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Entretien avec Martin Vidberg
accordé aux SdI en mars 2007


Devenir enseignant, étais-ce un rêve de gosse? Comment est née votre vocation?
Je n’irai pas jusque dire que c’était de l’ordre du rêve mais effectivement, depuis la fin du collège j’avais l’envie de devenir instituteur. Comme pour beaucoup d’enseignant, c’est sans doute lié à ma propre scolarité et à l’envie de retrouver un univers que j’avais particulièrement aimé avant mes 10 ans. La vocation est née plus tard, je crois même que j’ai vraiment compris ce qu’était ce métier et donc son intérêt à l’IUFM.

Enfant, quel lecteur étiez-vous? Quels étaient alors vos auteurs favoris et quels sont aujourd’hui vos auteur de chevet?
Je lisais très peu de bande dessinée. J’adorais Tintin, j’aimais la légèreté des Picsou Magazine auxquels j’étais abonné et je ne connaissais pas grand-chose d’autre.
Aujourd’hui, je m’intéresse un peu un tout et je n’ai pas vraiment d’auteur de chevet. Je suis surtout admiratif des auteurs qui parviennent à se rénover comme Trondheim ou Frédéric Peeters dans un genre très différent.


©Delcourt / Martin Vidberg


Rarement un instit a su parler si justement de son métier, de tous ces petits moments rares et précieux, tristes ou gais, angoissant ou réjouissant, de cette remise en question perpétuelle, de la recherche de pistes et de projets pour aider tel ou tel élève à surmonter ses difficultés… Qu’est ce qui vous a donné l’envie de coucher sur papier et qui plus est en BD une année de votre vie d’enseignant, ses doutes, ses grands moment de solitude, ses petits bonheur ses grandes joies?
Plus qu’une envie il s’agissait d’un besoin. Cela faisait un bon moment que je voulais aborder le thème de l’école, j’avais tant de choses à dire sur ce sujet que je ne pouvais pas garder tout cela pour moi-même. D’autres auraient utilisé l’écriture ou l’engagement syndical pour exprimer tout cela, pour moi c’est la bande dessinée.

De l’ébauche du projet à sa publication chez Delcourt, en passant par sa publication en ligne, quelles furent les différentes étapes de la genèse de cette BD? Quelle place a occupé Internet dans cette édition papier?
Presque tout est passé par Internet puisque la bande dessinée a été diffusée entièrement sur mon site. L’éditeur l’a trouvé sur le net, nous avons élaboré la version papier par mail et je n’ai finalement pas eu besoin de quitter mon bureau avant le festival d’Angoulême qui a eu lieu un mois après la sortie. Mais Internet a surtout été utile au niveau de la motivation durant la réalisation du récit. Je ne pense pas que j’aurais été au bout de mon projet si je n’avais pas eu les retours quotidiens des lecteurs.

Quand on connaît le difficile chemin entre l’élaboration d’un projet et l’édition d’un album pour un auteur débutant, ça a dû être une bonne surprise que d’être démarché par un éditeur aussi prestigieux que Delcourt!
Je ne connais pas grand-chose, en réalité, du difficile chemin des auteurs débutants mais effectivement, j’ai été très surpris de recevoir un mail de Lewis Trondheim pour Delcourt. Forcément, au début, j’ai vérifié qu’il ne s’agissait pas d’une imposture !
C’est à présent, je crois, que je commence la partie difficile « du chemin » d’auteur de BD. Maintenant que j’ai signé un album, j’ai envie de poursuivre l’aventure.

Le ton faussement naïf que vous utilisez vous permet de porter un regard juste sur les réalités du terrain, méconnues du grand public car occultées par les médias et les politiques. Le but de votre démarche était il clairement didactique?
En dessinant cet album, je souhaitais surtout partager une expérience et un regard sur l’enseignement. Le ton est volontairement naïf mais je n’avais pas forcément de démarche orientée ou didactique. Par extension, je n’ai surtout pas voulu écrire une bande dessinée militante.


©Delcourt / Martin Vidberg


De la situation vécue au découpage en passant par le rough et le dessin proprement dit, quelles sont les différentes étapes de l’élaboration de cet album?
J’ai gardé un tout petit agenda pendant l’année scolaire sur lequel je marquais de manière laconique et sans analyser les évènements de chaque journée. Bien plus tard, au moment de réaliser les planches, le scénario venait assez rapidement un peu comme si les choses avaient mûri d’elles-mêmes. Malheureusement les choses ne sont pas toujours aussi faciles et j’ai bien plus de difficultés sur mes scénarios actuels. En ce qui concerne le dessin, il n’y a pas grand-chose à raconter. Je dessine tout au crayon et j’encre à la table lumineuse par transparence.

De nombreux auteurs aiment à travailler en musique… Dans quel environnement sonore t’atèles tu à la planche à dessin?
C’est très variable. De manière générale j’écoute peu de musique en dehors de la voiture, j’ai tendance à fatiguer très vite. Je préfère la radio ou les talk shows télévisés. C’est peut-être aussi parce que je suis instit et que j’ai besoin de laisser reposer mes oreilles en rentrant chez moi smiley

Vous soulignez avec subtilité le fait que l’enseignant est parfois seul dans sa pratique quotidienne. Quelles ont été les réactions de vos collègues et de votre hiérarchie et éventuellement de parents d’élèves suite à la publication en ligne tout d’abord et en librairie ensuite?
Pour le moment, j’ai eu très peu de réaction de mes collègues les plus proches et des parents d’élèves. Mon inspecteur a lu et défendu l’album et j’ai reçu pas mal de mails forts sympathiques de collègues que je ne connaissais pas. Aucune réaction négative sur le fond.

Après ce premier album fort réussi, avez-vous d’autres projets sur les rails?
Beaucoup au scénario et deux petits projets au dessin. Mais il paraît qu’il ne faut pas trop en parler avant de les avoir concrétisé!

Y a-t-il une question que je n’ai pas posé et à laquelle tu souhaiterais néanmoins répondre?
C’est rigolo comme question, on me la pose presque systématiquement ! Mais non, je n’ai pas de scoop ni de choses passionnantes à raconter, là, comme ça smiley
Je me demande si les autres auteurs trouvent des choses à ajouter…

Pour finir et afin de mieux vous connaître, un petit portrait chinois à la sauce imaginaire…
Une créature mythologique : Le Minotaure
Un personnage de cinéma : Personne (interprété par Terence Hill)
Un personnage biblique : Dieu
Un personnage de roman : Le petit prince
Un personnage de BD : Donald
Un personnage de théâtre : François Pignon
Une œuvre humaine : L’obélisque
Une recette culinaire : La patate à l’eau

Un dernier mot pour la postérité?
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