Pour notre plus grand plaisir, Olivier Berlion se lance à nouveau dans le polar, genre dans lequel il excelle…
Pour avoir avorté clandestinement, Agata Lietewski doit fuir sa Pologne natale pour échapper à la police. Elle émigre aux Etats-Unis pour trouver refuge chez son oncle qui vit au cœur de Jackowo, le quartier polonais de Chicago… Elle trouve rapidement un emploi de serveuse dans le bar de James, un ancien boxeur à qui elle confiera son histoire et ses rêves…
Mais si l’Amérique semble pleine de promesse pour Agata, c’est aussi le pays où Lucky Luciano est en train de bâtir un Empire du Crime… Après s’être débarrassé de Maranzano, le Capo Di Tutti Capi, faisant fi des traditions héritées du passé, il va poser les bases d’une organisation criminelle d’un nouveau genre qui fera de lui le gangster le plus puissant depuis l’arrestation d’Al Capone…
Pour le malheur d’Agata, sa route va croiser celle de Lucky Luciano…
L’Amérique de la Grande Dépression et de la Prohibition n’a pas fini d’inspirer romanciers et scénaristes… Mêlant habilement faits avérés et personnages historiques à des personnages et des évènements fictifs, Olivier Berlion tisse un polar captivant construit autour d’Agata, un personnage féminin troublant et envoûtant.
Avec une narration alternée savamment orchestrée et une mise en scène soignée, le scénariste nous dépeint l’époque de façon saisissante. Il donne vie à une galerie de personnages inquiétants ou attachants, mettant en lumière les zones d’ombres et de lumière d’un pays en pleine mutation…
Magnant avec finesse l’art de l’ellipse, il décrit l’ascension de Charles Luciano, dit « Lucky Luciano », considéré par beaucoup comme le père du crime organisé moderne : de La guerre des Castellammarese qui vit s’opposer le frustre Joe Masseria à Salvatore Maranzano au meurtre de Maranzano et à la fondation du Syndicat du Crime… Cette violence contraste avec la douceur et l’innocence d’Agata qui va, bien malgré elle, être entraînée dans la tourmente… Car les deux sont, on le sait, emmenés à se rencontrer…
Graphiquement, les planches d’Olivier Berlion sont comme de coutume de toute beauté. Soignant cadrages et décors, il met en scène avec virtuosité des personnages particulièrement convaincants et expressifs… Difficile de ne pas être touché par la belle Agata, par sa gentillesse envers le jeune Pete, par la relation qui semble se nouer entre James et elle ou par ses rêves simples et accessibles… Reconnaissable entre mille, les couleurs soulignent avec une rare efficacité l’ambiance baignant chaque scène, comme l’aurait fait la musique d’un film…
Cerise sur le gâteau, l’album est complété par un superbe cahier graphique qui nous permet d’apprécier l’étendue du talent de cet artiste…
Prenant le temps de poser chacun des personnages, Olivier Berlion signe un récit choral joliment orchestré qui dépeint de façon crédible et convaincante l’Amériques des années 30, gangréné par le crime qui s’organise sous la houlette de Lucky Luciano…
Porté par un dessin somptueux et envoûtant, des cadrages soignés et des dialogues ciselés, ce premier tome d’Agata pose les bases d’un récit romantique d’inspiration classique qui ravira sans nuls doutes les amateurs de polars…