Pour notre plus grand plaisir, l’opiniâtre et talentueux Stéphane Heurteau achève après l’avoir retravaillé son envoûtant et poétique
Itinérêve d'un gentilhomme d'infortune avec cet album captivant et magnifiquement édité qui rend hommage à la littérature victorienne.
Dans son château des Carpates, Dracula s’ennuie tant qu’on l’a surnommé le Prince de l’Ennui. Pour briser la monotonie de sa longue existence, il a convoqué Etienne Hauterue, un écrivain voyageur et rêveur.
Le conte lui propose un étrange marché : en échange de l’éternité littéraire, il devra divertir le maître des lieux avec un de ses récits de voyage… S’il échoue, l’inquiétant Dracula le condamnera à une éternité bien plus morne et ennuyeuse …
Parmi ses nombreux voyages, Etienne Hauterue décide de narrer au conte celui qu’il fit en Grande-Bretagne pour trancher une question littéraire de première importance: est-ce le voyage ou l’imaginaire qui créé l’aventure?
Les habitués des Sentiers de l’Imaginaire savent combien nous apprécions l’œuvre de Stéphane Heurteau qui explore de multiples registres avec un même talent. De part sa thématique mêlant audacieusement littérature, onirisme, fantastique et poésie, ce
Prince de l’Ennui ne pouvait qu’aiguiser notre curiosité…
A l’instar du chef d’œuvre de Bram Stoker, le récit du
Prince de l’Ennui nous est conté sur un mode épistolaire. Les dialogues y sont rares et les longs récitatifs posent une ambiance délicieusement fantastique, retranscrivant avec finesse les états d’âme de cet écrivain voyageur et rêveur. L’auteur a truffé son récit de références littéraires et cinématographiques qui rendent la lecture de l’album particulièrement ludique, tout en rendant hommage à la littérature du XIXe siècle…
Mêlant plusieurs fils narratifs, la structure du récit s’avère particulièrement prenante : alors qu’Etienne Hauterue tente de sauver sa vie en s’efforçant de captiver le conte Dracula avec son récit de voyage , la série de meurtres qui l’émaille et semblent suivre l’itinéraire de l’écrivain fait planer sur l’album un mystère délicieusement oppressant…
C’est peu dire que le dessin de l’auteur est au diapason de son scénario fantastique et poétique. Son trait souple et élégant nous entraîne de l’autre côté du miroir, faisant revivre mythes et légendes et s’incarner des personnages emblématiques tous droits sortis des chefs d’œuvre de la littérature victorienne. Ses planches lumineuses sont une invitation au voyage, à l’aventure et à la rêverie… Difficile en la matière de ne pas penser aux aventures à la lisière du rêve d’un célèbre marin, né sous la plume d’Hugo Pratt, incarnation du gentilhomme de fortune qu’Etienne Hauterue rêve de devenir…
Stéphane Heurteau ne s’est pas contenté de mettre un point final à son Itinérêve d'un gentilhomme d'infortune, œuvre inachevée publiée à l’aube des années 2000… Il l’a profondément remanié et enrichi pour donner naissance à un récit captivant et plus envoûtant encore…
Porté par un dessin au diapason de cette intrigue oscillant entre littérature, rêve et fantastique, ce Prince de l’Ennui est un album particulièrement envoûtant qui rend hommage à la littérature victorienne et au cinéma… Difficile de ne pas être enthousiasmé par la chute délicieusement littéraire qui donne la clef de cet incroyable récit.
Complété par le superbe carnet de voyage d’Etienne Hauterue (anagramme de l’auteur!) et les illustrations de sa compagne Gaëlle Apparuit, cet album dont la lecture s’avère particulièrement ludique est une véritable invitation au voyage et à la rêverie… Oui, décidemment, nous aimons beaucoup Stéphane Heurteau de par chez nous…
- Si je comprends bien, vous convoquez des écrivains et vous leur demander de vous divertir, vous distraire. Certes, la liste est impressionnante et je suis flatté que Jonathan Harker ait eu la présence d’esprit de vous parler de moi…
- Il a bien fait. Sans quoi, je crois bien qu’il serait encore mon invité!Dialogue entre Etienne Hauterue et le conte Dracula