L’auteur de jeu taïwanais Kuraki Mura nous invite à nous lancer dans l’élevage de cochons… Ne vous laissez pas abuser par les délicieuses illustrations de Biboun, car, malgré ses dessins enfantins et des cochons à la minecraft,
Happy Pig est un jeu de gestion et de planification subtil et malin…
Règles et matériel
Difficile de ne pas être attiré par l’irrésistible illustration de couverture où l’on voit un fermier aux poches débordantes de billets verts courir après un mignon petit porcelet… Biboun a une fois encore fait un formidable travail d’illustration, donnant d’emblée une identité forte au jeu…
Le matériel contenu dans la boîte comblera d’aise les dépunchers compulsifs tant il y a des marqueurs et des tuiles en tous genre… Les cartes saisons sont superbement illustrées, dans une veine humoristique et rafraîchissante…
On pourra regretter l’absence de thermoformage (voir, soyons fou, de thermoformage amovible pour sortir les récipients contenant les tuiles)… mais les p’tits gars de chez Iello auraient dû inventer la boîte sans fond (en référence au fameux sac sans fond de D&D) pour caser le thermoformage et les 14 (!) planches de tuiles pour que tout rentre dans la boîte… A moins de s’inspirer du design des cochons et de proposer une boîte quasiment cubique… Bref, l’alternative des sachets zip semble être la plus réaliste, n’en déplaise aux thermoformagiphiles…
La règle (8 pages) est à la fois bien écrite et bien organisée… Les mécanismes (simples) y sont expliqués simplement… La règle est complétée par une variante pour deux joueurs (signée Bruno Cathala!) et par deux petites variantes tactiques… On peut sans tarder commencer son premier élevage en sélectionnant soigneusement son premier cheptel…
Contenu de la boîte : 1 marché, 20 billets (10x50 et 10 x 100), 64 pièces de monnaie (37 x 1, 15x5, 12x10), 24 cartes saison, 75 tuiles objet (Vaccins, Complément Alimentaire et Amulette de Naissance), 1 jeton 1er joueur, 20 tuiles prés, 196 tuiles cochon (50 Bébés, 48 Petits, 48 Moyens, 50 Gros) et, pour chacun des 6 joueurs, 1 set de 4 tuiles Action (Nourrir, Acheter, Vendre et Reproduire)
Déroulement d’une partie
Mise en place
Aidée par l’illustration de la règle, la mise en place s’avère des plus rapide :
Chaque joueur prend 1 pré, son set de tuiles et 45 dollars. Ensuite, chaque joueur peut faire 5 achats… On écarte 2 cartes de chaque saison et on forme une pile avec les cartes restantes dans l’ordre des saisons…
C’est tout… la partie peut commencer!
Deroulement
Le jeu va se jouer en 16 manches… Chaque manche se déroule sur un rythme immuable :
1Retourner une carte saison. Cette carte indique le nombre d’action de chaque type qui devra être réparti équitablement entre les joueurs les sélectionnant. Chaque carte procure un effet spécial qui sera appliqué à la fin de la manche.
2Programmer une Action : chaque joueur sélectionne secrètement une des quatre actions parmi Nourrir (faire grossir un cochon), Acheter (champ, matériel, cochon), Reproduire (les couples font un bébé) et vendre (échanger un cochon contre des monnaies sonnantes et trébuchantes)…
3Révéler les Actions
4Réaliser les actions, dans l’ordre du tour
5Appliquer l’effet de la saison
Lorsque saison s’achève, tous les cochons non vaccinés succombent… C’est triste mais c’est ainsi…
Fin de partie
A l’issue de la 16ème manche, les cochons non vaccinés sont retirés du jeu (paix à leurs âmes) et les joueurs peuvent vendre les cochons de leur champ au prix du marché… Le joueur le plus riche remporte la partie et le diplôme de meilleur éleveur porcin de la région…
l’Avis de la Rédaction
Contrairement à ce que pourraient laisser penser ses
illustrations acidulées et sa
mécanique somme toute assez épurée,
Happy Pigs est un
jeu de gestion léger mais (très) subtil…
A chaque tour, une seule action parmi quatre…
Simple me direz-vous? Mais plus que de la programmation, on est dans la planification… Et cette poignée d’action offre un
large éventail de possibilités… D’autant que pour
maximiser ses profits, il faut prendre soin de prendre une action qui ne sera pas choisie par ses adversaires éleveurs… Car les joueurs optant pour la même option devront
partager le nombre d’action de ce type disponible pour la manche en cours… Il faut dès lors tenter de lire le jeu de l’adversaire… et ne pas hésiter à choisir l’action qu’il choisira sans doute pour l’empêcher d’effectuer l’action par trop avantageuse en trop grand nombre, l’idéal étant d’en tirer soit même un substantiel profit … A moins qu’on ne laisse un autre joueur se sacrifier à notre place… Mais s’il ne le fait pas…
De biens cruels dilemmes en perspective!
Eh oui, il y a une grosse dose de guessing et de
double guessing et ce simple choix peut nous entraîner dans des supputations vertigineuses…
Outre les indispensables vaccins, les compléments alimentaires (sorte d’engrais à cochon) permettent de faire sauter une taille à un cochon lors de l’action Nourrir et les Amulettes de Naissances permettent d’accélérer la naissance des bestioles en faisant du nouveau-né un gentil petit cochon (et non un bébé cochon)… Certains esprits chagrins diront que le jeu fait un peu
l’apologie de l’agriculture intensive avec des cochons élevés en batterie, piqués aux hormones, shootés à fond et ingurgitant des OGMs pour faire du gras… Mais les sympathiques dessins de Biboun viennent contrebalancer tout ça avec un
humour rafraîchissant et un brin ironique…
Chaque
carte saison apporte de subtiles nuances qui vont sinon induire mais en tout cas orienter le choix des actions… La connaissance des cartes saisons est d’ailleurs importante pour planifier au mieux ses actions… La première
variante vient d’ailleurs enrichir le jeu en proposant aux joueurs de dévoiler la carte à venir, pour permettre d’optimiser son action de la manche en cours et de bénéficier de l’effet de la carte à venir… Car, qu’il soit financier ou en nature, cet avantage est loin d’être négligeable!
Lors de la première partie, surtout durant les premières manches, la manipulation des multiples tuiles paraît parfois un brin laborieuse, notamment quand il s’agit d’engraisser notre cheptel… Avec la pratique, et comme le souligne les règles, chacun peut gérer ses actions, à condition de placer les réserves à portée de main et de faire confiance à ses collègues éleveurs…
Dans sa version originale, le jeu ne se jouait que de 3 à 6 joueurs. La
variante pour deux joueurs concoctée par l’ingénieux Bruno Cathala s’avère à la fois élégante et indolore. Un joueur a, en plus de ses tuiles, une couleur neutre. A son tour, le joueur choisit une tuile pour lui et une tuile neutre qui n’aura pour fonction que d’embêter son adversaire… Si la tuile neutre entrave effectivement ce dernier, c’est lui qui jouera la couleur neutre au prochain tour… Dans le cas contraire, rien ne change!
Cédons à la facilité et déclarons-le sans ambages : « tout est bon dans le cochon »…
Happy Pigs est un délicieux petit jeu de gestion simple et addictif… Destiné à un public familial, il pourrait bien devenir le chaînon manquant entre les jeux pour joueurs occasionnels et ceux destinés à un public plus confirmés… Ou comment se mettre en douceur au jeu de gestion…
On aime...
les règles simples voir épurées
un jeu d’initiation à la gestion
la savoureuse composante de guessing
les illustrations colorées de Biboun
pour dépuncheurs compulsif ^^
On n'aime pas...
la manipulation des tuiles un brin laborieuse lors des premières parties