Il y a trente ans naissaient
les Chroniques de la Lune Noire formidable saga d’heroïc-fantasy qui devait tant au talent de dessinateur d’Olivier Ledroit qu’à l’esprit épique de la série et l’inventivité folle François Marcela-Froideval, faisait souffler sur cette série devenue désormais culte…
Ce que le grand public ignore peut-être, c’est que les grandes figures de cette fresque naquirent comme personnages de jeux de rôle dans les campagnes jouées par ceux qui furent les pionniers du RPG en France qui fonda le mythique club de la rue d'Ulm et le mythique Casus Belli, magazine de JdR qui emprunte au Phoenix sa capacité de renaître de ses cendres… Il fut d’ailleurs l’assistant de l’américain Gary Gygax, inventeur du jeu de rôle Donjons & Dragons. Bref, cet homme est une légende vivante… Ce n’est d’ailleurs pas pour rien que
les Chroniques de la Lune Noire se sont imposées comme LA série de référence des rôlistes des années 80-90 qui retrouvaient les aventures, les truculents archétypes et l’humour des principaux protagonistes l’ambiance de leurs premières parties de cet incroyable loisir ayant pour seule frontière celle de leur imagination…
Dans ce nouvel opus qui se referme sur un cliffhanger fracassant, le lecteur suivra la geste de Whismerhill après qu’il fut contraint de s’exiler avant de devenir Empereur d’un monde nouveau à même de sauvegarder l’espèce humaine… Mais des puissances infernales vont se liguer contre lui et faire déferler sur ses terres une horde de démons après qu’une porte vers l’Enfer aie été ouverte…
On retrouve comme de coutume l’humour qui baigne chacun des albums de cette grand œuvre d’Heroic-Fatansy unique. L’histoire se lit avec jubilation et les lecteurs qui ont suivi l’ascension de ce fils d’une haute elfe et d’un Prince Démon qui, de simple aventurier, s’imposa comme Empereur… Mais on a une fois encore la furieuse impression de ne faire qu’effleurer les personnages tant ils s’inscrivent dans une trame de grande envergure sortie de l’imagination fertile et foisonnante de l’auteur. On y croise bien évidemment des figures emblématiques, tels Pile ou Face, Ghorghor Bey, Hellaynnea ou Methraton mais on ne les aperçoit qu’en toile de fond, ce qui s’avère particulièrement frustrant…
Alors que le premier cycle nous racontait l’inexorable ascension du demi-elfe vers le trône impérial et que le troisième est annoncé par le scénariste comme se déroulant trois millénaire après celui-ci, ce second cycle laisse un goût étrange, comme s’il n’était qu’un cycle de transition permettant de redistribuer les cartes en attendant le suivant…
Fabrice Angleraud qui a rejoint l’aventure des Chroniques de la Lune Noire avec ce second cycle reprend les codes et le découpage si particulier d’Olivier Ledroit tout en insufflant à ses personnages et à ses décors foisonnants une part de sa personnalité. Ses succubes sont toutes plus désirables les unes que les autres alors que ses démons s’avèrent pour le moins menaçants…
Les Chroniques de la Lune Noire exercent encore et toujours une étrange fascination sur les rôlistes vétérans qui ont arpenté les donjons ténébreux alors que s’écrivait les premières pages de cette fresque épique et fantastique…
L’ « effet madeleine de Proust » est encore opérant avec ce vingtième tome orchestré par François Marcela-Froideval et mis en scène par l’impressionnant Fabrice Angleraud, dessinateur de ce second cycle… La chute cinglante de ce présent opus laisse le lecteur groggy et annonce des bouleversements d’envergure… Mais on ne peut s’empêcher de rester un brin sur sa faim une saison qui ressemble bougrement à une transition vers un troisième cycle annoncé comme se déroulant quelques siècles après les évènements relatés ici…
Reste au lecteur à attendre pour voir ce que l’avenir lui réserve…