Fiche descriptive Policier Historique Philippe Pelaez Alexis Chabert Alexis Chabert Bamboo Grand Angle 25 Mai 2022 15€90
9782818979204 Chronique Automne, en baie de Somme Leurs seules armes |
1896… Le corps d’Alexandre de Breucq, riche industriel philanthrope proche du pouvoir, est découvert à bord d’une goélette échouée dans la Baie de Somme… Amaury Broyan, le meilleur inspecteur de la capitale, est dépêché sur place pour élucider cette mort mystérieuse… Pour lui, il ne fait pas l’ombre d’un doute que l’homme a été empoisonné et son intuition lui laisse supposer que son meurtrier a assisté à sa lente agonie… Bien vite, l’inspecteur Broyan soupçonne la veuve du défunt, qu’un codicille désigne comme seule et unique héritière en lieu et place des membres du conseil d’administration… Au fil des témoignage, il apparait qu’Alexandre de Breucq n’est pas un patron ordinaire : si hommes politiques et banquiers se pressaient à ses obsèques, une délégation d’ouvriers a tenu à lui rendre un dernier hommage pour le remercier d’avoir été si soucieux de ses employés… Mais il apparaît bien vite que l’industriel entretenait une liaison avec la sublime Axelle Valencourt, un modèle ayant notamment posé pour Alfons Mucha… De complexe, l’affaire se fait tortueuse et alambiquée, prenant même des tournants inattendus alors que l’inspecteur poursuit ses propres fantômes… l’artiste et ses Maîtres S’il n’y avait le nom de Philippe Pelaez figurant sur l’album, c’est indéniablement le charme envoûtant qui se dégage du dessin qui attire d’emblée l’œil du lecteur… Il faut dire que, évoquant les œuvres de Mucha, la couverture rehaussée d’or est de toute beauté, tout comme les planches de l’album, sublimes et lumineuses. Révélé par son somptueux Rogon le Leu, récit de medieval-fantasy scénarisé par Didier Convard, Alexis Chabert n’a cessé de se renouveler au fil des tomes et des séries qu’il signait, adoptant à chaque fois un style radicalement différent pour servir au mieux l’histoire. Il en va de même pour cet album qui rend un hommage appuyé à Alfons Mucha représentant majeur de l’Art Nouveau, mais aussi à Gustave Caillebotte, peintre impressionniste, collectionneur et mécène, ou à Jean Béraud, fascinant peintre de la vie parisienne de la Belle Epoque, comme le prouve certaines cases qui font clairement références à leurs œuvres…Ses cases sont semblables à de petits tableaux, baignés d’une lumière subtile et de teintes pastelles littéralement envoûtantes qui parviennent à saisir la beauté du monde, mais aussi sa noirceur. Mêlant avec art acryliques, gouaches, encres et pastels, le dessinateur nous donne à voir comme à ressentir le Paris automnal de la Belle Epoque, de ses intérieurs bourgeois aux quartier interlopes, refaisant vivre le village de Montmartre et ses lieux emblématiques, tel le Lapin Agile où aimait à aller Aristide Bruant, Toulouse-Lautrec ou Courteline et tout ce que Paris comptait d’artistes bohèmes. Encrés avec souplesse, les personnages élégants et élancés se détachent des décors évanescents et l’on tombe, comme bien d’autre, sous les charmes d’Axelle Valencourt, de ses troublants yeux verts et de sa chevelure rousse qui inspira, d’après l’album, son Automne à Mucha… Les amateurs de polars trouveront sans doute que l’inspecteur Amaury Broyan a un petit air du Burma de Tardi dont il emprunte par ailleurs, bien que cogne, quelques-unes de ses idées libertaires… un polar social somptueux et envoûtant Si, envoûtant le lecteur dès les premières planches, le sublime dessin d’Alexis Chabert s’avère aussi efficace, c’est qu’il est au service d’un scénario ciselé porté par des personnages complexes et tortueux qui interprètent chacun leur partition… Personne ne joue franc jeu dans cette histoire et chacun poursuit des buts qui lui sont propres, plus ou moins avouables, à commencer par ce policier hors pair qui va, tout en enquêtant sur le meurtre d’Alexandre de Breucq, tenter de retrouver tous ceux qui sont, de près ou de loin, responsables de ce tragique avortement qui fut fatal à sa fille… Car, comme de coutume, le scénariste de Pinard de Guerre ou de l’Enfer pour Aube ancre son récit dans la grande Histoire tout en abordant, en toile de fond, des sujets sociétaux, tel la condition féminine dans cette prétendue Belle Epoque et le droit à l’avortement, comme le montre les textes introduisant chaque chapitre, empruntés à l’œuvre de Nelly Roussel, femme libre et indépendante qui fut l’une des premières à revendiquer le droit des femmes à disposer de leur corps… Car, bien plus que Paris, la Femme, ses différentes facettes et la place qu’elle occupe dans la société, est bien au cœur de ce récit policier qui met en scène deux femmes désireuses de s’affranchir du carcan dans lequel la société a tôt fait de les enfermer avec les seules armes dont elles disposent : leur beauté et leur séduction… Multipliant les arcs narratifs, le scénariste tisse un récit délicieusement alambiqué, prenant un malin plaisir à perdre le lecteur pour mieux le captiver et le surprendre…Avec le talent qu’on lui connaît, Philippe Pelaez donne vie à des personnages subtilement complexes et soigne tout particulièrement récitatifs et dialogues, empruntant parfois au parler argotique, ancrant son récit dans son époque tout en conférant une dimension éminemment littéraire, voire poétiquement mélancolique, à l’ensemble… A noter qu’il existe un tirage spécial somptueux doté d’une magnifique couverture originale et d’un dos toilé et complété par un magnifique cahier graphique qui permettra au lecteur d’admirer les magnifiques crayonnés du dessinateur… Automne, en baie de Somme nous propose un polar ciselé et somptueux se déroulant dans le Paris de la Belle Epoque… Alexandre de Breucq, est retrouvé mort dans sa goélette échouée dans la baie de Somme. Amaury Broyan, brillant inspecteur parisien, est dépêché sur place pour enquêter sur la mort de ce riche industriel philanthrope proche du pouvoir. Il est rapidement établi que l’homme a été empoisonné et que son meurtrier a souhaité assister à sa lente et douloureuse agonie… Les soupçons s’orientent vers sa veuve qu’un codicille désigne comme l’unique héritière… Mais les choses sont peut-être plus complexes et tortueuses qu’il n’y parait… Philippe Pelaez signe une fois encore un scénario brillant et solidement charpenté, porté par des dialogues et des récitatifs subtilement travaillés et des personnages nuancés qui cachent tant bien que mal leurs âmes tourmentées. Si son récit s’avère aussi passionnant, c’est que sous couvert d’une enquête policière, le scénariste met en lumière la femme, « éternelle sacrifiée » de la République, comme le soulignait Nelly Roussel… Rendant un hommage appuyé aux peintres de l’époque, Alexis Chabert nous entraîne dans un Paris de la Belle Epoque sublimé par ses pinceaux qui parviennent à retranscrire avec la même acuité sa beauté comme sa laideur… Graphiquement somptueux et narrativement fascinant, Automne, en baie de Somme est l’un de nos gros coups de cœur de cette fin de printemps… Après la peinture, c’est la danse qui sera à l’honneur dans Hiver, à l’Opéra, second opus de ce polyptyque et l’on peut imaginer que les lumineuses couleurs de Degas ne seront pas loin… - Regardez-les, Amaury… Ils prennent tous un air contrit, alors qu’ils sont comme des vautours qui s’arrêtent à fondre sur l’Empire De Breucq.
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