



Avec les
Orphelins de l’Histoire, Raphaël Meyssan referme son triptyque follement audacieux qui nous conte avec force détails la Commune vue par ceux qui l’ont vécue…
Car de l’audace il en fallait pour raconter l’histoire de la Commune de Paris avec pour seules images celles des gravures d’époque, certes détourées, recadrées et découpées avec inventivité… On aurait pu craindre un récit professoral insipide et soporifique narrant par le menu les différentes péripéties de la Commune, de la formidable vague d’espoir qu’elle fait naître à sa sanglante répression et tous ces fusillés, hommes, femmes, enfants et vieillards qui furent passés par les armes… Il n’en n’est rien fort heureusement !
Pour nous faire ressentir la Commune, Raphaël Meyssan s’est attaché au destin de deux communards : l’un n’est autre que celui Lavalette qui fut, à près d’un siècle et demi d’intervalle le voisin de l’auteur et inspira, post-mortem, cette grande œuvre ;

et l’autre Victorine, une autre anonyme qu’il va s’efforcer de retrouver dans le Paris insurgé de la Semaine Sanglante que l’auteur arpente sans relâche, croisant avec malice un certain Jacques Tardi venu incognito faire ses repérages pour son formidable
Cri du Peuple.
Truffé d’extraits d’hommes et de femmes ayant été les témoins ou les acteurs de ces soixante-douze jours qui ont fait trembler la bourgeoisie et ébranlé les consciences, le texte de Raphaël Meyssan s’avère joliment écrit, nous donnant à voir, à entendre, à apprendre et à réfléchir et finalement à comprendre ce qui animait les hommes et les femmes de l’époque et le formidable vent d’espoir que fit souffler la Commune de Paris, donnant chair à l’idéal républicain de liberté, d’égalité et de fraternité qui deviendra la devise de la IIIe République.
Les communards furent les précurseurs de biens des avancées sociales et sociétales, telles la séparation de l’Eglise et de l’Etat, l’instruction libre, laïque et obligatoire, l’égalité des salaires entre hommes et femmes, le contrôle des élus, la réquisition des logements vides… Des revendications dont certaines n’ont toujours pas abouties de nos jours… Pour avoir tenté de mettre à bas l’ancien monde, de bousculer l’ordre établi, la classe dirigeante allait leur faire payer le prix des larmes et du sang…

Après nous avoir raconté la Commune à travers le destin de deux anonymes qu’il s’est efforcé de retrouver dans le Paris insurgé, Raphaël Meyssan nous entraîne dans les coulisses de la Semaine Sanglante qui vit les versaillais écraser dans le sang cette formidable utopie sociale et sociétale qui trouve, de nos jours encore, d’étranges échos dans l’actualité.
Alors que ces soixante-douze jours que durèrent la Commune sont assez rarement abordés dans les manuels d’histoire, les Damnés de la Commune les abordent à hauteur d’hommes à travers le destin de deux anonymes qui ont embrassé ses idées et pris les armes pour les défendre… C’est avec audace que Raphaël Meyssan s’est lancé dans cette œuvre pharaonique de raconter la Commune de Paris en s’appuyant exclusivement sur des gravures d’époques, recadrée, découpée et détouré avec art… Mais sans son saisissant talent, sa folle inventivité, ses dons de conteur passionnés et un sens de la dramaturgie aiguisé, l’audace n’eut été qu’un feu de paille… Alors que nous avons là un petit bijou du neuvième art, un Objet Littéraire Non Identifié en tous points captivant…
Les orphelins de l'histoire referment trilogie édifiante et captivante dont nous recommandons chaudement la lecture, pour se rappeler de ces hommes et femmes qui rêvèrent de jeter les bases d’un monde plus juste et qui l’ont payé de leur vie…