Il y a bien longtemps que les cheveux roux de Charlotte ne lui posent plus de soucis. Mais la naissance de son fils, roux lui aussi, et les blagues limites de ses amis et de sa famille font ressurgir des souvenirs bien enfouis et vont pousser l’autrice à s’interroger sur sa singularité…

Elle convoque la science pour expliquer l’origine des cheveux roux et nous entraîne dans un voyage dans le temps pour montrer comment la rousseur a été perçue à travers le temps afin de mieux comprendre l’ostracisme dont ils sont victimes aujourd’hui… et mieux s’en affranchir !

Charlotte Mevel nous entraîne dans un ouvrage passionnant qui analyse, non sans une certaine subjectivité par ailleurs particulièrement touchante, le regard que porte notre société sur la rousseur… La lecture de l’album fait remonter des remarques cruelles entendues dans la cour d’école et les moqueries dont pouvaient être victimes les garçons et les filles qui avaient eu le « malheur » de naître roux… Certes, les enfants sont cruels et, comme bien des adultes, ont peur de la différence et rejettent ceux qui ne leur sont pas semblables… Mais de tels discours n’existeraient sans doute pas si leurs parents ne portaient pas sur les roux de tels propos…

L’ouvrage revient avec pertinence sur la façon dont l’humanité a perçu les hommes et les femmes aux cheveux roux… Un voyage dans le temps édifiant qui revient notamment sur ces femmes rousses considérées comme des sorcières au moyen-âge ou sur cet édit de Louis IX qui obligeait les prostituées à se teindre en roux pour que les femmes de petites vertus puissent être clairement identifiables. Depuis l’aube de l’humanité, les roux semblent avoir été rejetés, discriminés ou détestés… Mais alors pourquoi artistes et cinéastes reconnus et admirés les ont-ils tant représentés, souvent pour mettre en scène la beauté incarnée ? Inexplicable paradoxe qui point à lui seul l’incohérence de ces préjugés d’un autre temps… qui ont pourtant la vie dure !

Le trait épuré de l’autrice s’avère on ne peut plus efficace et certaines de ses planches, plus élaborées, s’avère graphiquement somptueuses. Textes et images se répondent et s’enrichissent mutuellement pour servir avec un humour très second degrés le propos de Charlotte Mevel.

La Rousseur... pointée du doigt est un album salutaire qui revient avec un humour lucide et percutant sur les origines de l’ostracisme dont les personnes à la chevelure flamboyante ont souvent eu à souffrir depuis leur plus tendre enfance...

Avec un dessin aussi épuré qu’efficace, Charlotte Mevel revient sur la façon dont étaient considéré les roux à travers les âges ou dans les arts après s’être attardée sur les fondement scientifiques de la rousseur…

Edifiant et passionnant…

Qu’on ne vienne pas me dire que je manque d’autodérision. L’autodérision c’est quand on fait rire les autres en se moquant de soi-même, non ? Là ça frôle l’insulte. Sans forcément le vouloir, le farceur se positionne comme supérieur ou dominant par rapport à celui qui est l’objet de sa plaisanterie. Les cadeaux, passe encore. Mais les blagues, ça me dépasse.Charlotte

(*) extrait du poème de Baudelaire : à une mendiante rousse