Si les albums traitant de la Grande Guerre sont légions, rares sont ceux qui s'intéressent aux héros méconnus que sont les médecins, les infirmières et les brancardiers qui, sous des feux parfois croisés, risquaient leur vie pour sauver celle des autres. Adapté par les auteurs de leur roman éponyme, l'Ambulance 13 leur rend hommage à travers un récit prenant mettant en valeur l'humanité au cœur des ténèbres, et ce dans un cadre historique précis et remarquablement reconstitué.

Louis-Charles Bouteloup est fraîchement diplômé de la Faculté de Médecine lorsqu'il se retrouve en première ligne, à Fleury, en décembre 1915. Jugé et mis à pied pour avoir « pactisé » avec l'ennemi. En vérité, il n'a fait que négocier un cesser le feu pour que les deux camps puisse chercher leurs blessés. Parmi eux le fils du Président Faure qui clame haut et fort qu'il aurait préférer mourir avec des hommes plutôt que de devoir sa survie à une infamante trahison. L'affaire se politise, le père de Louis-Charles, le colonel-baron Bouteloup étant lui même député et craint pour sa carrière. L'avenir semble bien sombre pour Louis-Charles Bouteloup... Mais un ange veille sur lui en la personne de Soeur Isabelle...

De nombreux éléments appartenant au décorum et au contexte de l'époque crédibilise le récit. Car si le personnage principal et la trame de l'album sont pure fiction, le contexte historique des événements ont fait l'objet d'un soin tout particulier. Les flashback rondement menés permettent de le préciser tout en éclairant la personnalité du médecin en nous révélant une part de son enfance. Le décentrage de l'histoire sur Emilie ou sur la famille Bouteloup permettent de s'éloigner du front et de préciser le contexte de la guerre de façon élégante et convaincante. Les dialogues sont finement ciselés, du français soutenu des officiers en passant par le vocabulaire fleuri et le parlé-vrai de l'homme de troupe, étoffant le caractère propre à chacun des personnages de façon saisissante.

Le dessin d'Alain Mounier et les couleurs de Sébastien Bouët apportent beaucoup à ce récit par leur trait réaliste et leur couleurs subtiles. Il va sans dire que la mise en image de l'histoire de Cothias et Ordas a fait l'objet de recherches iconographiques minutieuses tant le soucis du détail, de l'équipement aux uniformes en passant par les décors, semble poussé à son paroxysme.

Rien n'est laissé au hasard dans ce récit remarquablement bien construit qui ravira tant les férus d'Histoires que les amateurs d'histoires humanistes bien ficelée. La dernière page indique que le premier cycle se clos... On ne peut espérer que de nombreux autres cycles viennent compléter ce tableau de ce pan historique de la der des ders méconnu du grand public.