Fiche descriptive Western Deadwood Dick Tome 1 Michele Masiero (d'après le roman de Joe R. Lansdale) Corrado Mastantuono Corrado Mastantuono Paquet 03 Février 2021 13€50
9782889321315 Chronique Noir comme la nuit Un western hardboiled |
Si la Guerre de Sécession s’est achevée par la victoire du Nord et des idées abolitionnistes, dans les états du sud, il ne fait toujours pas bon être noir… Pour avoir rêvasser en reluquant le postérieur de la sœur d’un voisin blanc, Nat Love est poursuivit par une bande d’hystérique désireux de le lyncher… Il n’a d’autre choix que de dérober le colt et le canasson de son paternel avant de fuir à bride abattue, n’importe où, pourvu que ce soit loin d’ici… Dans sa fuite, il croise la route de Cullen, un ancien esclave qui, n’ayant rien de bien grave à reprocher à son ancien maître, regrette sa fonction de majordome… Pour des raisons bien différentes, tous d’eux vont rejoindre le 9e Régiment de Cavalerie pour s’y engager… Ce qui devrait, pour un temps au moins éviter, la corde à Nat Love qui se fait désormais appeler Deadwood Dick, histoire de brouiller les pistes… L’hagiographie jubilatoire d’un cowboy afro-américain… Depuis des lustres, les cassandres prophétisent la fin de western qu’ils voyaient déjà six pied sous-terre dans le cimetière de Sad Hill, dans la tombe sans nom à côté de celle d’Arch Stanton… Mais de talentueux auteurs ont repris le flambeau, offrant aux amateurs du genre de véritables pépites : Undertaker, Stern, Ghost Hill, Wilderness, Jusqu’au dernier, la Venin ou Marshal Bass pour ne citer qu’eux… Il faudra désormais compter avec Deadwood Dick qui possède une saveur unique…Adapté du roman de Joe R. Lansdale, ce premier opus est une petite merveille qui ravira les amateurs de westerns atypiques… Dès les premières pages, on comprend que cette série possède une forte personnalité et une petite musique qui lui est propre et qui ne ressemble à aucune autre… La force du scénario c’est que le lecteur sort de son rôle de lecteur pour endosser celui d’auditeur… Car le narrateur de l’histoire n’est autre que Nat Love lui-même… Et il s’y connaît pour captiver son auditoire ! Sa voix off nous accompagne tout au long de l’album grâce à des textes ciselés qui n’ont rien à envier aux polars hardboiled qui fascinent tant de lecteurs… Irrévérencieux, cynique et mordant, récitatifs et dialogues s’avèrent absolument irrésistibles et le sens de la répartie du héros est l’une des forces de ce premier tome… Etant son propre hagiographe, on comprend que le bonhomme soigne son image et peaufine ses répliques pour construire sa propre légende, comme il en a toujours été avec les figures tutélaires de l’ouest sauvage… Un western drôle, violent et irrévérencieux qui possède une musicalité unique… L’histoire de Michele Masiero est une petite merveille de construction qui éclate la narration, façon puzzle, en jouant sur la temporalité pour accentuer la dramaturgie et ferrer le lecteur pour ne le lâcher qu’à la toute dernière page… Le scénariste fait exploser sans vergogne le quatrième mur en permettant à Deadwood Dick de s’adresser directement au lecteur ou de le prendre à parti… C’est drôle, percutant et tout simplement jubilatoire !Mais si la forme est impeccable, le fond l’est tout autant ! Car le personnage de Nat Love, fils d’esclave, permet au scénariste d’aborder avec force la condition des noirs au sortir de la Guerre de Sécession et le racisme latent qui rend leur quotidien incertain, l’existence de régiments afro-américain (commandé toutefois par des officiers blancs), tel le Neuvième de Cavalerie, mais aussi et surtout le rôle qu’ils ont joué dans l’histoire des Etats-Unis d’Amérique en général et dans les Guerres Indiennes en particulier… Excellent dans le fond et la forme, ce premier tome de Deadwood Dick l’est tout autant au niveau graphique… Révélé en France par Élias le maudit (sur un scénario de Sylviane Corgiat), l’italien Corrado Mastantuono est loin d’être un béotien en matière de western ! Loin s’en faut ! Il a signé les dessins de La Marque du Klan (Tex, avec son compatriote Mauro Boselli) mais aussi repris le dessin de l’excellent Esprit du Vent (de Gianfranco Manfredi)… En matière de western, ça pose son homme… Et le fait est que ce maître du noir et blanc connaît tous les codes du genre et les maîtrise à la perfection… Découpage et cadrages s’avèrent tout à la fois subtils et d’une redoutable efficacité et la finesse de son encrage n’a d’égal que l’énergie qui se dégage de ses planches… Le western a plus que jamais le vent en poupe et les aficionados de l’ouest sauvage peuvent se jeter sans vergogne sur ce premier opus de Deadwood Dick… Formidablement adapté du roman de Joe R. Lansdale par un Michele Masiero très inspiré, remarquablement bien écrit, possédant une petite musique très personnelle, explorant un pan méconnu de l’histoire du western en mettant en scène un cowboy afro-américain, ce western drôle, violent et irrévérencieux est aussi remarquablement mis en image par l’impressionnant Corrado Mastantuono… Si vous aimez le western ne passez pas à côté de cette pépite ! Vous devez vous demander comment j’en suis arrivé là… ou pas… Après tout, il y a peu de chance que vous ayez une idée de qui je suis. Bref, que ça vous plaise ou pas, je vous la raconte quand même. A condition bien sûr qu’on arrête la scène. Et qu’on fasse un pas en arrière. Je sais, je sais, c’est pas correct d’interrompre une histoire au meilleur moment. Moi-même, un type me fait la même chose, et je lui botte le cul. Mais bon, vous ne pouvez rien y faire, c’est mon histoire. Ah, si vous avez encore des doutes, dans les pages précédentes, je suis le nègre, pas l’apache !... Et que ce soit clair, je n’ai rien contre les indiens, à part ceux qui essaient de me descendre…Nat Love alias Deadwood Dick, le narrateur
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