il a tôt fait de se faire jeter de l’établissement. Cela ne l’empêche pas de passer chez Jalmur, son fournisseur de tord-boyau, avant d’aller rejoindre le phare où il travaille comme gardien…

Avait-il cette nuit-là trop forcé sur la bouteille pour noyer son chagrin et ses souvenirs ? Le fait est qu’il ne se réveilla pas pour faire son office et trois navires se fracassèrent sur les récifs acérés, entraînant par le fond équipage, passagers et cargaison… Conscient de sa faute, il se laisse arrêter et jeter dans une cellule crasseuse de la garnison de la cité, attendant son juste châtiment… Mais l’un des prisonniers, maître es poisons, lui fait comprendre qu’il a été drogué : quelqu’un ne voulait pas qu’il se réveille et souhaitait que ces navires s’éventrent sur les côtes… Sa culpabilité enfuie, il n’est désormais animé que par un seul désir : traquer et tuer celui qui a terni son honneur de pirate… Mais pour cela, il fallait déjà sortir de sa geôle…

Seul à la barre pour ce second opus, Sylvain Cordurié tisse le récit de la vengeance d’un homme qui n’a plus rien à perdre et qui attendait la mort presque comme une délivrance…

Le héros de l’histoire n’est qu’une épave échouée dans un port. Il a renoncé à sa vie aventureuse faite de rapines et de combats pour devenir un gardien de phare, à jamais écartelé entre terre et mer. On devine en lui une blessure ancienne qu’il cherche à noyer dans l’alcool, de ces piquettes qu’on servait à bord des bateaux de la Confrérie avant qu’on ne comprenne compte qu’elle empoisonnait les pirates à petit feu… Mais tout soiffard qu’il soit, Orvann n’est pas du genre à servir de bouc émissaire à qui que ce soit… Et ceux qui ont osé le faire tomber dans ce traquenard qui vont le comprendre à leurs dépens… Ça va défourailler grave, d’autant qu’on n’a pas passé sa vie à tuer et à trucider ses semblables sans qu’il en reste des traces… de belles grosses traces sanguinolentes… Mais il ignore alors l’ampleur de la machination et ses ramifications éminemment politiques, alors que l’Empire et la Confrérie sont en guerre larvée depuis des lustres pour la domination des océans…

Le scénario de Sylvain Cordurié est rythmé et entraînant et rien ne laissait augurer de la fin apocalyptique de l’album qui laisse entrevoir que les relations entre l’Empire et la Confrérie vont s’envenimer dans un avenir proche…

Et si le scénario s’avère solidement charpenté, le dessin n’est pas en reste, loin s’en faut… Une fois encore, on se demande comment Stéphane Créty parvient à sortir des albums de cette qualité à ce rythme effréné… Difficile de ne pas être impressionné par la pertinence et l’impact indéniable de ses compositions. Le dessinateur nous offre des visuels vertigineux, tels ceux de Port-Aube ou de Sogur, alias Crève-Nuages, qui mêlent avec brio plusieurs influences, et des scènes de combats pleine de fureur et de sang qui contribuent grandement à l’immersion du lecteur dans l’histoire. La colorisation soignée de Nanjan pose avec art les différentes ambiances de cette histoire de trahison et de vengeance…

Après un premier tome convainquant qui jetant les bases d’un univers enthousiasmant mêlant fantasy et piraterie, La Confrérie des Tempête est de retour avec un nouvel opus. On retrouve à la barre le talentueux Sylvain Cordurié accompagné par son second, le virtuose Stéphane Créty…

Comme tous les soirs, Orvann traîne dans les tavernes interlopes de Port-Aube pour épancher sa soif, ne refusant jamais de remettre à sa place ceux qui lui cherchait des noises et n’hésitant pas à faire le coup de poing, sans jamais songer aux conséquences. Mais ce soir, il ne se réveilla pas pour veiller sur le feu du phare dont il était le gardien et trois navires de la Confrérie viennent se fracasser sur les rochers, entraînant par le fond hommes et cargaison… Conscient de sa faute, Orvann attends son châtiment… Mais lorsqu’il comprend qu’il a été drogué et a servi de bouc émissaire, il est ferment décidé à se venger de ceux qui ont salit son honneur d’ancien pirate…

Le récit monte en puissance alors qu’Orvann se rapproche des commanditaires du drame dont il fut, bien malgré lui, l’acteur, pour s’achever sur un final apocalyptique. Trahison, complots politiques, lutte de pouvoirs et magie ancienne seront à l’œuvre dans cet opus superbement mis en image par Stéphane Créty qui nous offre de somptueux visuels et des scènes de combats pleines de fureur et de sang… La Confrérie des Tempêtes est décidemment une série-concept des plus prometteuses !

On l’avait dont drogué. On voulait qu’il pousse une ronflette, voire qu’il clamse. Si la migraine est toujours présente, les remords se faisaient la malle. Qui pouvait souhaiter sa mort ? Surtout en s’y prenant de la sorte ? A la réflexion, ce n’était pas un coup de sang. Y’avait du calcul là-dedans. Un truc à tiroir, avec l’intention planquée au fond, entre deux couches de merde et une pincée de poudre aux yeux. L’idée qu’il n’était pas responsable de ce naufrage le soulageait, mais il devait en avoir le cœur net. Une visite s’imposait.le narrateur