Dans une ruelle du Paris de la Belle Epoque, un vieil homme joue de l'orgue à barbarie accompagnée au chant par une jeune femme aux yeux malicieux. Des pickpockets sont à l'œuvre parmi le public et déleste les bourgeois de leurs bourses et breloques... Et lorsque l'un d'eux se rend compte de leur méfait, ils ont tôt fait de se faire la malle et de disparaître dans les ruelles tortueuses de la ville lumière...

Des musiciens aux pickpocket, tous sont membres d'une joyeuse bande d'apache chassés dans la zone par la spéculation immobilière et les travaux haussmanniens... Réunis autour d'Eugénie, ils sont prêt à toutes les combines et filouteries pour réaliser leurs rêves: redonner vie à l'Oiseau Rare, le cabaret de son grand-père disparu dans les flammes...

Mais les risques qu’ils prennent au quotidien pour redonner vie à l’établissement les entraînent dans une spirale dangereuse…

A l’origine de l’Oiseau Rare un cliché de 1898 pris par Eugène Atget dont les travaux photographiques ont immortalisé le Paris romantique de la Belle Epoque… Représentant un joueur d’orgue de Barbarie accompagnée d’une jeune chanteuse au regard lumineux et au sourire plein de malice, la photographie constitue la première case de l’album… Par la magie des crayons d’Eric Stalner, ces deux musiciens anonymes s’animent et prennent vie pour nous conter leur histoire fantasmée par nos deux talentueux auteurs…

Jeune fille lumineuse poursuivant ses chimères, Eugénie est d’emblée attachante. Son rêve de reconstruire le cabaret de son grand-père et de monter sur les planches est le moteur de l’intrigue mais bien des embûches vont se dresser devant elle avant qu’elle ne puisse atteindre son inaccessible étoile… On suit avec plaisir cette joyeuse bandes de tendres apaches au caractère bien trempé et leur les péripéties rocambolesques concoctées par Cédric Simon et Eric Stalner et qui oscillent entre comédie et tragédie…

Eric Stalner nous immerge dans un Paris tout en contraste, des quartiers huppés à la zone qui s’est développée au-delà des fortifications. S’appuyant sur une solide documentation qui n’est en rien un carcan, le dessinateur nous replonge dans le Paris de la Belle Epoque que nous avions jadis arpenté en compagnie de Fabien M… Secondé par les élégantes couleurs de Florence Fantini (avec qui il avait travaillé sur le remarquable et glaçant triptyque Saint-Barthélémy sur un scénario de Pierre Boisserie ), l’artiste redonne vie à l’époque de façon saisissante, nous faisant ressentir les différentes ambiances qui baignent la capitale. Eric Stalner parvient avec une désarmante facilité à insuffler la vie dans le regard de chacun des protagonistes, rendant le récit plus entraînant encore.

Oscillant entre drame et comédie, ce premier opus de l’Oiseau Rare entraîne les lecteurs dans le Paris tout en contraste de la Belle Epoque, remarquablement retranscrit par les crayons d’Eric Stalner dont le travail est sublimé par les couleurs de Florence Fantini.

S’inspirant d’une photographie d’Eugène Atget représentant un joueur d’orgue de barbarie accompagné d’une jeune chanteuse, Cédric Simon et Eric Stalner tissent un récit aventureux et romanesque mettant en scène une galerie de personnages touchante et foisonnante prêt à tout pour réaliser le rêve d’Eugénie…

Un premier tome prometteur dont nous attendons la suite (prévue pour janvier 2021) avec une certaine impatience…

- Tu t’es comportée comme une enfant ! Tu as mis tout le monde en danger !
- Mais ?
- La sécurité avant tout ! Tu le sais bon sang !
- Il pouvait nous donner de l’argent en plus !
- Pour quelques pièces tu pouvais nous envoyer en prison !
- Je l’ai fait pour l’Oiseau Rare !
- Ça suffit ! Cette fable a assez duré !
- Tu t’en fiches c’est ça ? Tu n’y as jamais cru ?? Eh bien moi, je m’en fiche pas !dialogue entre Amélie et le grand-père