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Le Travail du Furet
Le Travail du Furet



Fiche descriptive

Science-Fiction

Jean-Pierre Andrevon

Folio SF

Février 2004

Chroniques

Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes du XXIe siècle. La santé de la population ne cesse de s'améliorer ; toutes les statistiques le prouvent. Le problème, c'est de maintenir les grands équilibres. Pour y parvenir, il faut supprimer 400 000 citoyens par an dans l'Hexagone. Choisis avec art et méthode par le Grand Ordi, qui chaque matin procède à un tirage au sort morbide. Le travail des Furets consiste à liquider, pas forcément en douceur, tous ceux dont la vie doit prendre fin au bénéfice de la communauté. Un boulot comme un autre, en somme. Avec des avantages

Jusqu'au jour où un certain Furet, grand amateur de films noirs du XXe siècle, commence à se poser des questions sur son job... C'est alors qu'il découvre sur sa liste le nom de Jos. L'amour de sa vie...
un bon bouquin !


sombre et cynique
Ayant découvert les superbes chroniques de Centrum en BD, c’est tout naturellement que je me suis procuré l’œuvre dont est tiré le scénario de la BD, Le travail du Furet, de Jean-Pierre Andrevon qui a aussi signé le scénario de l’adaptation BD. Le titre original du livre devait être « Le travail du furet à l'intérieur du poulailler » mais les éditeurs semblent avoir préféré le condenser, atténuant par la même son impact…

L’action se passe en France, dans un avenir plus ou moins lointain. Le temps a passé, le fossé séparant les classes sociales s’est élargi, les pauvres vivent dans une pauvreté abyssale en marge de la société, alors que les riches vivent dans leurs ghetto, préservant ainsi de manière abjecte une certaine paix sociale.
La médecine a fait de tels progrès qu’on ne meure plus… de maladie je veux dire. Mais la surpopulation guette et pour maintenir un niveau de population écologiquement et économiquement viable, l’Etat a mis en place un terrifiant contrôle de la population.
Tout le monde, riche comme pauvre, peut faire partie des quelques 400.000 personnes qui chaque année sont désignés par tirage au sort pour être effacés… Des travailleurs assermentés par l’Etat sont chargés de faire la basse besogne, on les surnomme les Furets. Aidés dans leur tâche par des implants biométrique implanté sur chaque citoyen et permettant de les localiser, il accomplissent leur tâche d’intérêt public, éliminant froidement les cibles désignées par un ordinateur central…

Le narrateur, héros cynique du roman, est un Furet, particulièrement doué, qui chaque jour accompli son boulot, froidement, consciencieusement, sans états d’âmes. Amateur de films des années 30 (1930) à 60, il ponctue ses faits et gestes de références aux acteurs et aux cinéastes de cette époque qui semblent être l’une de ses seuls passions.
Mais un jour, la machine se grippe… Un grain de sable nommé Mac Steranko, ancien furet passé dans la clandestinité, va enrayer la mécanique et ébranler ses certitudes… Et si le tirage au sort était truqué? Si les noms figurant sur la liste des personnes à effacer n’y était pas par hasard mais servir les intérêts politiques des gouvernements? Dès lors le Furet se met à cogiter… Toutes ses certitudes s’effondrent lorsqu’il trouve sur sa liste de personnes à effacer, Jos, l’amour de sa vie…

Si l’action du roman est lente à démarrer, c’est que l’auteur prend le temps de nous immerger dans cet univers cynique et terrifiant qu’est la France en 2064. Car si le développement de l’intrigue peut paraître statique, il permet de présenter les dérives pernicieuses de notre société, la noirceur du monde dépeint, la froideur méthodique du personnage central, pour mieux emmener sa révolte pathétique contre le système qu’il a servi en docile petit soldat…

Le style de l’auteur et sa maîtrise de la langue inscrit « Le travail du Furet » dans la lignée des polars noirs : un univers et des personnages sombres, teintés d’humour noir, avec une bonne dose de cynisme et une attaque en règle des travers de la société.

Un roman fort et violent dont le début peut en rebuter certains mais qui, franchement, vaut plus que le détour…
Le Korrigan


un excellent bouquin!


une écriture jouissive et un humour omniprésent
Un futur pas si éloigné. Les progrès de la médecine sont considérables, tellement, que les gens ne meurent plus assez vite. Alors, il faut donner un petit coup de pouce au destin, c'est là qu'interviennent les tueurs du ministère pop, les furets comme on les appelle. Leur job est simple : liquider des citoyens. Au hasard, en suivant une liste qu'ils reçoivent quotidiennement. Chaque année près de 400000 personnes sont ainsi effacées, le prix à payer pour éviter une explosion démographique.

Le narrateur est l'un de ces furets. Un fonctionnaire qui excelle dans son travail. Cynique, amateur de vieux films, il n'aime pas ses contemporains ; riches, pauvres, intellos, personne ne trouve crédit à ses yeux. Sauf Jos, son amour. Ecrit à la première personne à la façon d'un polar noir, «Le Travail du Furet » est un régal stylistique pour peu qu'on apprécie la littérature noire. Si le thème développé n'est pas vraiment original dans le paysage de la SF d'anticipation, l'écriture jouissive et l'humour omniprésent parviennent à gommer cette petite faiblesse. J'ai adoré .

Imed Hazourli

1000 visages

un bon bouquin !


Un furet, ça ne pense pas, ça obéit
Syndrome ou symptôme ? La science-fiction passe de l'opéra au polar. Jean-Pierre Andrevon participe de ce concert et instrumente avec maîtrise. S'il vous plaît, ne lisez pas ce livre au hasard. Il témoigne d'une volonté de renouvellement trop évidente pour être négligée. C'est un tout : extraire une phrase de son contexte la fait paraître « mal écrite ». Au contraire ! Andrevon a su recréer un monde dans la totalité de son langage, de sa topographie humaine et politique, dans l'intégralité de ses détails. Il a repris avec bonheur le thème d'une de ses anciennes nouvelles (« Salut Wolinski ! » in Les soleils Noirs d'Arcadie, Opta) pour, tel un Jeury, s'en servir de tremplin, non de béquille. L'argument ressortit au roman noir classique. Au roman... plutôt au film.

Voici un tueur professionnel, fonctionnaire d'un état soucieux de préserver l'équilibre de sa population. Pour ce faire, le gouvernement emploie des furets, chargés de tuer chaque année, sur le territoire français, quatre cent mille personnes tirées au sort dans une loterie. Le furet vit sous nos yeux plusieurs journées de travail. Un labeur bien monotone. Est-ce pourquoi, lorsqu'un « ami » vient semer le doute dans son esprit sur le fonctionnement réel de cette loterie et sur le prétendu hasard censé la guider, il décide d'enquêter ? Après avoir tué son ami, qui était (par hasard...) sur sa liste de cibles, il devient vite, de chasseur neutre, chasseur impliqué, puis gibier.

Personnage sans pudeur, presque sans nom, le furet arpente les rues : dans les quartiers de pauvres, elles sont baptisées d'après des acteurs et des chanteurs célèbres autrefois : Mireille-Mathieu, Line-Renaud, Claude-François, Alain-Delon, Ronald-Reagan ; dans les quartiers riches, les révolutionnaires : Che-Guevara, etc. ; chez les intellos : Franz-Kafka, Vladimir-Boukovski, Mircea-Eliade... Ses références sont exclusivement filmiques, ses préférences vont au cinéma hollywoodien d'avant 1964 (au passage, vigoureuse dénonciation de Godard et de ses films constitué de « scènes sans raccords »). Tandis que les quelques renvois à la littérature, de SF ou non, comme Gérard Klein et sa nouvelle « Les blousons gris », Jean Genêt, et autres, sont systématiquement dénoncés par des formules du genre « Mais ces phrases-là, on les trouvait dans les livres, et moi je n'en lis jamais, de livres, » etc. A moins que les livres n'aient été adaptés au cinéma (Moby Dick). Ira-t-on jusqu'à assimiler l'auteur à son personnage, comme il serait facile de le faire lors d'une lecture en diagonale ?

Andrevon sera-t-il surpris des réactions suscitées par son livre ? C'était peut-être son but : surprendre, être surpris... La succession des masques, des déguisements employés avec une espèce de jouissance lasse par le furet, l'arsenal varié et variable tout autant que meurtrier qu'il porte et supporte, le vocabulaire qui renvoie souvent à un réfèrent très sexué (sexuel ?) jusque dans les descriptions les plus ordinaires, tout cela compose un personnage (faussement ?) malsain. Son érotisme est miroir : la seule scène érotique montrée, d'ailleurs à la sauvette, est une masturbation. Et bien sûr, cette censure de la sexualité transparaît dans la véritable sudation subie par son vocabulaire. Ce monolithisme n'est qu'apparence, le personnage est fragile, fêlé, discret. Il glisse. Et la pluie persistante qui semble noyer son univers n'est qu'un signe de plus envoyé par l'auteur. Ce monde n'apparaît pas comme étranger aux lecteurs de SF. La référence à Dick... ou à Blade runner.

Le jeu se poursuit jusqu'au bout, il est impossible de prendre Andrevon en défaut. Son roman a la cohérence des œuvres solides, son personnage la fragilité des créations intelligentes. Surprendre, c'est réussi. Etre surpris...

par Michel Pogu
homme invisible



Inspiration jeux de rôle

Cette fiche est référencée comme inspi pour 1 jeux de rôle.

Cyberpunk est le premier jeu de rôles à exploiter le thème littéraire du même nom. Il est donc fortement inspiré des romans de William Gibson, Walter Jon Williams, Bruce Sterling, Allec Effinger, Pat Cadigan, etc. L'expression cyberpunk vient du mot cybernétique, la science de la communication entre l'homme et la machine, et du mot punk : mouvement musical et social du début des années 80 ayant lancé le slogan "no future". Le mélange des deux nous plonge dans un futur proche et sombre, où la technologie est omniprésente tandis que la décomposition sociale atteint son paroxysme. ..