Etienne Davodeau est un auteur à part dont chaque nouvel album est un nouveau chef-d'oeuvre. Celui ci, arrivé avec les vendanges, est une fois encore un grand cru, une histoire simple, prenante et terriblement touchante, un récit doublement initiatique, point de rencontre entre deux mondes sans liens apparents.

A lire le quatrième de couverture, on se demande comment l'auteur parviendra à captiver le lecteur au cours des 272 pages qui constituent ce récit. Mais, dès les premières pages, on est une fois de plus désarmé par l'incroyable talent de Davodeau, la facilité désarmante avec laquelle il nous entraîne dans ses histoires, à la rencontre de personnages captivants, passionnés, mus chacun par l'amour de leur métier et celui du travail bien fait. La façon dont il s'y prend pour immerger le lecteur dans ses albums et lui faire ressentir avec tant de finesse les émotions des différents protagonistes reste pour moi un insondable mystère. Mais le fait est là: on est captivé des les premières pages, conquis avec les suivantes, et il est bien difficile de ne pas lire cet album d'une seule traite... En le refermant, on a l'impression de quitter deux amis qui ont pris le temps pour nous parler de leur métier, avec amour et passion...

L'un est vigneron versé dans la biodynamique, l'autre auteur de BD intimiste et poignante. Le vin, la BD, deux mondes aux antipodes l'un de l'autre... C'est ce qu'on pourrait croire... Mais au fil des pages, alors que chacun parle de son métier à l'autre en lui faisant découvrir ses différents aspects, ses attentes et ses motivations, des liens étranges se tissent entre les deux métier... ténus au départs, ils s'affermissent peu à peu, tant et si bien qu'on y voit à la fin de l'album bien plus d'analogie que de différences entre ces deux univers et ces deux métiers. L'album est didactique mais jamais ennuyeux! On y apprend une foule de chose, le plus beau étant bien sûr la relation étrange qu'entretient le vigneron avec sa vigne, le dessinateur avec son album, et cet incroyable sens du partage qui unit ces deux... créateurs...

Le travail graphique, tout en lavis, est tout en sobriété. Magnifique, il laisse une bonne place à la contemplation de ces paysages au charme captivant, et permet de réfléchir sur de petites phrases apparemment anodines mais qui aide à poser un regard différent sur notre petit monde...

Les ignorants est incontestablement un chef d'œuvre qui séduira tant les amateurs de récits intimiste que ceux de bon vins... On achève la lecture un peu moins ignorant. Mieux même, l'envie de découvrir le monde de la vigne titille quelque peu les papilles et donne une furieuse envie de combler ses lacunes en la matière...
Un album à consommer sans modération, et à partager, puisque la rencontre, l'échange et le partage sont les trois sources à laquelle s'abreuve ce récit intimiste... Un album indispensable...

N'ayant jamais lu Davodeau mais ayant eu de bons retour j'ai feuilleté son nouvel album "Les ignorants". Son trait m'a tout de suite attiré. L'encrage également m'a beaucoup plu. Que ire du livre ? Un beau petit pavé et un thème plutôt sympathique que cette rencontre/découverte croisée du métier de vigneron et celui de dessinateur (scénariste). Le découpage du livre permet aussi de mieux définir les périodes. Les rencontres des autres auteurs (Gibrart/ Marc Antoine Mathieu, Nicoby et le clin d'oeil de Trondheim) sont des petits moments savoureux qui nous plongent au milieu des rapports entre auteurs. S'ils travaillent souvent seuls on voient qu'ils aiment se retrouver et confronter leur vision de la Bd et ce sans aucune sorte de concurrence, juste une façon différente de peindre leur ressenti. Le métier de vigneron est aussi bien mis à l'honneur avec toutes les contraintes de marketing d'éthique et de consommation ( Bio & biodynamie....). Un bon moment de lecture que l'on peut apprécier avec un bon verre....ou sans et que l'on relira pour le plaisir de l'image. A consommer sans modération!

par Laurent Le Pennec