     Gourou du développement personnel, Uriaki Posta vient une fois encore de faire une conférence qui a fait salle comble… Alors qu’il allait retrouver les invités V.I.P. pour un cocktail, il s’étrangle en avalant une olive… et meurt.
Lorsqu’il se réveille, il est à bord d’un train en partance pour Pandemonia… Comment un homme tel que lui pourrait-il se retrouver en Enfer après avoir aidé des millions d’adeptes à prendre leur vie en main ? Pour lui, il ne fait aucun doute qu’il s’agisse d’une grossière erreur. Il se met alors en quête d’un avocat et, malgré les conseils de ce dernier de plaider coupable et de voir sa peine allégée, il veut aller jusqu’au procès… où il sera fort justement condamné au vu de ses mauvaises actions…
Mais rien ne va plus aux enfers… Lucifer tente tant bien que mal de contacter le Divin-Administrateur pour qu’il comprenne qu’il ne peut plus assumer sa tâche au vu de la liste des pêchers qui va grandissante… Les ouvriers démoniaques se mettent partout en grève et son conseil d’administration souhaite qu’il passe la main… Sans directives divines, Lucifer frôle clairement le burnout…
 Avec son petit air de Kirk Douglas, Uriaki Posta, ses propos mielleux et son attitude volontaire et trop optimiste, agace dès les premières pages… et sa mort ne va rien arranger ! Malgré son procès calamiteux, sa condamnation et les châtiments atroces qui lui sont infligés, il conserve sa foi en lui chevillée au corps, ce qui ne manque pas d’horripiler les démons chargés de le tourmenter… D’autant que franchement, l’Enfer, ce n’est plus ce que c’était !
Tout part à vau-l'eau ! Le Très-Haut est aux abonnés absents, Lucifer doit subir la fronde de son Conseil d’Administration alors que les démons se mettent en grève pour mettre un terme aux cadences… infernales… Ce petit microcosme infernal est un pur délice qui rappellera peut-être de bons souvenirs aux joueurs d’IN/MV, jeu de rôle où la Terre était l’échiquier où Dieu et Satan jouaient à la guerre, par anges et démons interposés, et où les Princes-Démons comme les Archanges ne coopéraient guère entre eux… On sent toute la tension, alimentée par la jalousie et l’ambition, dans ce Conseil d’Administration démoniaque où Lucifer semble tout la fois las et distant alors qu’il est aux premières loges…  Diego Agrimbau a semble-t-il pris un réel plaisir à dépeindre cet enfer et ses tracasseries administratives à la mode entrepreneuriale et cette justice expéditive à l’américaine où il vaut mieux plaider coupable, bien qu’innocent, plutôt que de se faire broyer par la machinerie judiciaire… C’est tout à la fois grinçant et jubilatoire alors que le récit s’achemine vers une fin inattendue qui ne manque pas de mordant…
Le dessin de Gabriel Ippoliti met en scène avec efficacité tourmentés, tourmenteurs et Princes-Démons, habitants volontaires ou non de Pandemonia. La trogne des Seigneur des Enfers est démoniaque à souhait et Lucifer, qui frôle dangereusement le burn-out, s’avère quant à lui particulièrement réussi… Avec sa gueule de Kirk Douglas gominé, Uriaki Posta campe bien l’homme sûr de lui qui garde son sang-froid, une inébranlable confiance en lui et un sourire limite niais en toutes circonstances. Evoquant New-York ou Gotham City, Pandemonia nous offre de savoureux visuels, d’étranges corbeaux un brin facétieux nous conduisant d’un lieu à l’autre pour suivre Lucifer et ses tracas et notre gourou du développement personnel marcher vers sa damnation éternelle..
 La plume mordante de Diego Agrimbau s’associe aux crayons acérés de Gabriel Ippoliti pour nous entraîner au cœur d’un Enfer dysfonctionnel…
Alors que Lucifer Directeur Général des Enfers frôle le burnout, que son Conseil d’Administration l’incite à passer la main, que le Divin-Administrateur est aux abonnés absents, que les démons chargés des sévices se mettent en grève pour mettre fin aux cadences littéralement infernales, Uriaki Posta, Gourou du développement personnel s’étouffe avec une olive après une conférence au succès retentissant, est envoyé en enfer… Refusant de plaider coupable des chefs d’accusation qui pèsent sur lui malgré les conseils de son avocat démoniaque, il est condamné à mille souffrance mais n’en a cure, au grand désespoir des démons chargés de le tourmenter…
Le scénario déjanté de Diego Agrimbau brosse le tableau d’un enfer gangrené par la lourdeur bureaucratique, les luttes de pouvoir intestines et les mouvements de grèves à n’en plus finir, alors que Dieu n’assume clairement pas ses responsabilités, empêchant par l’absence de directive cohérentes Lucifer de faire son job… L’histoire post-mortem d’Uriaki Posta, personnage qui a une foi inébranlable en lui, s’avère irrésistible et déjantée et l’ambiance générale n’est pas sans rappeler celle du jeu de rôle In Nomine Satanis / Magna Veritas de la grande époque (disons la troisième édition) par le joyeux bordel qui y règne… Bienvenue à Pandemonia est au final un album jubilatoirement rafraîchissant, ne serait-ce que par son Lucifer botaniste au bord du burn-out…
- Du calme les amis, du calme. On est tous débordé, je vous comprends. Mais on ne peut pas freiner la production.
- Mais écoute ça : « Péché 34 : tenir des propos politiquement incorrect » et plus bas : « Péché 38 : tenir des propos politiquement correct » . Les deux sont des péchés ? Tu m’expliques ?
- Qui a écrit ça ?
- Le problème vient d’en haut et vous le savez. Le DG ne défend pas ses employés. Vous êtes bien placé pour le savoir.
- Tant que Lucifer n’aura pas réglé ça avec la Sphère Céleste, la lutte continuera !
- Amnistie générale !Extrait de la Commission Parritaire
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