Le monde du théâtre est en émois alors que s’annonce le Mirifique Festival! Venues des quatre coins du royaume, les meilleures troupes de théâtres vont rivaliser d’audace et d’inventivité pour gagner les faveurs du grand roi Léonus XIV… Mais sa seigneurie est-elle d’humeur badine et mélancolique? Souhaite-t-il voir une comédie désopilante ou une saisissante tragédie?
Règles et matériel
Rarement le matériel d’un jeu ne m’aura autant donné envie d’y jouer… Il y a bien sûr ces figurines, caravelles et régisseurs, originales et finement sculptées. Les écus (presque) sonnants et trébuchants, la somptueuse illustration de de couverture de Jérémie Fleury attire d’emblée le chaland, celles des cartes et du magnifique plateau de jeu sont à l’avenant, immergeant le lecteur dans une délicieuse ambiance Grand Siècle version anthropomorphique… On songe bien sûr à Lafontaine mais aussi et surtout à l’excellente série de BD
Cape et de Crocs d’Alain Ayroles et Jean-Luc Masbou… On fait pire en matière de références…
Mais la cerise sur le gâteau, c’est cette superbe scène de théâtre en 3D qui, si elle n’est pas indispensable à la mécanique du jeu, s’avère être un élément clef tant elle confère au jeu toute son identité avec sa machinerie élégante et inventive… C’est beau, vraiment beau!
Très aérée, la règle (12 pages), impeccablement écrite, s’avère parfaitement digeste. On pourra s’étonner que la thématique du jeu ne soit abordée qu’après la présentation du matériel et l’explication de la mise en place mais l’ensemble cela reste un détail… La règle est bien écrite, joliment maquettée et intelligemment complétée par une aide de jeu fort bien pensée figurant en dernière page et résumant de façon claire et précise les différents rouages du jeu…
Contenu de la boîte : 48 cartes Rencontre (Saltimbanques, Primes et Acteurs –Tragédiens ou Comédiens-), 22 cartes Demandes Secrètes, 10 pièces d’or, 20 d’argent et 50 de cuivre, un plateau de jeu, 1 scène de Théâtre en 3D et, pour chacun des 5 joueurs : 1 set de 8 cartes Voyage, 8 figurines Caravelles et 3 figurines Régisseur.
Déroulement d’une partie
Mise en place
La mise en place est aisée et particulièrement rapide… Chaque joueur prend 3 écus et son set de cartes et figurines.
On tire à pile ou face l’humeur de départ du roi. Les Rencontres sont mélangées, 8 d’entre elles sont dévoilées sous le plateau.
Les acteurs sont en place, la pièce peut commencer…
Deroulement
Le jeu se joue en deux saisons divisées en tour de 3 phases chacune…
1Voyage: chaque joueur choisit secrètement l’une de ses cartes Voyages.
2Résolution : les cartes sont révélées.
Si un joueur est seul sur une cité, il active la capacité de la ou des cartes s’y trouvant, gagnant ainsi des espèces sonnantes et trébuchantes, des saltimbanques dotés de capacités intéressantes ou des acteurs (comédiens ou tragédiens) qui permettront de récupérer sa défausse, voler un écu, envoyer des régisseurs sur scène ou être envoyés à la cour (défaussés) pour influencer l’humeur du roi.
Si plusieurs joueurs se retrouvent dans la même cité, les cartes s’y trouvant sont défaussées, les acteurs modifiant l’humeur du roi… Chacun des joueurs présents dans la cité pioche une carte Demande Secrète…
3Nouvelles Opportunités : on rajoute une carte sur chaque cité. Les cartes Voyage sont défaussées, les caravelles restant en place, pour que chacun se rappelle où chaque joueur ne peut plus aller…
Fin de partie
Une saison s’achève lorsque la pioche de Rencontre est épuisée… On joue le dernier tour de la saison normalement et on procède à un décompte…
Les joueurs reçoivent 1 écu par Acteur de sa troupe correspondant à l’humeur du roi. Si sa pièce plait au roi (différence entre tragédiens et comédiens correspondant à l’humeur du roi), il empoche 3 écus supplémentaires (5 pour la seconde saison) et double ses points si sa pièce est la préférée du monarque. Il marque éventuellement des points pour une de ses cartes Demande Secrète réalisée ainsi que pour l’éventuelle carte Demande Secrète réaliser lors de la première saison si la condition est réalisée…
Le joueur le plus riche à l’issue des deux manches emporte bien évidemment la partie…
Acta est fabula…
l’Avis de la Rédaction
Créé à quatre mains par les talentueux Bruno Cathala et Christian Martinez,
Fourberies a plus d’un atours pour séduire les joueurs…
Son matériel, tout d’abord.
Magnifiquement illustré, rehaussé par des figurines originales et élégantes, complété par un petit théâtre en 3D de toute beauté doté d’une machinerie originale et bien pensée… Si
le ramage et à la hauteur du plumage, le jeu promet d’être mémorable…
Les
mécanismes, simples et rapidement assimilables, donnent lieu à de savoureux
affrontements et coups tordus pour recruter des acteurs ou influencer le roi… Les joueurs devront s’efforcer à lire au mieux le jeu de leur adversaire, pour déjouer leurs plans ou mener à bien les siens. Car s’il faut
recruter une troupe à même de séduire le monarque, il faut aussi
influencer l’humeur de ce dernier pour que la pièce que chacun s’efforce de monter lui convienne. Se retrouver sur un même lieu qu’un autre joueur, c’est certes se priver d’un recrutement possible mais c’est aussi l’occasion d’influencer le roi de façon déterminante…
Le
choix de sa destination, certes guidé par l’humeur du roi et l’orientation du jeu de chacun, est infléchi par les rencontres possibles sur telle ou telle citée, rencontres d’autant plus intéressantes que la cité n’aura pas été visitée au(x) tour(s) précédent(s)… Guessing et
double guessing sont au rendez-vous à chaque tour,
influencé par les saltimbanques recrutés lors des tours précédents…
L’éventail de choix se réduit au fil des tours, alors que s’épuisent nos cartes Voyage… On ne les récupère que lorsqu’on n’a plus qu’une seule carte en main ou à l’occasion d’une rencontre favorable… Dès lors, si lors des premiers tours les choix peuvent paraître hasardeux, ils se font plus
fins et plus subtils (et plus cornéliens!) alors que les possibilités de voyage de chacun se réduisent…
Plus le nombre de joueurs est élevé et plus l’impondérable et la tension augmente. On pourrait craindre que le jeu ne s’affadisse à deux joueurs. Il n’en est rien grâce à une
subtile variante : en plus de son set de cartes Voyage, chaque joueur possède un set neutre. Au début de chaque tour, il tire la première carte du paquet neutre et en prend secrètement connaissance, comme s’il avait « lu » le jeu d’un autre joueur. Il ne sélectionne qu’ensuite sa propre carte Voyage…
Le jeu tourne parfaitement bien à cinq joueurs, une fois que chacun a bien compris les subtilités et les fourberies du jeu… Néanmoins il laisse une impression un brin chaotique, bien que l’impression s’estompe avec l’expérience… C’est pourquoi cette configuration est, à notre avis, à déconseiller pour découvrir le jeu, qui risquerait de laisser un goût amer aux apprentis comédiens…
Doté d’un matériel somptueux et attractif, Fourberies est un jeu simple et subtil doté d’une mécanique fluide et éprouvée mais revisitée avec malice et talent par Bruno Cathala et Christian Martinez.
Le ramage étant à la hauteur du plumage, tout laisse à penser que Fourberies, jeu plein de malices (et de fourberies!) est promis à un bien bel avenir… C’est tout le mal qu’on lui souhaite!
On aime...
les règles simples mais pleines de malices (et de fourberies!)
le matériel magnifique (et cette scène!) au service d’une thématique forte
la fluidité des parties et le rythme des tours
la variante à 2 particulièrement ingénieuse
On n'aime pas...
les parties à 5 semblent un brin chaotique (mais, avec l’expérience, il n’en est rien)