


Chaque nouvel album de Marc Vedrine est l’occasion de découvrir une nouvelle facette de son talent. Depuis
Phenomenum, il a signé des œuvres personnelles, explorant l’Islande avec
Islandia un récit envoûtant tissé entre plusieurs époques, les sentiments amoureux avec
Attrape-moi ou la saga nordique avec
La Saga des Brumes, voilà qu’il s’empare d’un personnage historique, l’un des plus controversé sans doute du XXième siècle, un personnage autant détesté qu’admiré et que de nombreux présidents des Etats-Unis ont tenté, sans succès, de faire chuter.

Mu par une ambition démesurée, John Edgar Hoover est prêt à tout pour que son F.B.I, anciennement Bureau of Investigation (B.O.I.), soit doté des moyens nécessaires pour assoir son pouvoir. Ce second tome nous apprend comment Hoover va avec des effectifs restreints, des agents sans expérience et sans port d’armes réussir à poser les bases de qui deviendra l’une des plus puissantes organisations de police judiciaire et de renseignement intérieur du monde occidental.
L’enlèvement très médiatisé du fils de Charles Lindbergh, qui sera plus tard qualifié de « Crime du Siècle», pourrait bien être le fait qui mettra le F.B.I. sous les feux de la rampe médiatiques. Prête à tout pour devancer une police fédérale jalouse de ses prérogatives, Hoover n’hésite pas à recourir à des écoutes illégales pour tenter de retrouver le fils du héros. D’autant plus qu’il doit marquer les esprits avant que Roosevelt, qui lui est hostile, n’entre à la Maison Blanche…

Le scénario de Marc Vedrine est formidablement bien documenté et remarquablement bien construit. Son récit déroule l’histoire des premières heures du Bureau tout en développant la personnalité complexe et tourmentée de Hoover qui forgea le F.B.I. à son image. Sans prendre parti, le scénariste et dessinateur esquisse un portrait tout en nuance de cet homme qui se fit l’égal de Dieu, aux dires de John Fitzgerald Kennedy, et qui survécu à pas moins de huit présidents pourtant bien décidés à s’en débarrasser.
Il aborde des sujets controversés tels que son homosexualité supposée, alors qu’il défendait des idées homophobe, n’hésitant pas à user de ce prétexte pour discréditer des adversaires politiques. Pétri de contradiction, défenseur de la morale mais hanté par ses démons intérieurs, exigeant de ses hommes d’être irréprochables mais ne supportant pas qu’ils puissent leur faire de l’ombre, le personnage historique avait de son vivant tout du héros de roman.

Le dessin semi-réaliste de Marc Vedrine immerge le lecteur dans cet entre-deux guerre qui vit l’ascension de J. Edgar Hoover, renforcé par une colorisation impeccable. La couverture est une fois encore fort bien construite alors que le titre,
Promotion Gangster est une délicieuse trouvaille…
Considéré par beaucoup comme un visionnaire, par les autres comme un manipulateur autoritaire doublé d’un maître chanteur, le personnage ambigu n’en finit plus de fasciner, quarante ans après sa mort et cette biographie graphique est tout à la fois passionnante et édifiante… On attend avec impatience le troisième opus qui reviendra notamment sur les relations on ne peut plus complexes et tendues entre Hoover, J.F.K. et la mafia…