Eté 1944. Après avoir participé à l’Opération Walkyrie, retentissant attentat manqué contre Hitler, Fredi attends son jugement dont l’issue ne fait guère de doutes… L’ayant hébergé pendant sa cavale, Martin craint d’être à son tour arrêté pour complicité passive et déserte, ignorant que son ami avait tout pris sur lui…

Ne pouvant se réfugier chez sa mère chez qui on viendrait immanquablement le chercher, il décide de trouver refuge chez son oncle. Mais, sous la pression de son cousin, pourtant désillusionné par le nazisme, et pour ne pas risquer leurs vies, il décide de rejoindre la famille de Fredi où il retrouve Hilda avec qui il avait eu une brève liaison… liaison qui reprend, presque naturellement, comme si elle n’avait jamais cessé…

Mais l’arrivée au domaine de Magrit, la sœur d’Hilda, et de son mari, tous deux fervents nazis dont la maison a été bombardée par l’aviation russe, va obliger Martin à se cacher dans la cave et à ne plus revoir Hilda qu’à l’abris des regards… Mais Magrit découvre leur secret alors que les troupes russes marchent sur l’Allemagne et que la Campagne de France a commencé…

Il aura fallu attendre un peu moins de huit ans pour pouvoir lire la suite de cette fascinante série qui nous immerge au cœur d’une Allemagne en guerre. Mais les qualités de cette série amorcée il y a plus de vingt ans vaut toutes les attentes…

Scénariste fascinant qui place l’humain au cœur de chacun de ses récits, Philippe Richelle nous entraîne au cœur de la société allemande, faisant voler en éclat les clichés d’une Allemagne une et indivisible soutenant ardemment son Führer. Le premier tome nous racontait avec finesse l’inexorable montée du nazisme dans un pays ravagé par la crise… Dans les suivants, le scénariste y dépeignait à travers le destin d’une poignée d’hommes et de femmes, une société plurielle dont chaque individu réagissait différemment à ce nouvel ordre qui se mettait peu à peu en place… Ce remarquable travail de documentation et d’écriture permettait au lecteur de mieux comprendre comment, par petites touches, de lâchetés en renoncements, cette idéologie nauséabonde a pu s’immiscer dans la société allemande pour finir par arriver au pouvoir et entraîner le monde dans les horreurs de la guerre…

Construit comme d’évidence autour du personnage de Marin Malher, le scénario de ce huitième opus est une fois encore remarquable. D’infinis petits détails viennent compléter le portrait d’une société plus que jamais morcelée alors que le Troisième Reich s’achemine peu à peu vers son terme sous les coups de boutoirs de l’armée russe et des alliés qui viennent de débarquer. Les nazis convaincus qui voient s’ébranler leurs certitudes, l’antisémitisme latent, cet ami d’enfance qui préfère de pas le dénoncer, ce gamin trop heureux d’intégrer les Volkssturm, les simulacres de procès suivis d’exécution particulièrement cruelles, le sapin de Noël décoré avec des boules ornées de croix gammée, le meurtrier bombardement de Dresde qui a ressoudé un peuple derrière Hitler, l’enrôlement de force des personnes âgées, l’exode, la peur de l’avancé de l’Armée Rouge… Chacun de ces éléments est parfaitement en place dans l’histoire, retranscrivant avec subtilité l’atmosphère fin de règne qui régnait à l’époque en Allemagne, tout en écrivant le destin de Martin dont la guerre n'a pas encore terni l’idéalisme et la naïveté…

Le dessin délicat de Jean-Michel Beuriot parvient à faire ressortir toute l’humanité que certains personnages ont su conserver même au cœur des ténèbres, à dépeindre le cœur d’autres qui parfois s’est endurci au fil des épreuves traversées, jusqu’à devenir froid comme la pierre, sans oublier ceux qui ont servi corps et âmes cette idéologie abjecte et qui, sentant le vent tourner et le sort de l’Allemagne scellé, sont prêts à toutes les compromissions pour survivre… La finesse de son trait, l’élégance de son encrage et la douceur des couleurs délicates de Domnok redonnent vie à cette Allemagne des années sombres, soignant les ambiances de chaque scène et de chaque lieu de façon saisissante. L’émotion distillée au fil des pages par son remarquable travail graphique nous transporte et rendent cet album particulièrement remarquable…

Amours Fragiles est sans nul doute l’une des plus remarquables séries jamais écrite sur la seconde guerre mondiale.

A travers le destin de Martin Malher, un jeune officier allemand qui son pays peu à peu s’abandonner au nazisme et entraîner le monde dans la guerre, Philippe Richelle et Jean-Michel Beuriot nous esquissent un portait subtil, délicat et nuancé de la société allemande durant ces années sombres.

De peur d’être arrêté pour avoir hébergé un ami arrêté pour avoir participé à l’Opération Walkyrie, Martin a déserté et va successivement trouver refuge chez son oncle puis dans la famille de Fredi avant que l’avancée inexorable de l’Armée Rouge ne l’oblige à prendre la route de l’exil avec Hida et sa famille…

Le dessin élégant et délicat de Jean-Michel Beuriot sert remarquablement le récit ciselé en mettant en scène des personnages tous particulièrement bien écrits… Ce huitième opus est, à l’image des précédent, un petit chef d’œuvre…

- La Wehrmacht serait en déroute… J’ose à peine imaginer ce qui est en train de se passer… Des milliers de compatriotes, surtout des femmes, des enfants et des vieillards, qui tentent de fuir avant l’arrivée des russes… Avec ce froid glacial, la neige…
- Martin… Prends-moi dans tes bras. dialogue entre Martin et Hilda