Pour résoudre cette étrange affaire du Ticket Scandaleux, Sherlock Holmes et le Docteur Watson remonte le fil de l’enquête et, après de brillantes déductions, se rendent à la Finsbury Printing Compagny, l’imprimerie qui a imprimé cet élégant billet rehaussé d’idéogrammes chinois pour retrouver le commanditaire…

Apercevant dans les coursives de l’imprimerie un homme en train de les observer, le détective se lance dans une course poursuite effrénée sur les toits de l’entreprise. S’en suit un bref mais vif combat au cours duquel Holmes feint d’être dominé pour recueillir des indices sur cet homme mystérieux dont il parvient à ravir la sacoche…

A l’intérieur, de nombreuses factures, un fragment de tapisserie, un poignard militaire et un second ticket pour un nouveau spectacle de « Wu-Jing, the Amazing Magician » qui aura lieu le soir même au Royal Albert Hall… Holmes décide de contacter son frère, Mycroft, pour obtenir la liste des invités et parvenir à déterminer lesquels pourraient être la cible d’enlèvements… Mais avant, il convient à Sherlock Holmes de jouer un peu de violon pour isoler les indices négligés avant de fumer quelques pipes pour résoudre le problème…

Apparu pour la première fois en 1887 dans Une étude en rouge, Sherlock Holmes n’a cessé d’inspirer scénaristes, cinéastes et romanciers et a déjà fait l’objet de plusieurs adaptations en bande-dessinée, parfois brillantes, parfois moins… Mais s’il en est une qui se détache du lot par sa créativité et son inventivité, c’est bien celle-ci… Car le projet fou et audacieux de Cyril Liéron et Benoît Dahan n’est rien d’autre que de nous entraîner dans le cerveau fascinant de Sherlock Holmes…

Il fallait tout d’abord une intrigue ciselée digne du héros de Conan Doyle… une enquête riche et foisonnante dans laquelle Sherlock Holmes pourrait faire montre de son esprit logique, de sa formidable capacité d’observation et d’analyse, de son approche scientifique et de son exceptionnel sens de la déduction. Celle concoctée par Liéron et Benoît Dahan est de cette trempe là… Et, les auteurs nous entraînant dans la tête de Sherlock Holmes pour y suivre ses réflexions, sa façon d’organiser les différents indices collectés et de tisser des liens entre eux avec ce fameux fil rouge qui traverse chaque planche, l’histoire n’en est que plus passionnante encore…

Le dessin foisonnant de Benoît Dahan est une petite merveille d’inventivité. Ne ressemblant à aucune autre, chacune possède sa logique interne, jouant avec art des codes de la BD pour les tordre à sa convenance. Toutes sont de petites merveilles de composition, des petits bijoux d’orfèvrerie et de superbes œuvres d’art. Chacune propose un découpage follement original qui sert le propos de façon remarquable. On comprend aisément qu’il ait fallu deux ans pour terminer un tel album dont la couverture, superbement composée avec cette silhouette ajourée ouvrant sur une illustration magnifique, répond à celle du premier opus, montrant Sherlock Holmes faire face à son machiavélique adversaire…

La lecture de l’album s’avère particulièrement ludique, les auteurs ayant recours à de subtiles trouvailles, jouant sur les transparences ou demandant au lecteur de plier l’une ou l’autre page pour faire apparaître des éléments qui nous immergent plus encore dans le système de pensée de holmésien… Mais si la forme s’avère captivante, offrant au lecteur une expérience saisissante, et au-delà de l’intrigue parfaitement orchestrée, le fond s’avère lui aussi pour le moins intéressant car, à l’instar du remarquable Shi de Zidrou et Homs, il pose les bases d’une salutaire réflexion sur le colonialisme en général et sur l’impérialisme britannique en particulier grâce un simple et subtil changement de paradigme…

Depuis sa naissance littéraire, Sherlock Holmes n’a cessé d’inspirer romanciers, cinéastes et scénaristes et le personnage créé par Conan Doyle en 1887 s’est déjà à maintes reprises vu transposer en bande-dessinée.

Mais Dans la Tête de Sherlock Holmes propose une œuvre bougrement originale qui nous entraîne dans cette fameuse mansarde où se déploie l’esprit logique et rationnel du détective afin de nous permettre de comprendre sa façon d’aborder un problème, de relier par un fil rouge les différents éléments de l’enquête pour faire émerger la vérité.

Pleine d’inventions narratives et de créativité, les planches de l’album sont de petits bijoux d’orfèvrerie où l’artiste joue avec les codes de la bande-dessinée pour servir au mieux ce récit foisonnant où fond et forme se rejoignent pour former un tout aussi cohérent qu’enthousiasmant.

Cet album referme donc le formidable diptyque de L'affaire du Ticket Scandaleux et on ne peut qu’espérer que Cyril Liéron et Benoît Dahan nous entraîneront dans la tête du célèbre détective de Baker Street pour d’autres passionnantes enquêtes…

Ha ! Comme souvent, un peu de musique permet de mettre en relief quelques indices trop négligés ! Ce sera certainement un problème à cinq pipes.Shrlock Holmes