Les lecteurs de BD se divisent en deux catégories : ceux qui lisent des mangas et ceux qui les regarde d’un œil condescendant.
Cesare fait partie de ces séries à même de réconcilier tout le monde, pour la qualité historique et scénaristique de son scénario et la beauté du dessin qui immerge avec aisance le lecteur dans la renaissance italienne.
Lorsque s’ouvre ce huitième opus, Angelo se remet peu à peu du coup de poignard qu’il a reçu en s’interposant entre Cesare Borgia et son assassin. A l’annonce de la chute de Grenade qui marque l’achèvement de la
Reconquista, la chrétienté est en liesse. Cesare se rend à Florence sur l’invitation de Lorenzo de Medicis pour y célébrer cet événement, en compagnie de l’archevêque de Pise qui doit trouver un terrain d’entente avec les Médicis pour défendre la Toscane contre les menaces grandissantes...
Ce huitième tome de cette série fleuve est encore et toujours passionnant. Pour les amateurs d’histoire, cette fresque apparaît comme la clef de voûte qui assemble des connaissances éparses des lecteurs glanées au fil des études ou des lectures. Lorenzo le Magnifique, les Borgia, Savonarole, toutes ces pièces historiques s’assemblent pour former un tout cohérent, captivant et passionnant. Fuyumi Soryo ne fait pas que maîtriser son sujet, il le met en scène et en image de façon saisissante, porté par un sens de la narration redoutablement efficace. C’est avec maestria qu’il mêle et entremêle petite et grande histoire, habillant les zones d’ombres de façon crédible et cohérente, prenant le temps de développer ses personnages tout en livrant une vision réaliste de l’Italie de la renaissance. En se centrant sur le personnage de Lorenzo de Médicis, dit le Magnifique, il place son récit aux débuts de l’année 1492 qui fut un moment charnière pour la chrétienté. Il revient sur l’épisode tragique de la Conjuration des Pazzi qui faillit mettre fin à la dynastie des Médicis, sur les funestes conséquences pour les juifs de la chute du royaume de Grenade et sur les derniers jours de ce mécène et prince éclairé de la Renaissance.
Au fil des tomes, l’intrigue gagne en densité et en ampleur. Aux intrigues de l’université succèdent des intrigues éminemment politiques qui mettent en branle les grandes puissances et figures de l’époque. Alors que Lorenzo de Médicis, pilier de la péninsule, vacille, le pape s’apprête à rendre son dernier soupir et le roi de France rêve d’agrandir plus encore son royaume alors que l’Espagne, redevenue chrétienne, pourrait bien menacer sa puissance. Le fragile équilibre politique de l’Italie semble menacé et une redistribution des cartes semble inéluctable…
Ce huitième tome de Cesare s’inscrit dans la lignée des précédents, tissant une fresque historique saisissante aussi captivante et instructive que réaliste… Un pur chef d’œuvre à même de réconcilier tout un chacun avec les mangas…