     Brésil, 1822. Mandaté par leur père, riche propriétaire d’une plantation de Cacao, Dom Louis et Tiago, son frère cadet, se pressent au port de Salvador pour y acheter des esclaves robustes. Mais, subjugué par sa beauté, Dom Louis n’hésite pas à acheter de Maïra, faisant fi de la réaction de son père.
Alors que des mouvements indépendantistes inquiètent les autorités portugaises qui souhaitent rabaisser le Brésil au rang de colonie, le patriarche qui sait ne pas être éternel annonce qu’il a décidé de marier son fils à Julia, fille d’un riche planteur, afin de fusionner les deux exploitations, attisant les rivalités entre les deux frères et la jalousie du cadet qui souhaitait l’épouser afin de devenir, lui aussi, un riche propriétaire…
Alors que Louis abuse sans vergogne de Maïra, prête à tout pour s’affranchir de ses chaînes, Tiago, sachant que Julia est secrètement amoureuse de lui, intrigue pour empêcher son mariage avec son frère et pour que son père le désigne comme héritier… Alors que le vieil homme se range à ses vues, il meurt mystérieusement, après avoir fait de Tiago son principal légataire… La rivalité entre les deux frères va se muer en une haine féroce sur fond de guerre d’indépendance…
 Préfacé par Jean Van Hamme à qui l’on doit la Fortune des Winczlav mais aussi et surtout les Maîtres de l'Orge, ce premier opus des Damnés de l’Or Brun nous entraîne dans une saga familiale historique qui met en lumière les dessous peu reluisant de la culture et du commerce du cacao, dénoncé par l’édifiant documentaire de Paul Moreira, la face cachée du cacao…
L’histoire s’amorce de nos jours lorsqu’un père et sa fille entrent chez un chocolatier soucieux de développer le commerce éthique et équitable alors que tant de ses collègues se soucient bien peu de la provenance des fèves et de leur condition de production… Car si ce premier récit nous entraîne dans le Brésil du début du XIXe siècle où l’esclavage était de mise dans les plantations de cacao, de nombreuses plantations contemporaines exploitent sans vergogne des enfants arrachés à leur famille et qui triment pour un salaire de misère, comme nous le verrons sans doute dans les prochains tomes de la série…
 Avec cette fresque historique dont le premier tome est construit sur la rivalité de deux frères, Alcante et Fabien Rodhain nous dévoilent un monde tragique et méconnu à même de nous faire réfléchir sur notre attitude de consommateur de ce produit luxueux aux origines trop souvent opaques. Leur récit romanesque est indéniablement entraînant, mais profondément dérangeant, les principaux personnages de l’histoire étant des salopards de la pire espèce. Et si certain font parfois montre d’une once d’humanité, ils retombent rapidement dans leurs travers les plus sombres…
Après Rani, Francis Valles, le talentueux dessinateur des Maître de l’Orge, retrouve Alcante pour mettre en image une nouvelle saga familiale ancrée dans un contexte historique précis et superbement retranscrit par son trait généreux. Basé comme on s’en doute sur une solide documentation iconographique, l’artiste pose le décor avec efficacité, dépeignant une société esclavagiste déchirée par une guerre d’indépendance pour s’affranchir de la tutelle portugaise. Son découpage précis fait la part belle aux personnages et ses planches, mises en couleurs par les pinceaux de Christian Favrelle, s’avèrent particulièrement efficaces.
 Si le chocolat fait le bonheur des petits et des grands, ses saveurs subtiles masquent son amertume saumâtre… Dans le sillage de l’édifiant documentaire de Paul Moreira, Les Damnés du Chocolat, Alcante et Fabien Rodhain au scénario et Francis Valles au dessin nous entraînent dans les coulisses de l’histoire la production des fèves de cacao, nous révélant qu’aujourd’hui comme hier, si cette denrée rare et précieuse arrive sur nos tables européennes, c’est que d’autres ont versé de la sueur, des larmes et du sang.
Le premier tome de cette saga familiale nous entraîne dans les Brésil des années 1820 pour y suivre les rivalités entre deux frères qui vont se muer en haine farouche, sur fond d’esclavagisme et de guerre d’indépendance. Malgré la noirceur de l’âme des principaux protagonistes, cette amorce s’avère aussi entraînante qu’édifiante…
Destiné à un large public, on ne peut qu’espérer que cette série poussera de nombreux lecteurs à prendre le temps de s’intéresser à la provenance des fèves de cacao utilisées pour fabriquer le chocolat qu’ils consomment, malgré une traçabilité trop souvent limite. Car, aujourd’hui encore, c’est contraints et forcés que des cultivateurs, dont de nombreux enfants, travaillent pour produire une bonne partie du chocolat mondial… Et c’est en agissant en consommateurs avisés et responsables que les choses pourront changer…
- Je dois avouer ma perplexité. Les mouvements d’indépendance dans les pays d’Amérique Espagnole ont fragilisé leur culture du cacao, ouvrant pour nous un âge d’or…
- … que nous souhaitons tous conserver ! L’indépendance rendrait nos exportations plus difficile, sans compter que l’instabilité est toujours mauvaise pour les affaires ! Aussi, ne devons-nous pas prendre le parti du Portugal ?
- Hum, cela se défend… D’autant que nos activités dépendent de la main-d’œuvre des esclaves ! Si jamais les idées de liberté et d’égalité de la Révolution Française essaimaient dans la région… dialogue entre Don Louis, son père et son futur beau-père
|