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Musée
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Fiche descriptive

Roman Graphique

Christophe Chabouté

Christophe Chabouté

Christophe Chabouté

Vents D'Ouest

Musée d'Orsay

19 avril 2023


23€

9782749309774

Chronique

Entre les statues de marbre et les tableaux de maîtres, les visiteurs du musée d'Orsay posent tantôt des yeux admiratifs, tantôt un regard perplexe sur les chefs-d'oeuvre qui bordent les allées.

Ils échangent dans un murmure discret et continuent leur déambulation. Mais lorsque les portes du musée d'Orsay ferment et que la nuit tombe, les sculptures et les peintures quittent la pose, descendent de leur socle, s'animent, se détendent, se mettent à se raconter, s'interrogent ou commentent ce qu'elles ont pu voir ou entendre au cours de la journée.

L'Olympia de Manet, qui en a peut-être assez de passer sa vie allongée, déserte sa couche ; les Raboteurs de parquet de Caillebotte, fatigués, délaissent les lattes du parquet ; et Héraclès se dirige, comme à son habitude, tout droit vers sa pièce favorite : les toilettes.

Certains se retrouvent pour dresser un portrait peu flatteur des visiteurs indélicats ; d'autres, désabusés, s'assoient pour observer l'absurdité du monde à travers les vitraux de la grande horloge. D'autres encore accueillent les nouveaux venus, car les collections s'agrandissent ! Au petit matin, toutes les œuvres regagnent leur socle ou leur cadre et reprennent la pose avant l'ouverture des portes.
un chef d'oeuvre!


Des œuvres et des hommes
Musée, planche de l'album © Vents d'Ouest / ChaboutéChaque jour, plusieurs milliers de visiteurs viennent au Musée d’Orsay, pour le plaisir d’admirer marbres et toiles de maîtres pour certains, contraints et forcés pour d’autres…

Mais la nuit, alors que le musée s’est vidé, les statues descendent de leurs socles et les personnages s’échappent de leurs cadres… L'Olympia de Manet délaisse ainsi sa couche, les raboteurs de Caillebotte font une pause bien méritée, l’ours de Pompon rêve de banquise alors que l’Héraclès d’Antoine Bourdelle abandonne son arc et sa pose exigeante pour tenter de percer les insondables mystères des toilettes…

A partir des bribes de conversations glanées ça et là et l’observation des humains hantant le musé aux horaires d’ouvertures et de leurs étranges habitudes, statues et peintures vont tenter de comprendre leurs us et coutumes… avant de regagner leurs socles et leurs cadres lorsque pointera l’aube…


la nuit, déserté de ses visiteurs, le Musée d’Orsay s’anime
Depuis Quelques jours d’été, son premier album, Christophe Chabouté n’a cessé de nous surprendre et de nous envoûter au fil de ses albums. Maître des contrastes et du noir et blanc, il a su tisser une œuvre fascinante et singulière dont nous attendons toujours avec impatience la nouvelle pierre de l’édifice…

Musée, planche de l'album © Vents d'Ouest / ChaboutéAvec malice et lucidité, l’auteur de Henri Désiré Landru
, Fables amères ou de Terre-Neuvas continue avec Musée d’esquisser un saisissant portrait de notre humanité et de notre société, comme Emile Zola avait su si bien dépeindre son siècle.

J’avoue avoir été subjugué par la façon dont l’auteur nous fait entrer dans ce récit, prenant le temps de nous faire découvrir la faune interlope qui hante les musées, des visiteurs indélicats aux amateurs éclairés, des pédants qui pensent avoir saisi la substantifique moelle d’une œuvre, faisant peu cas d l’émotion qu’elle peut susciter, en passant par celui-là, les yeux rivé sur son écran, qui se fiche bien d’être entouré de chefs d’œuvre ou de cet autre qui s’arrête l’œil lubrique sur une statue… Les jours succèdent aux jours, semblables aux précédents et identiques au suivant… Mais la nuit… Par petites touches, l’auteur nous fait basculer dans le fantastique… C’est d’abord un chien qui traverse le musée… Cette vison fugace est-elle réelle ou le fruit de notre imagination… Est-ce le même canidé que celui qui promène son chien dans la rue avoisinant l’ancienne gare transformée en musée ? Puis une ombre qui décroche un tableau pour le mettre face à une fenêtre… ou cette imposante silhouette assise par terre devant un autre tableau… Peu à peu, les frontières de notre réalité s’estompent pour faire de nous les spectateurs d’un improbable ballet alors que les couloirs du musée s’animent d’une vie insoupçonnée…

un regard lucide, tendre, cruel et distancié de notre humanité
Musée, planche de l'album © Vents d'Ouest / ChaboutéLes cadrages virtuoses de l’auteur accentuent cet étrange glissement, plaçant le lecteur dans la position de l’œuvre observée ou scrutée, avec intérêt ou passivité. On imagine sans peine l’artiste parcourant le musée et regardant, plus encore que les œuvres, ces visiteurs, écoutant leurs conversations, croquant une attitude ou retranscrivant les échanges autour d’une œuvre ou de telle autre… Sa narration graphique nous pousse avec malice à nous plonger dans ce musée, nous questionnant sur la nature de cette œuvre devant laquelle beaucoup s’arrêtent avec des attitudes très contrastées ou nous poussant à nous demander ce qu’un personnage immortalisé dans le marbre ou sous les pinceaux sûrs d’un artiste pourrait bien penser de ces étranges personnes qui les dévisagent avec insistance ou passe à côté d’eux, sans les voir vraiment…

Les dialogues entres les œuvres sont savoureux à souhait, portant sur notre humanité un regard tour à tour tendre, lucide, mordant et délicieusement distancié de notre humanité et de notre société… des commères qui colportent les ragots aux improbables histoires d’amour qui, dans l’art comme dans la vie, finissent mal, en général… sans oublier ceux qui, toutes les nuits, s’asseyent derrière la rosace de la fameuse horloge du musée et tentent, tels les hommes de la caverne de Platon, de comprendre le monde avec les rares choses qu’ils en saisissent… ou ce Mercure d’Henri Chapu qui vient mesquinement s’en prendre à son ancien amour, la jeune femme à la rose peinte par Modigliani dont on ne peut que comprendre la tristesse… J’avoue avoir une tendresse particulière pour la sublime et touchante Berthe Morisot, immortalisée par Edouard Manet, qui guette chaque soir le promeneur au chien et dont le visage s’illumine, comme transfiguré, lorsqu’elle l’aperçoit…

Musée, planche de l'album © Vents d'Ouest / ChaboutéAuteur rare et précieux, Cristophe Chabouté n’en finit plus de nous envoûter au fil de ces albums esquissant un portrait tendre et cruel de notre humanité… Nous entraînant dans les méandres d’Orsay, son Musée ne fait pas exception à la règle…

Lorsque le musée se vide de ses visiteurs passionnés ou désabusés, les statues descendent de leur socle et les personnages quittent leur cadre pour arpenter le musée, se retrouver et échanger sur ce qu’ils ont vu et entendu, tentant de comprendre notre étrange monde à partir de nos réactions devant eux et des bribes de conversations parvenant à leurs oreilles…

Porté par une narration subtile et délicate et un dessin fascinant qui joue avec art des contrastes, l’auteur esquisse les contours d’un univers fantastique à la lisière du rêve et de la réalité et porte sur notre humanité un regard tout à la fois lucide, tendre, cruel et distancié sur notre humanité.

Une chose est sûre : Après la lecture de Musée, votre perception des œuvres qui y sont exposées sera à jamais chamboulée… Et ne vous étonnez pas si, à l’occasion d’une visite, vous avez la fugace impression que l’Olympia de Manet vous a fait un clin d’œil !


- Je suis toute la journée dans la Grande Salle… Tout là-bas… Si loin de toi… Je me languis de te voir. Les journées sont interminables sans toi.
- Je sais… Moi aussi je trouve le temps long et je me morfonds à lire la même page du même livre à longueur de journée…
- Tu me manques…dialogue page 74

Le Korrigan




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