Pour les rôlistes de trente ans d’âge, le nom de Jean-Luc Bizien est immanquablement lié Hurlements, un jeu de rôle initiatique et littéraire qui restera dans les annales pour son inventivité et son concept novateur avec lequel il avait implicitement et bien avant Vampire la Mascarade, posé les bases du jeu d’ambiance.

A présent, le talentueux auteur a embrassé une carrière littéraire, signant de petites perles telles que l’excellent WonderlandZ. Il revient avec un polar historique se déroulant au XIXième siècle, époque qu’il avait déjà exploré avec le jeu de rôle Chimère et son supplément Royaume du Rêve.

Le scénario est fort brillamment construit, mêlant plusieurs intrigues de main de maître, du vol de cadavres à la morgue en passant par la mort étrange par suicide d’un jeune gigolo et toutes celles gravitant autour de l’étrange Simon Bloomberg.
Ce personnage énigmatique qui va cristalliser autour de lui les soupçons de la police et du lecteur n’est pas le seul moteur et celle à qui échoit le rôle d’enquêteur est une jeune anglaise, Miss Engelwood, fraîchement engagée par l’aliéniste.

Les fausses pistes sont nombreuses et l’auteur s’ingénue à égarer le lecteur qui suit les doutes de Sarah Engelwood sur le docteur. De nombreux mystères s’esquissent, de la fuyante Elzbiéta dont l’ombre plane sur la bâtisse du docteur sans que l’on puisse déterminer avec certitude si elle est morte ou vivante, à Ulysse, cet étrange enfant dans un corps de géant. Dense, rythmé et prenant, on suit avec un réel plaisir cette enquête policière dont l’atmosphère s’inscrit dans la lignée des romans feuilleton qui foisonnaient à la Belle Epoque et se voit renforcée par le vocabulaire utilisé.

Au final, la chambre mortuaire, qui devrait connaître une suite, est un excellent polar historique, fertile en rebondissements, qui trouve un dénouement des plus rationnels malgré une intrigue glissant parfois vers le fantastique… Les amateurs des jeux de rôle Crimes ou Maléfices seront en territoire connus et trouveront dans ces pages, en plus d’une histoire rondement menée et de personnages attachants, une source d’inspiration riche et un contexte qui l’est tout autant…

Un excellent roman dans une collection (grands détectives) qui l’est tout autant.