New-York, 1938, Clifford a onze ans et travaille dans la rue comme cireur de chaussures pour aider sa mère célibataire à joindre les deux bouts. Et lorsque cette dernière meurt, victime collatérale d’un chantage mafieux, le gamin se retrouve livré à lui-même…

Après être tombé sous la coupe d’un mafieux, il se retrouve fugitif et monte à bord du premier train en partance pour n’importe où… Dans le wagon, il rencontre Bojangles, un hobo joueur de guitare… Ce dernier allait devenir son mentor et faire de Clifford un musicien de jazz, lui qui avait été biberonné à cette musique dès sa plus tendre enfance, bercé par les disques de son père et les histoires que lui racontait sa mère…

Trompettiste de génie, il allait croiser la route de Jamila Harris, une chanteuse à la voix suave dont il allait tomber immédiatement amoureux. En unissant leurs talents, il en est sûr, ils accéderont à la gloire ! Mais le destin est souvent facétieux et Clifford ne fera qu’effleurer son rêve. Celui qui a joué avec les plus grands, de John Coltrane à Sonny Rollins en passant par Regina Marbury et Charlie Parker allait amorcer une terrible et irrémédiable descente aux enfers....

Clifford Hicks est une petite merveille d’album qui vous happe et vous chamboule avec le destin de ce gamin déjà cabossé par la vie qui allait s’approcher de son rêve, se rapprocher du soleil, et s’y brûler les ailes…

Le background nous immerge avec force dans cette Amérique et ces clubs de jazz qui accueillait les plus grands joueurs de l’époque. Le contexte est si bien rendu, les personnage si crédibles et cohérent et le scénario de Tommaso Valsecchi si bouleversant qu’on est happé par cette histoire et le sourire irrésistible de Hicks dont on suit la vie ô combien méconnue… Mais s’il n’a pas inscrit son nom en lettres d’or au Panthéon du jazz, c’est parce qu’il y a une bonne raison à cela : Clifford Hicks n'a jamais existé… Et pourtant, sa vie est à elle seule un morceau de jazz. Elle reprend une grille d’accords connus, brode autour de gamme en mineur avec un phrasé syncopé et rehaussé de cette fameuse « blue note » qui donne toute son âme au morceau… Improvisant sans cesse, Clifford Hicks nous interprète un morceau poignant riche en rebondissements, en purs moments de grâce comme en instants douloureux, en rencontres impromptues et en retournements virtuoses…

Hicks rend hommage à tous ces musiciens surdoués mais qui se sont arrêtés aux portes de la gloire sans parvenir à les franchir… Construit comme un film envoûtant et ponctué par des coupures de presse dédiés à des jazzmans fictionnels, ce biopic imaginaire est l’une des grandes surprises de cette fin de printemps… A lire avec un bon vinyle de Jazz sur la platine, avec le crachotement chaleureux et mélancolique d’un disque trop écouté… Ma préférence va à Chet Baker dont il m’a semblé entendre le son velouté et haletant de la trompette en « entendant » Hicks jouer et dont l’itinéraire chaotique trouve des échos dans celui de ce jazzmen imaginaire…

Si le récit de Tommaso Valsecchi s’avère fascinant, le dessin de Riccardo Rosannna est une petite est un concentré de générosité et d’expressivité. Ses compositions sont somptueuses et servent remarquablement le propos alors que ses couleurs accentuent avec finesse la mélancolie distillée par l’histoire. Mais c’est surtout la formidable capacité du dessinateur italien à mettre en scène des personnages touchants et tragiquement humains qui force l’admiration et rende cet album particulièrement envoûtant… Difficile de croire que ce Clifford Hicks soit le premier album de l’artiste tant il maîtrise son sujet sur le bout des doigts…

Tommaso Valsecchi et Riccardo Rosannna se propose de nous raconter la vie de Clifford Hicks, artiste de jazz virtuose mais méconnu qui s’est brûlé les ailes en poursuivant son rêve…

Orphelin depuis ces onze ans, Hicks a vécu une vie de hobo en compagnie de Bojangles qui a fait de lui un musicien de jazz, rêve qu’il caressait depuis qu’il a découvert cette musique par son père et les histoires que lui racontait sa mère, le soir… Lorsqu’il croise la route de Jamila Harris, chanteuse à la voix suave et envoûtante, il en tombe d’emblée amoureux et voit son rêve prendre corps… Mais lorsqu’elle le quitte, il sombre dans la drogue et entame une spirale infernale qui lui fera plus d’une fois frôler la mort…

Le dessin expressif et généreux de Riccardo Rosannna est au diapason du scénario entraînant de Tommaso Valsecchi. Ses crayons et ses pinceaux envoûtants mettent en scène des personnages bouleversant avec une rare justesse et l’on s ‘attache à ce jeune homme au destin cabossé qui improvise sa vie comme il joue de la trompette. Une fois l’album refermé, on n’a qu’une envie : chercher sur internet un morceau de Hicks pour se laisser bercer par ses mélodies… Hélas, c’est inutile… Clifford Hicks n’est qu’un être de papier, un trompettiste de fiction qui rend hommage à tous ces musiciens virtuoses qui ont côtoyé et joué avec les plus grands mais qui se sont arrêtés aux portes de la gloire… Mais une chose est sûre : chargée de mélancolie, la vie de Clifford Hicks ne vous laissera pas indifférent !

- Tu crois que c’est un hasard ?
- On est à la Nouvelle-Orléans. Même les murs savent faire de la musique.
- Justement ! Tu t’es déjà sentier en phase avec quelqu’un ? Ma musique et ta voie se marient à la perfection ! Il y a eu de la magie entre nous, tu ne peux pas le nier !
- Et alors ? Même si c’était vrai… Qu’est-ce que tu attends de moi ?
- Tu veux devenir la chanteuse la plus célèbre qui soit, et moi le meilleur trompettiste de l’histoire. Seuls, nous ne pourrons jamais y arriver, mais ensemble… ensemble, on a peut-être une chance.dialogue entre Clifford Hicks et Jamila Harris