Pascal Bertho et Yannick Corboz poursuivent leur adaptation magistrale de la tétralogie Verhoeven, série de polars sombres et tourmentés qui nous entraînent dans les tréfonds de l’âme humaine...
Paris, 7 avril 2003. Le commandant Camille Verhoeven est appelé sur une scène de crime particulièrement sordide, rue Félix Faure, à Courbevoie. Là, deux femmes ont été torturées, tuées puis dépecées… Bien vite, Camille Verhoeven qui compense sa petite taille par une vivacité d’esprit peu commune trouve que tout sonne faux sur la scène de crime… Le meurtrier n’a rien laissé au hasard et a savamment mis en scène son macabre décor, laissant même une empreinte reliant l’affaire à un crime plus ancien, jamais élucidé…
Peu à peu, il apparaît à Verhoeven que le meurtrier est un copycat qui s’inspire des grandes affaires criminelles de la littérature pour mettre en scène ses crimes sordides… Reste à convaincre la juge acariâtre chargée de l’affaire de réouvrir le dossier et de le laisser mener l’enquête à sa guise…
Ce qu’il ignore, c’est que le tueur en série surveille ses moindre faits et gestes
Il est rare qu’une adaptation de roman soit aussi enthousiasmante que le roman dont elle est tirée… C’est clairement le cas ici, malgré les inévitables coupes… Il faut dire que le talentueux Pascal Bertho n’en est pas à son coup d’essai puisqu’il a déjà signé en compagnie de Marc-Antoine Boidin une somptueuse adaptation du
Cheri-Bibi de Gaston Leroux.
Plutôt que de respecter la chronologie des romans, il a choisit d’ouvrir le bal avec
Rosie (adaptation de
Rosy & John, novélisation du feuilleton numérique les
Grands Moyens) avant d’enchaîner avec celle de
Travail soigné, rebaptisé
Irène pour l’occasion… Et le fait est que cette liberté prise avec la chronologie de l’œuvre originelle rend le final de l’album plus tragique encore que celui du roman tant on a eut le temps de s’attacher à chacun des personnages…
Le récit de ce second opus est bien plus sombre que ne l’était celui du premier. Malgré son rythme soutenu, les auteurs prennent néanmoins le temps de mettre en scène ces petits instants de vie qui rende chacun des personnages authentique et profondément humain et par la même particulièrement touchant… La mécanique développée par Pierre Lemaître est une fois encore d’une redoutable efficacité, la tension allant crescendo jusqu’à un final implacable et tragiquement glaçant…
Yannick Corboz fait une nouvelle fois montre de son talent de dessinateur… et de metteur en scène ! Chacune des séquences de l’album est découpée avec soin, rehaussé par un cadrage virtuose venant subtilement accroître la tension et l’émotion de chaque scène… Choisissant de suggérer l’horreur plutôt que de la montrer, tel dans la découverte de la scène de crime par la brigade Verhoeven, il distille avec art un sentiment diffus de malaise, laissant au lecteur le soin d’imaginer l’horreur à laquelle sont confrontés les enquêteurs…
L’atmosphère étouffante du scénario est soulignée avec finesse par la colorisation impeccable réalisée à quatre mains par Fabien Blanchot et Sébastien Bouët…
Plus sombre que le premier opus, Irène est une remarquable adaptation de Travail soigné, polar sombre et nerveux signé Pierre Lemaître…
Malgré les inévitable coupes, les auteurs sont parvenus à conserver l’ossature et la force de ce scénario délicieusement malsain mettant en scène cette brigade atypique dirigée par Camille Verhoeven confronté à un tueur en série inquiétant et méticuleux… Prenant le temps de développer chacun des personnages, Pascal Bertho et Yannick Corboz les rendent particulièrement attachants en dépeignant avec justesse les émotions qui les assaillent et en truffant leur récit de scènes de vie ordinaires qui en font des êtres de chair et de sang…
Ce polar violent et tourmenté ravira à coups sûr les amateurs du genre tant il s’inscrit, à double titre d’ailleurs !, dans la ligné des polars américains, de James Ellroy à William McIlvanney en passant par Bret Easton Ellis…
Tout sonne faux ! Le magnétophone vintage, le répondeur téléphonique avec un message, mais pas de ligne… La valise prête au dépat… Cet exotisme américain… C’est moi ou on dirait un décor de cinamé ?Camille Verhoeven