En marge de la geste arthurienne, Severine Gauthier et Thomas Labourot poursuivent les aventures jubilatoires d’Alienor Mandragore au sein de la mythique forêt de Brocéliande…

Après leur dangereuse aventure dans le monde souterrain des Korrigans, Aliénor, fille de du grand Merlin, s’est brouillée avec son ami Lancelot qui la tient pour responsable des cornes qui ornent désormais son front…

Désormais seule, la jeune fille est plus que jamais écartelées entre l’enseignent druidique paternel et son attirance pour la magie des fées pour laquelle elle semble avoir de sérieuses dispositions…

Alors que Merlin et Morgane s’unissent pour condamner les portes reliant la terre des hommes à Avalon, la jeune fille rencontre son ermite… Au sens propre comme au figuré, le pauvre homme n’a plus toute sa tête, une partie de lui étant restée prisonnière du Val sans Retour. Persuadé qu’il connaît les réponses aux questions qu’elle se pose, Aliénor va pour le retrouver s’aventurer dans ces terres pleines de danger d’où, dit-on, nul ne revient…

Alors bien sûr, la couverture de l’album est une fois de plus magnifique et fait montre une fois encore du formidable talent de metteur en scène de Thomas Labourot tant la composition s’avère réussie… Pourtant, il y a un petit détail qui vient quelque peu gâcher les retrouvailles d’avec Aliénor… Mais si, regardez bien : ce sticker rouge mentionnant « Dernier Episode »… Comment ça dernier épisode ? Mais on ne veut pas en rester là nous autres aux Sentiers de l’Imaginaire ! On est même prêt à arpenter les sentiers de Brocéliande pour faire signer une pétition à tous les faërims de la forêt ! Pourquoi ? Mais parce qu’Aliénor Mandragore, fille de Merlin (excusez du peu), fait partie de ces série jeunesse jubilatoires que les parents empruntent sans vergogne à leur progéniture dès la nuit tombée !

Mais passons outre cette frustration et parlons de l’album ! Eh bien force est de reconnaître qu’il est aussi captivant que les précédents, et plus encore même! En s’aventurant au cœur du sinistre Val sans Retour pour retrouver la part de l’Ermite Accolon qui y est retenue, Aliénor Mandragore va être confronté à son passé, levant les voiles sur ses origines druidiques et féériques et sur le passé de son père… Composés de plusieurs récits enchevêtrés et puisant avec audace dans la matière de Bretagne, l’histoire écrite par Severine Gauthier s’avère tout à la fois rythmée et envoûtante… L’heure de la confrontation a sonné et de vieilles rancœurs vont engendrer un terrifiant duel magique au cœur même de la forêt de Brocéliande… Pas sûr que le fantôme de Merlin et Morgane, épuisée par une débauche de magie, en sortent indemnes…

Une fois encore, comment ne pas tomber sous le charme du formidable travail graphique de Thomas Labourot dont le trait souple et élégant est sublimé par une mise en couleur somptueuse et particulièrement lumineuse? Son Val sans Retour s’avère particulièrement inquiétant et sa mise en image des souvenirs du vieil ermite particulièrement efficace… Et que dire de cet ultime duel où se déchaînent magie druidique, féérique et magie noire, nous offrant un final somptueux et ébouriffant… Les planches qui suivent sont comme le calme qui suit les tempête, doux et apaisant…

L’album est comme il se doit complété par un numéro complet de l’Echo de Brocéliande, journal de la forêt reprenant rumeurs, cancans et histoires de façon drôle et décalée…

Au fil de ces cinq tomes, Severine Gauthier et Thomas Labourot ont revisité avec audace et inventivité la Matière de Bretagne, donnant vie à de jeunes héros attachants et brossant un portrait jubilatoire et iconoclaste de Merlin et de Morgane…

Rare sont les albums proposant une telle osmose entre scénario et dessin et les planches somptueuses du dessinateur nous entraînent à la lisière des mondes du rêve, réenchantant à chaque case la mythique forêt de Brocéliande qu’il baigne d’une lumière magnifique et féérique…

N’y allons pas par quatre sentiers : Aliénor Mandragore est une formidable série qui ravira jeunes et moins jeunes lecteurs… C’est avec une certaine un certain pincement au cœur que nous abandonnons Aliénor Mandragore, fille de Merlin, et Lancelot, son jeune et téméraire ami à leur destin… Mais qui sait… peut-être q’un jour on les recroisera au détour d’un sentier, au pied d’un vieux chêne ou aux abords de la fontaine de Barenton…

Ne t’inquiète pas Mandragore. Tu me reconnaîtras facilement. L’autre partie de moi me ressemblera trait pour trait.Accolon, Ermite d’Aliénor