Dès son premier album, Simon Radius Psycho-Investigateur écrit avec Erwan Courbier, Benoît Dahan faisait déjà montre d’une inventivité graphique saisissante et les albums qu’il a signé plus tard n’ont fait que confirmer son formidable potentiel… d’autant que le scénario était aussi brillant que le dessin ! Lorsque nous avons appris qu’avec Cyril Liéron il s’attaquait à un monument de la littérature policière, c’est avec fébrilité que nous attendions le premier opus de leur diptyque… L’album allait-il être à la hauteur de nos attentes ? Faisant fi du suspens et répondons sans ambages : oui ! mille fois oui ! Et même plus encore !

Après avoir brillamment bouclé la surprenante enquête de la Ligue des Rouquins, rongé par l’ennui, le grand Sherlock Holmes s’abandonne dans les bras Miss Cocaïne lorsque le docteur Watson, son ami et biographe vient lui rendre visite… C’est alors que l’agent Sparks frappe à sa porte, non pas pour mander les services du célèbre détective mais pour solliciter Watson au sujet d’un homme retrouvé errant en chemise de nuit dans l’East End et prétendant être son confrère…

Aussitôt, l’esprit aiguisé de Holmes s’agite dans sa mansarde, assemblant les différents indices et éléments pour arriver à la conclusion que le docteur Herbert Fowler est la victime d’une machination de grande envergure…

Il n’en faut pas plus pour sortir le détective conseil de sa torpeur pour enquêter sur cette étrange affaire du Ticket Scandaleux dont tout laisse à penser qu’elle gravite autour d’un mystérieux magicien chinois…

A l’instar des deux tomes du psycho-investigateur (édité pour le premier publié par Physalis et le second par Petit à Petit), dans la tête de Sherlock Holmes a fait l’objet d’une édition particulièrement soigné avec une couverture ajourée du plus bel effet qui rend l’illustration plus magnifique encore…

Avec audace et inventivité, les auteurs tissent, au propre comme au figuré, un formidable récit riche en rebondissements et joliment troussé qui invite le lecteur à visiter la fameuse mansarde où Sherlock Holmes archive et organise ses connaissances pour les activer pour les besoins d’une enquête.
Par ce procédé délicieusement ludique, les auteurs nous permettent de suivre le raisonnement alambiqué de Sherlock Holmes, nous faisant littéralement entrer dans sa tête… L’expérience s’avère particulièrement grisante d’autant que les auteurs usent avec art des cartes de Londres, que Holmes connaît sur le bout des doigts, et donnent corps à ce fil rouge évoqué dans e Chien des Baskerville et qui montre les liens avec lequel le détective relie les indices les uns aux autres, brodant peu à peu le canevas qui laissera apparaître la vérité sur cette bien étrange affaire…

Graphiquement, l’album est une petite pépite. Les planches de Benoît Dahan sont de véritables merveilles de composition. Le dessinateur joue avec jubilation avec les codes de la bande dessinée qu’il tord à sa convenance pour offrir une réelle expérience de lecture telle qu’on ne la trouve guère que dans certains albums jeunesse avec des jeux sur la transparence ou le recourbement des pages.

Le célèbre détective de Baker Street a fait l’objet de bien des adaptation, pastiches et créations originales… Sans doute était-il difficile de renouveler le genre… Mais c’était sans compter sur l’inventivité graphique et narrative débridée de deux auteurs talentueux que sont Cyril Liéron, fils d’un certain Philippe Luguy et jusque là connu pour ses travaux de coloriste, et Benoît Dahan, dessinateur de l’envoûtant Psycho-investigateur.

Respectant les canons holmésiens en inscrivant leur récit dans la trame des romans et nouvelle de Sir Arthur Conan Doyle, les deux comparses (par ailleurs rôlistes !) tissent une enquête passionnante et rythmée qui entraîne le lecteur dans la tête de Sherlock Holmes, cette fameuse mansarde où le détective archive et organise les connaissances utiles à ses enquêtes…

Il faudra patienter jusqu’au second tome pour connaître le fin mot de cette mystérieuse affaire du ticket scandaleux mais, en l’état, nous ne pouvons qu’espérer qu’elle ne soit que le début d’une longue et fascinante série tant ce premier opus nous a enthousiasmé!

- Encore cette détestable manie… Pour quel poison avez-vous opté ce matin ?
- Vous le savez bien Watson : c’est l’ennui le véritable venin qui déstructure ma petite mansarde. dialogue entre Watson et Holmes