Fiche descriptive
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« Lord of War » est une satyre cynique du métier de trafiquant d’armes, signé par Andrew Niccol (« Bienvenue à Gattaca »). Le film retrace la vie et l’ascension, sur une vingtaine d’années, d’un marchand d’armes autodidacte qui est en fait la synthèse de plusieurs marchands de mort réels dont le réalisateur s’est inspiré pour nous fournir un portrait paradoxalement très humain, qui s’embourbe derrière une distance métaphysique que l’on sent plus fragile qu’une vie au bout d’un canon. Au passage, on décortique du point de vue du marché des armes à feu les conséquences de la chute du bloc soviétique. Intéressant. La réalisation est à cheval entre le documentaire et l’autobiographie, avec une voix off omniprésente qui dévoile une vérité que le personnage se borne à cacher aux siens. Les phrases cyniques s’entremêlent avec les scènes chocs. Les personnages sont pour la plupart plus des caricatures et des symboles que des figures réalistes. Heureusement, cela apporte le grain de fantaisie qui fait passer le constat terrifiant qui nous est proposé avec le sourire. C’est à la fois le charme et la faiblesse du film, qui reste trop léger et trop superficiel à mon goût pour un sujet aussi sensible. Mais rappelons qu’il s’agit d’un film, et pas d’un documentaire. L’exposition du « problème » est donc aussi un exercice de style pour le cinéaste, et c’est bien normal. Certains seconds rôles sont truculents à souhait, notamment le dictateur libérien. Cela dit, ils restent bien discrets derrière la prestation de Nicholas Cage, notamment Bridget Moynahan, qui ne sert pas à grand-chose. Au demeurant, on notera l’omniprésence des femmes-objets, que ce soit par souci de réalisme ou pour accrocher le spectateur masculin. On apprécie, ou pas. Jared Leto, que l’on retrouve en toxicomane (« Requiem for a dream »), est toujours aussi beau et fragile, dans le rôle de la conscience malade du trafiquant. Les producteurs (le français Philippe Rousselet et Andrew Niccol) ont peiné à trouver les subsides pour le film, et on le comprend lorsque l’on sait que le héros immoral sert lui un propos qui se veut on-ne-peut-plus moraliste et certainement pas militariste…donc pas forcément américain. Le film a d’ailleurs dû être vendu comme un film d’action outre-atlantique pour espérer être rentable (si je ne m’abuse). D’ailleurs, j’avoue avoir été inquiet du fait que le film se concentre sur le trafiquant d’armes, plutôt que sur les producteurs et principaux pourvoyeurs de la Faucheuse, à savoir : les états (80 à 90% du commerce). Heureusement, la fin du film conclue en beauté la démonstration, et n’oublie pas de rendre les lauriers à qui vous savez. « Lord of war » nous invite à nous demander, en fin de compte, qui a vraiment le pouvoir de fournir les gilets pare-balles au monde...
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