Triptyque discret de la collection Semic Books, « Midnight Nation » est une histoire simple, mettant en scène un inspecteur de police catapulté dans un monde où les règles ne sont plus les siennes et où il devra se redécouvrir et contempler les maux du monde…avec rien moins que son âme pour enjeu, et pour seule compagnie une guide qui semble être autre chose qu’un petit brin de femme. Le postulat des mailles du filet de la réalité et de l’oubli auquel sont réduits ceux qui en tombent n’est pas sans rappeler le « Neverwhere » de Neil Gaiman.
Bien sûr, malgré la qualité de la plume de Michael Straczynski (Babylon 5, c’est lui
) et celle de la patte de Gary Frank (dessinateur estampillé « glamour comics ») la trame reste maigre pour trois volumes ; heureusement, son traitement « road-movie » original est l’occasion de quelques rencontres et scènes à la symbolique brillante…quoique vraiment trop judéo-chrétienne pour être moderne. Malgré ces quelques défauts tout sauf marginaux, on se laisse emporter sur les traces de nos deux marcheurs avec plaisir et soif de comprendre.
Les dialogues sont en général bien envoyés, entre le cynique et le tragique, conférant à « Midnight Nation » une âme particulière, que viennent renforcer les décors hantés que les protagonistes traversent. Là encore, les auteurs auraient pu faire beaucoup mieux, et de ce côté de l’Atlantique, on aurait pu apprécier que la carte de ce monde ne se limite pas aux Etats-Unis mais débordent sur des lieux plus inventifs, plus saugrenus, moins « new-yorkais ». J’imagine que la logique mercantile aura fini de brider l’imagination des auteurs.
Pour autant, n’allez pas croire que je n’ai pas aimé, puisque j’ai vraiment adoré la qualité de l’écriture -au dessus du niveau habituel des comics- et que j’ai pris grand plaisir à parcourir les planches de Gary Frank, malgré leur dépouillement. La conclusion reste ordinaire, l’explication un peu fragile et naïve, mais la balade vaut le coup.