Ce troisième opus d’Hertz nous entraîne dans le passé, pour suivre l’histoire d’un de ses aïeuls, André Hertz, qui vécut au XIXième siècle. L’occasion pour Didier Convard de concocter une intrigue policière passionnante mettant en scène des frères de loges appartenant à des nations qui se sont déchirées des années durant. La fraternité les unissant, au-delà des clivages politiques, s’avère particulièrement édifiant et contribue à baigner cet album d’une ambiance toute particulière.

Nous sommes en 1999. Alors qu’il se décide enfin à mettre de l’ordre dans des documents familiaux, Martin Hertz tombe sur les journaux intimes de son ancêtre qui fut maçon, lui aussi. Sa lecture, passionnante, va l’emmener à s’intéresser à des évènements se déroulant entre 1812 et 1840, entre la France et l’Angleterre, autour de la loge des Captifs de Babylone née dans l’adversité du camp de prisonnier de Norman Cross où croupissent des milliers de soldats français de la Grande Armée. Sept d’entre eux devaient s’évader pour porter en France les Feux de leur loge avec la complicité d’un frère maçon britannique. Las! Ils tombèrent dans un piège et l’évasion tourna au carnage. Près d’un quart de siècle plus tard, les corps des officiers français évadés sont retrouvés dans une grotte sur une plage de la côte britannique.
André Hertz est dépêché pour rapatrier les corps et enquêter sur les circonstances de leur mort par François Pierre Guillaume Guizot, membre du gouvernement et maçon. Gagnant les côtes anglaises, il ignore qu’il aura fort à faire pour démêler l’écheveau des tragiques évènements s’étant déroulé autour de cette évasion, et ce d’autant plus qu’on semble s’acharner à faire disparaître les preuves concernant ces événements. Un mystérieux meurtrier œuvrant selon la symbolique maçonnique s’acharne à faire disparaître un à un les indices qui permettrais d’élucider cette tragique affaire.
Entre fraternité et trahison, le scénario concocté par Didier Convard s’avère prenant et captivant. L’intrigue, alambiquée et passionnante n’est que la première mettant en scène André Hertz que l’on surnommait l’Ombre de l’Aigle, titre du prochain album de la série Hertz… Ce personnage, porté par des valeurs humanistes, s’avère un intéressant sujet, prétexte à explorer l’épopée napoléonienne qui fut le premier âge d’or de la franc-maçonnerie…

Le dessin réaliste marqué par des lignes épurées et un encrage épais porte plutôt bien cette intrigue historique écartelée entre trois époque et ce malgré des visages quelque peu crispés. La couverture dynamique d’André Juillard est une nouvelle fois très élégante. On y devine en filigrane que la vengeance occupera dans l’intrigue de l’album une place de choix…

Au fil des tomes et des séries, le Triangle Secret poursuit son œuvre, étoffant l’univers de complot et de guerres secrètes sur fond de franc-maçonnerie. L’ensemble forme un tout remarquablement cohérent dont la complexité pourra rebuter certains lecteurs. A ceux-là, on ne peut que conseiller de s’accrocher, le jeu en valant largement la chandelle…