La véritable histoire du soldat inconnu est un album inclassable qui porte les germes de l’œuvre de ce maître du noir et blanc qu’est Jacques Tardi. On y retrouve le surréalisme d’Ici même, les thèmes qui seront développés dans la série Adèle Blansec, ses démons orientaux en passant par les dinosaures, les machines extraordinaires, les femmes aux formes plantureuses et les savants fous, et aussi, et surtout, cette fascination mêlée de dégoût que l’auteur éprouve pour la der des ders, sommet de la bêtise humaine.

Si comme l’écrivit Boris Vian « A l’heure de mourir un homme revit son passé », il est envisageable qu’un auteur, fut-il écrivaillon, se trouve rattrapé par son œuvre et ses chimères. Au cours de rencontres interlopes des méchants de ses romans… rencontres hautes en couleurs (mais ne noir et blanc), surréalistes, violentes, sensuelles et sans queue ni tête mais qui servent pourtant à l’édification d’un message fort et pour le moins provocateur sur l’absurdité d’une guerre et des monuments qu’on peut lui ériger…

Un ouvrage dérangeant, annonciateur de l’œuvre à venir et pour lequel Tardi montrait déjà une grande maîtrise graphique…