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Jarhead - la fin de l'innocence
Jarhead - la fin de l'innocence



Fiche descriptive

Film de Guerre

Sam Mendes

Jake Gyllenhaal, Peter Sarsgaard, Jamie Foxx

11 Janvier 2006

2h03min.

Chronique
Jarhead - la fin de l'innocence
Traversée du désert

Eté 1990. Anthony Swofford, fils et petit-fils de militaires, vient tout juste de fêter son vingtième anniversaire lorsqu'il est envoyé dans le désert saoudien. La Guerre du Golfe vient d'éclater, son bataillon de Marines est parmi les premiers à se déployer dans cette aride et immense étendue de sable.
Pour ces jeunes déracinés, gavés d'images et de phraséologie guerrières, ivres de rock et de bière, commence alors la longue et dérisoire attente d'un ennemi fantôme. La soif, la peur, l'épuisement, l'ennui, les frustrations lancinantes, les tensions extrêmes s'additionnent dans un climat de plus en plus délétère et explosif. Dans cet enfer naîtront pourtant de surprenantes et inaltérables amitiés entre compagnons d'armes liés par le vieux serment des Marines.
un excellent film!


Traversée du désert
J’ai pour habitude de différencier les films DE guerre et les films SUR la guerre.
Ici, Sam Mendes (« American Beauty ») nous propose une œuvre à relier définitivement à cette deuxième catégorie, ne serait-ce que par la pudeur qu’il affiche en nous refusant les scènes d’action et le sang versé…mais la tension sous le joug de laquelle il nous place, par le biais du brillant Jake Gyllenhaal (« Donnie Darko », « Le Jour d’après ») et de ses frères d’arme, est à ce point intense et réaliste que l’on ne sort pas vraiment non plus de ce désert, lorsque « la guerre est finie ».
Il est à noter que « Jarhead » est l’adaptation du roman autobiographique d’Anthony Swofford, soldat lors la guerre du golfe, qui nous sert de guide et de témoin.
Les prestations des acteurs sont authentiques et habitées, en particulier celle de Jamie Foxx en militaire accro qui sait qu’il n’y pas d’ailleurs, mais également celle de Peter Sarsgaard, dont la présence interpelle et dont le regard va vous chercher au fond des yeux. Et je ne vous parle que des acteurs principaux, même si la galerie est assez caricaturale…

Le réalisateur, en choisissant d’adapter le livre éponyme de Swofford, s’engage résolument dans une réflexion sur la guerre moderne en général et sur le « syndrome de la guerre du golfe » en particulier, né de l’impossibilité pour des milliers d’hommes de justifier leur présence en terre hostile et étrangère, à la recherche d’un ennemi qu’ils ont dû accepter plutôt que choisir.

A ce titre, le parallèle entre la masturbation et le tir sur cible vivante est à mon avis des plus pertinentes. Car en effet, la solitude et l’inutilité -voire l’abandon- sont les pires ennemis du soldat du 21ème siècle (si l’on oublie les erreurs médicamenteuses et les approximations tactiques), à l’heure des guerres téléguidés et télévisés. On leur invente un ennemi, contre et par lequel on leur apprend à exister…pour les en priver. Ce conditionnement, évoqué sans fausse pudeur par le réalisateur, permet de mettre en relief le sentiment d’inutilité des fantassins dressés à tuer un ennemi qu’ils ne verront jamais. L’investissement consenti par les soldats, dans ce contexte de fragilité émotionnelle qu’exploite à merveille l’armée, rend d’autant plus douloureuse la frustration de ne même pas avoir le droit à une parcelle d’identité, fusse-t-elle celle de tueurs. Ce désert qu’ils traversent, est celui de leur propre vie. Et là-bas, il n’est pas possible de le fuir. La souffrance de la condition de militaire doit avoir une raison, un motif, pour être assimilée. Mais comment faire lorsqu’il s’agit de détruire un ennemi -invisible de surcroît- dans sa propre maison et pour des motifs futiles (c'est-à-dire mercantiles), tout en ayant le sentiment d’être oublié de son commandement, et de son pays?

Sam Mendes n’oublie pas non plus de ponctuer son film de quelques plans esthétiquement réussis et symboliquement très forts qui confinent au surréalisme, comme le désert en flammes, l’assemblée des morts (et des morts-vivants), ou ce cheval perdu égaré sous une pluie noire qui sera le seul indigène que le héros aura l’occasion de rencontrer. Ce sont des lieux de perdition ou la terre elle-même pleure, ou l’homme est seul face à soi-même, face à son rôle, face à ce qu’il pourrait être. Chaque plan, ou presque, a sa signification. C’est de l’art, tout simplement.

De là ou je suis, « Jarhead » est finalement un tour de force, puisque son réalisateur parvient à décortiquer le mécanisme de la guerre et des blessures qu’il engendre de manière très pudique tout en étant quasi-exhaustif (pour ce que j’en sais, bien sûr). Les remarquables prestations des acteurs, l’esthétisme de la mise en scène et la réflexion qui le traverse de part en part, consacrent « Jarhead » comme l’un des héritiers des classiques du genre.
Keenethic



Inspiration jeux de rôle

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